pouvoirs publics
Question de :
M. Jean Leonetti
Alpes-Maritimes (7e circonscription) - Les Républicains
Question posée en séance, et publiée le 3 décembre 2015
VALEURS RÉPUBLICAINES
M. le président. La parole est à M. Jean Leonetti, pour le groupe Les Républicains.
M. Jean Leonetti. Monsieur le Premier ministre, dans le contexte des événements tragiques du 13 novembre, un fait, à mes yeux majeur, choque nos concitoyens et aggrave leur chagrin et leur colère : un certain nombre de terroristes étaient des Français. Pour nous, les Républicains, que les choses soient claires, aucune excuse, qu'elle soit culturelle ou sociale, n'est possible à l'égard de ceux qui ont commis des actes de barbarie et de ceux qui les approuvent. La France n'est pas coupable de discrimination religieuse, parce qu'elle est laïque, d'exclusion sociale, parce qu'elle est généreuse, d'apartheid, parce qu'elle n'est pas raciste. Elle n'a pas non plus à s'excuser auprès de quiconque de son passé ou de son histoire, qui a fait de nous ce que nous sommes. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.)
Aujourd'hui, les drapeaux français sont à nos fenêtres, les parlementaires et le Gouvernement chantent, presque à l'unisson, la Marseillaise. (Exclamations sur quelques bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.) Qu'est-ce qu'être Français ? Ce n'est ni la croyance en une religion, ni le fait de partager une origine commune ou la même couleur de peau. C'est, comme le disait Renan, un héritage à partager et une communauté de destin. Pour réussir l'intégration, ces idées, ces valeurs doivent être défendues à l'école et dans nos familles, avec autorité. On n'a pas le droit d'interdire de caricaturer dans le pays de la liberté. On n'a pas le droit de voiler la face d'une femme dans le pays de l'égalité.
M. Jacques Myard. Bravo !
M. Jean Leonetti. On n'a pas le droit de prêcher la haine dans le pays de la fraternité. On n'a pas le droit de placer les lois religieuses au-dessus des lois de la République, à cause de la laïcité. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union des démocrates et indépendants et sur quelques bancs du groupe Les Républicains.)
Monsieur le Premier ministre, êtes-vous prêt, avec détermination, au-delà des symboles et des paroles, à faire respecter avec intransigeance, dans la pratique et dans les faits, les principes républicains liés à notre identité nationale ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains et du groupe de l'Union des démocrates et indépendants.)
M. Marcel Rogemont. Très bien !
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
M. Manuel Valls, Premier ministre. Monsieur Jean Leonetti, vous avez raison, ce qu'on a voulu attaquer, en janvier, déjà, ce sont des hommes et des femmes, bien sûr, mais aussi des symboles : la liberté d'expression, la liberté de caricature, l'ordre républicain, à travers les forces de l'ordre et ces policiers qui sont tombés. Ce que l'on a voulu mettre en cause, c'est notre diversité, en s'en prenant à des Français juifs, parce qu'ils étaient juifs. Ce que l'on a voulu toucher, abattre, le 13 novembre dernier, c'est un art de vivre ; c'est hélas parfaitement dit dans les communiqués de Daech. C'est une manière de consommer, c'est l'égalité entre les hommes et les femmes, c'est la culture, c'est l'art, c'est la musique.
Face à cela, il faut une réponse : il s'agit, bien sûr, comme cela a été dit plusieurs fois dans cet hémicycle, sur tous les bancs, de la manifestation de l'autorité de l'État, de la guerre dans laquelle nous sommes engagés, de la lutte contre les terrorismes. C'est aussi – vous l'avez dit avec vos mots, qui sont forts – la République dans tous ses aspects. Il ne s'agit pas seulement d'incantation, de la formulation de paroles nécessaires ; il s'agit de ce patriotisme qui est présent, que l'on sent partout dans le pays, dans toutes les catégories de la population, au sein de toutes les générations. C'est l'amour du drapeau, c'est l'amour de la France, que nous devons chérir, c'est l'amour de l'hymne national, que l'on a, d'ailleurs, trop laissé siffler dans nos stades et lors de manifestations. (Applaudissements sur certains bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen, du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste, du groupe Les Républicains, du groupe de l'Union des démocrates et indépendants.)
M. Gaby Charroux et Mme Véronique Massonneau. Très bien !
M. Manuel Valls, Premier ministre. C'est l'apprentissage des valeurs, de la laïcité, et c'est tout l'engagement mené au sein de l'école, en particulier de la part des enseignants, qui sont formés depuis des mois à la transmission des valeurs et de la laïcité. Cela évitera qu'un gamin, dans l'un de nos quartiers populaires, puisse encore dire, à l'école, que son ennemi est le juif : malheureusement, vous le savez, nous avons trop entendu cela au cours de ces dernières années. C'est l'égalité entre les hommes et les femmes – vous l'avez rappelé –, et l'application stricte et absolue de la loi, qui interdit tous les signes religieux à l'école, dont la burqa, le voile intégral dans l'espace public.
M. Jacques Myard. Il faut en effet l'appliquer !
M. Manuel Valls, Premier ministre. Le ministre de l'intérieur a encore rappelé aux forces de l'ordre et aux préfets combien ces lois devaient être appliquées partout, sur l'ensemble du territoire, car on se trouve là face à un symbole majeur, qui doit être en permanence respecté. Oui, ce sont tous ces symboles, tous ces mots, tous ces actes que nous devons faire vivre au sein de la République.
On a voulu attaquer un modèle, un art de vivre, un pays et un peuple libres, qui parlent au monde entier. Notre réponse tient donc aussi à l'affirmation de ces valeurs, et je suis convaincu que nous pouvons tous nous retrouver autour de celles-ci.
Je voudrais évoquer deux autres sujets. Le premier, vous l'avez souligné, c'est la fraternité. La réponse à la barbarie, la réponse au terrorisme, c'est aussi un modèle de vivre ensemble, c'est le respect des autres, quels que soit sa religion, son lieu de naissance et sa couleur de peau. Vous l'avez parfaitement dit : la France, ce n'est pas une religion, ce n'est pas uniquement un héritage, c'est une manière de vivre et de regarder le monde. Si nous sommes français, c'est parce que nous partageons des valeurs qui nous sont communes.
M. Meyer Habib et M. Philippe Gomes. Très bien !
M. Manuel Valls, Premier ministre. Le dernier élément, c'est notre propre comportement. Quand on a la chance d'avoir une belle démocratie comme la nôtre – même si elle doit évidemment relever des défis, résoudre ses problèmes et ses fractures –, il faut prendre ses responsabilités ; chacun de nous doit s'y employer, par son propre comportement, nous-mêmes – ceux qui gouvernent, ceux qui ont gouverné comme ceux qui aspirent à le faire – mais aussi chaque Français. Le premier rendez-vous, monsieur le député, c'est dimanche prochain. La meilleure manière de conforter la démocratie, c'est de voter, et de voter pour la République. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.)
M. Gaby Charroux et Mme Véronique Massonneau. Très bien !
M. Laurent Furst. Et de voter pour Les Républicains !
Auteur : M. Jean Leonetti
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : État
Ministère interrogé : Premier ministre
Ministère répondant : Premier ministre
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 3 décembre 2015