14ème législature

Question N° 3442
de M. Yves Albarello (Les Républicains - Seine-et-Marne )
Question au gouvernement
Ministère interrogé > Premier ministre
Ministère attributaire > Premier ministre

Rubrique > ordre public

Tête d'analyse > terrorisme

Analyse > lutte et prévention.

Question publiée au JO le : 10/12/2015
Réponse publiée au JO le : 10/12/2015 page : 10481

Texte de la question

Texte de la réponse

LUTTE CONTRE LES MOSQUÉES RADICALES


M. le président. La parole est à M. Yves Albarello, pour le groupe Les Républicains.

M. Yves Albarello. Monsieur le Premier ministre, tous les Français, sans exception, ont été traumatisés par les attentats perpétrés sur notre sol le 13 novembre dernier. Après ces attentats dramatiques, la riposte a été immédiate et couronnée de succès. Je tiens à saluer le courage et l'efficacité de nos forces de l'ordre et des services de secours. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains, du groupe de l'Union des démocrates et indépendants, du groupe socialiste, républicain et citoyen, et du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.)

Bien sûr, mes chers amis, nous regrettons le temps perdu, mais aujourd'hui, la réponse ne peut plus attendre : il vous faut maintenant agir. J'ai moi-même signalé à votre ministre de l'intérieur, en juillet dernier, le cas d'un jeune Français dont le comportement a inquiété son entourage tant sa radicalisation était devenue évidente.

Le maillon faible, ce sont les mosquées salafistes radicalisées. À Lagny-sur-Marne, commune de ma circonscription, nous nous doutions que la mosquée pouvait abriter des imams radicaux. Lors de la perquisition du 2 décembre, un pistolet a été retrouvé, ainsi que des munitions de calibre 7,62 pour armes de guerre de type kalachnikov, des chants religieux à la gloire des martyrs du djihad, une école coranique clandestine et des vidéos de propagande de l'État islamique.

Ces mosquées radicalisées, implantées sur l'ensemble du territoire national, au nombre de quatre-vingt-neuf selon le ministère de l'intérieur, se distinguent des mosquées traditionnelles par leurs pratiques, en rendant certains jeunes plus vulnérables à la radicalisation. Cela constitue un véritable danger pour la sécurité des Français. Ces imams venus d'ailleurs infusent leurs thèses radicales, qui plaisent aux jeunes. Ces lieux de culte qu'ils noyautent représentent de véritables viviers, pour ne pas dire des « couveuses », pour les futurs combattants du djihad.

Monsieur le Premier ministre, quelles mesures comptez-vous mettre en œuvre pour fermer définitivement ces mosquées radicalisées qui propagent un discours fondamentaliste ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Manuel Valls, Premier ministre. Monsieur le député, le ministre de l'intérieur aurait pu répondre à votre question, mais il se trouve cet après-midi à Londres où il participe à une rencontre avec d'autres ministres de l'intérieur, afin de joindre tous les efforts pour lutter contre le terrorisme, contre l'État islamique qui s'attaque non seulement à la France, mais aussi à d'autres cibles en Europe et dans le monde.

Un certain nombre d'éléments nous ont conduits à réaliser, le 2 décembre dernier, une perquisition à la mosquée de Lagny-sur-Marne, ainsi que dix perquisitions administratives individuelles visant des personnes participant directement à sa gestion ou à son organisation. Cette mosquée, qui était déjà dans le collimateur de nos services – une procédure de fermeture avait déjà été engagée mais devait encore être approuvée en conseil des ministres –, a été fermée en vertu de la loi du 3 avril 1955. Les opérations menées ont permis de découvrir une structure scolaire totalement dissimulée, parfaitement illégale. L'État était donc fondé à invoquer cette disposition de la loi relative à l'état d'urgence.

Au-delà de ce seul motif, il est clairement établi que cette mosquée était un élément structurant d'une filière de recrutement djihadiste où l'on trouve un certain nombre de personnes dont un prêcheur de la haine faisant l'apologie du djihad et de la mort en martyr. Cet homme a joué un rôle majeur dans l'endoctrinement de personnes qui se sont, par la suite, portées volontaires pour le djihad en Syrie, aussi bien pour le compte de l'État islamique que du Jabhat al-Nosra. Cette personne avait déjà fait l'objet d'un gel administratif de ses avoirs, en qualité de gestionnaire de la mosquée. De nombreux éléments démontrent que cette filière était pérennisée.

Qu'il s'agisse de la mosquée de Lagny-sur-Marne ou d'autres mosquées, nous allons poursuivre, dans le cadre de l'État de droit et de l'état d'urgence, ces perquisitions et cette traque de l'islamisme radical, du salafisme qui corrompt une partie de notre jeunesse. Nous devons agir et être intraitables.

Vous l'avez dit, monsieur Albarello : les perquisitions du 2 décembre à la mosquée de Lagny-sur-Marne ont permis de saisir des documents relatifs au djihad, un disque dur dissimulé, plusieurs ordinateurs, ainsi qu'une arme et des munitions qui justifient des poursuites judiciaires. C'est vrai à Lagny-sur-Marne, mais cela peut aussi être le cas dans d'autres mosquées, dans d'autres lieux de culte, même si nous savons que la radicalisation s'opère aussi sur internet ou en prison.

Pour conclure, monsieur le député, je veux rappeler que les musulmans de France sont les premières victimes de l'islamisme radical.

M. Claude Goasguen. C'est cela…

M. Manuel Valls, Premier ministre. Un certain nombre d'établissements, de mosquées, sont noyautés ou déstabilisés par des éléments qui cherchent à en prendre le contrôle. S'il n'est pas du ressort de l'État d'organiser la religion, il est de son devoir de veiller à éviter cette déstabilisation et d'agir efficacement, par la voie administrative ou judiciaire, chaque fois que c'est nécessaire.

Oui, notre adversaire, notre ennemi, c'est l'islamisme radical. Il doit savoir que l'État, fort du soutien de la représentation parlementaire, sera intransigeant et déterminé.

En même temps, je veux encore une fois envoyer un message de soutien à nos compatriotes musulmans. L'État se doit d'agir contre l'islamisme radical, mais il a aussi le devoir de protéger nos compatriotes et nos concitoyens musulmans…

M. Yannick Moreau. Il n'y a que des citoyens français !

M. Manuel Valls, Premier ministre. …pour éviter les amalgames qu'on entend de l'autre côté de l'Atlantique, mais aussi dans notre pays. C'est cela, la République ! Je voulais le dire, en ce jour d'anniversaire de la loi de 1905. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen, du groupe écologiste, du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste, et sur plusieurs bancs du groupe de l'Union des démocrates et indépendants.)