14ème législature

Question N° 353
de M. Alain Tourret (Radical, républicain, démocrate et progressiste - Calvados )
Question au gouvernement
Ministère interrogé > Relations avec le Parlement
Ministère attributaire > Relations avec le Parlement

Rubrique > État

Tête d'analyse > Président de la République

Analyse > inviolabilité. perspectives.

Question publiée au JO le : 29/11/2012
Réponse publiée au JO le : 29/11/2012 page : 5885

Texte de la question

Texte de la réponse

RÉFORME DU STATUT DU CHEF DE L'ÉTAT

M. le président. La parole est à M. Alain Tourret, pour le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.
M. Alain Tourret. Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, à la demande de M. le président de la République, M. Lionel Jospin, ancien Premier ministre, vient de déposer son rapport intitulé " Pour un renouveau démocratique ". Le chapitre 2 de ce rapport vise à mettre fin à l'inviolabilité du Président de la République au motif que la loi doit être la même pour tous, en application de l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, et ce pour les actes qui n'ont pas été accomplis en sa qualité de chef de l'État. Il serait certes prévu des protections relevant de la compétence du tribunal de grande instance de Paris, et un filtre, de même que serait prévue une instruction préparatoire dans le cadre d'une collégialité renforcée. Mais, monsieur le Premier ministre, la remise en cause de l'article 67 de notre Constitution m'apparaît gravissime. J'observe, dans un premier temps, que l'argument sur l'absence d'effectivité de la répression pendant la durée d'un ou deux mandats, c'est-à-dire cinq ou dix ans, tombe de lui-même puisque le président Chirac a été renvoyé devant un tribunal répressif, puis condamné, et que le président Sarkozy vient de répondre devant un juge d'instruction. J'observe également qu'une ancienne responsable de premier plan du Parti socialiste vient, de manière incompréhensible, d'être mise en examen pour homicide involontaire dans une affaire concernant des milliers de victimes. À supposer qu'elle eût été élue Président de la République, elle aurait donc eu à répondre, semaine après semaine, aux questions d'un juge d'instruction, magistrat, par définition indépendant, pouvant, pour les seuls besoins de son instruction, bloquer le fonctionnement de la République.
Aussi, monsieur le Premier ministre, sur ce sujet d'importance capitale, avez-vous l'intention de saisir le Parlement d'une réforme de l'article 67 de la Constitution visant à permettre la mise en cause du Président de la République pendant son mandat ? Il serait, à mon avis, seulement acceptable de prévoir des poursuites pour des faits contraires à l'honneur, selon la distinction retenue par les lois d'amnistie. (Applaudissements sur les bancs du groupe RRDP et sur de nombreux bancs du groupe UMP.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé des relations avec le Parlement.
M. Alain Vidalies, ministre délégué chargé des relations avec le Parlement. Monsieur le député Alain Touret, le candidat François Hollande a pris un engagement, n° 47, pour parvenir à une réforme du statut pénal du Président de la République. Lors de sa conférence de presse du 12 novembre dernier, le Président de la République a rappelé son souhait de mettre fin à l'immunité du chef de l'État tant en matière pénale que civile ; vous l'avez rappelé. La commission présidée par Lionel Jospin a également fait un certain nombre de propositions qui ne sont, pour l'instant, que des préconisations, et qui portent notamment sur la nécessité d'affirmer le caractère politique de la procédure de destitution du Président de la République envisagée par la réforme constitutionnelle de 2008. C'est probablement l'une des discussions juridiques les plus importantes, même si vous ne l'avez pas abordée dans votre question.
En matière civile, aucune action en justice ne peut être conduite contre le chef de l'État, en tant que justiciable privé, pour les litiges familiaux ou prud'homaux, par exemple, alors qu'il peut, lui-même, agir en justice. Ce point avait déjà fait l'objet de nombreuses critiques, car il se heurte au principe d'égalité des armes entre les personnes dans les litiges privés.
Sur le plan pénal, et vous avez parfaitement posé la question, nous souhaitons parvenir à une situation qui conciliera deux principes : celui de l'égalité des citoyens devant la loi et celui du délai raisonnable pour parvenir à des procédures de jugement.
Ces principes démocratiques doivent, de plus, se concilier avec la nécessité, parfaitement admise par tous, de maintenir à la présidence de la République son autorité et un certain nombre de protections. Il existe des préconisations dans le rapport. C'est naturellement l'Assemblée nationale qui en sera saisie. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur plusieurs bancs du groupe RRDP.)