maintien
Question de :
M. Bernard Debré
Paris (4e circonscription) - Les Républicains
Question posée en séance, et publiée le 27 janvier 2016
TROUBLES À L'ORDRE PUBLIC
M. le président. La parole est à M. Bernard Debré, pour le groupe Les Républicains.
M. Bernard Debré. Monsieur le Premier ministre, dans quel pays vivons-nous ? (Exclamations sur quelques bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.)
M. Jean Glavany. En France !
M. Bernard Debré. Dans quel pays des centaines de chauffeurs de taxi peuvent-ils entraver la circulation de la capitale, des grandes villes et des aéroports ? Dans quel pays ce même groupe peut-il, sous le nez des passants, des caméras et des forces de l'ordre, envahir le périphérique, y brûler des pneus et jeter des projectiles sur les CRS ?
Ce matin, les habitants du quartier de la porte Maillot et tous les Français ont assisté, médusés, à des scènes d'émeutes urbaines en plein cœur de Paris, en plein état d'urgence ! Les CRS et les pompiers sont intervenus au milieu de la circulation, au péril de leur sécurité. Je tiens à saluer leur courage et leur professionnalisme.
Mais ce n'est pas la première fois, sous votre responsabilité, que les forces de l'ordre sont dépassées et malmenées.
M. Jean-Paul Bacquet. Oh !
M. Bernard Debré. Depuis 2012, les scènes de guérilla urbaine se sont multipliées : au Trocadéro, à Sivens, avec un mort,…
M. Pascal Popelin. C'était brillant, en 2005 !
M. Bernard Debré. …à Nantes, à la porte Maillot – déjà le 25 juin –, sur l'autoroute A1, à Moirans, et encore ce samedi à Calais. Pourquoi n'avez-vous pas anticipé ces débordements, qui étaient annoncés ? Quel maillon a failli dans la chaîne de commandement ? Quelle est la responsabilité du préfet de police ? Quelle est la responsabilité du ministre de l'intérieur ?
Dans six mois, la France va accueillir l'Euro 2016. Vous rendez-vous compte de l'image délétère que donnent de notre pays ces débordements non maîtrisés ?
Monsieur le Premier ministre, des sanctions sévères doivent être prises contre les auteurs de ces actes. Paris doit retrouver la sérénité. Nous sommes en état d'urgence – vous avez même dit que vous souhaitiez le prolonger. Mais comment justifier…
M. le président. Merci, monsieur le député.
La parole est à M. le ministre de l'intérieur.
M. Bernard Cazeneuve, ministre de l'intérieur. Monsieur le député, je veux à mon tour vous poser une question, qui sera une manière de répondre à votre propre interrogation.
Plusieurs députés du groupe Les Républicains. Répondez à la question !
M. le président. S'il vous plaît, mes chers collègues !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. En 2005, il y a eu trois semaines d'émeutes urbaines en France et trois semaines d'un état d'urgence qui était dicté non par le terrorisme, mais par votre incapacité à maintenir l'ordre, après un mot malheureux du ministre de l'intérieur de l'époque. Étions-nous dans un pays capable de faire régner l'État de droit ? Je vous pose la question. (Protestations sur les bancs du groupe Les Républicains. – Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.)
M. Christian Jacob. Vous êtes incompétent !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. Vous êtes singulièrement oublieux de ces moments, vous qui donnez des leçons alors que pendant cinq ans, vous avez mis à mal les forces de l'ordre en supprimant 13 000 emplois, en diminuant leurs crédits de 17 % (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen), et que vous avez réservé le même sort à la magistrature, à ceux qui sont là pour faire respecter le droit. (Protestations sur les bancs du groupe Les Républicains.) Alors, quand on a de tels diplômes, on se dispense de donner des leçons d'État de droit et de sécurité ! (Mêmes mouvements.)
M. Serge Grouard. On a quand même le droit de parler !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. Maintenant, laissez-moi vous répondre sur le fond. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe Les Républicains.)
M. le président. Mes chers collègues, écoutez la réponse !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. Monsieur le député, l'état d'urgence n'est pas l'interdiction de manifester en tout point du territoire national, sinon ce serait un état arbitraire qui remettrait en cause les libertés publiques.
M. Philippe Cochet. Comme à Calais !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. Une interdiction de la manifestation de ce matin aurait été annulée par le juge administratif, ce qui aurait affaibli l'État de droit, et c'est parce que nous n'avons pas voulu l'affaiblir que nous n'avons pas pris les décisions hasardeuses que vous avez prises vous-mêmes. (Protestations sur les bancs du groupe Les Républicains.)
M. Christian Jacob. Tu parles !
M. Claude Goasguen. C'est honteux !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. Que ce soit à Moirans, à Roye ou à Ajaccio, partout des interpellations ont eu lieu. Partout le droit passera, parce que l'État de droit, ce n'est pas l'état d'agitation ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.)
Auteur : M. Bernard Debré
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Ordre public
Ministère interrogé : Intérieur
Ministère répondant : Intérieur
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 27 janvier 2016