Question au Gouvernement n° 3694 :
droit du travail

14e Législature

Question de : Mme Eva Sas
Essonne (7e circonscription) - Écologiste

Question posée en séance, et publiée le 9 mars 2016


PROJET DE LOI TRAVAIL

M. le président. La parole est à Mme Eva Sas, pour le groupe écologiste.

Mme Eva Sas. Je souhaite également, au nom du groupe écologiste, rendre hommage à notre collègue Sophie Dessus, dont le caractère positif et constructif manquera à cette assemblée.

Madame la ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, vous proposez une réforme du code du travail plus que controversée. Et vous nous dites que ce projet est mal compris par les Français, et par les jeunes en particulier.

Mais nous ne croyons pas que les Français aient mal compris cette réforme. Au contraire, ils ont très bien compris que vous souhaitiez ouvrir la possibilité d'allonger le temps de travail sans augmentation de salaire. Ils ont très bien compris que vous souhaitiez faciliter les licenciements à moindre coût, en plafonnant les indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. Ils ont très bien compris qu'en faisant primer la négociation d'entreprise sur le droit du travail, vous organisiez la concurrence entre les salariés et la course au moins-disant social.

En 2012, le Président souhaitait « réenchanter le rêve français », ce rêve « qui fait que chaque génération a la perspective de vivre mieux que la précédente ». Pour notre part, nous n'avons pas renoncé à cet objectif et nous voulons une réforme du droit du travail du XXIème siècle.

Une réforme pour la protection sociale des salariés précarisés : les autoentrepreneurs, les stagiaires et les vrais-faux salariés de l'économie collaborative.

Une réforme qui renforce la présence des salariés dans les conseils d'administration, pour une gestion partagée de l'entreprise.

Une réforme qui mette en place une politique constante pour la transition écologique. Car nous le savons, ce sont l'isolation des logements, les énergies renouvelables, les transports collectifs, l'agriculture biologique qui feront l'économie et les emplois de demain.

Madame la ministre, nous serons demain aux côtés de tous ces citoyens, jeunes, salariés ou demandeurs d'emploi, qui réclament le retrait de votre réforme.

Alors, ma question est claire : comment allez-vous répondre à l'appel des Français et de la jeunesse en particulier, qui veulent de l'emploi et non de la précarité généralisée ? (Applaudissements sur les bancs du groupe écologiste.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.

Mme Myriam El Khomri, ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social. Madame la députée, la réforme que je défends, qui n'est aujourd'hui qu'un avant-projet de loi examiné en Conseil d’État, suscite des débats. Il y a une part de questionnement tout à fait sincère qui s'exprime dans le débat public et je suis heureuse que tous les Français s'emparent de ce débat sur le droit du travail. (Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.)

M. Jean-François Lamour. Je ne suis pas sûr que ça s'appelle le bonheur !

Mme Myriam El Khomri, ministre. Il me semble en effet essentiel que nous avancions. Si le Premier ministre et moi-même, avec le ministre de l'économie, avons décidé de prendre quinze jours supplémentaires pour continuer la concertation avec l'ensemble des partenaires sociaux, c'est parce que nous pensons, nous, que le dialogue social est essentiel à notre pays et que nous ne sommes pas là pour le contourner.

Il y a des inquiétudes qui s'expriment dans la jeunesse, mais je voudrais vous dire que – même si le chômage des jeunes a diminué en 2015, ce qui nous réjouit –, l'objectif de cette réforme n'est pas de précariser la jeunesse, mais d'encourager l'embauche des jeunes, en contrat à durée indéterminée notamment.

Parce qu'il faut aussi regarder la France telle qu'elle est aujourd'hui : nous avons un taux de chômage de plus de 10 %. C'était le même il y a 20 ans.

Nous avons non pas une flexibilité, mais une hyper-flexibilité dans notre monde du travail. Et qui en sont les victimes ? Ce sont les femmes, les personnes les moins qualifiées et les jeunes.

Cette loi n'est pas là pour favoriser la précarité de la jeunesse ; elle est là pour répondre à cette hyper-fragmentation du marché du travail, au contournement du droit du travail au moyen des travailleurs détachés ou des indépendants. Voilà pourquoi elle est là !

Il y a des améliorations à apporter, nous l'avons dit : c'est pourquoi nous prenons quinze jours avec les partenaires sociaux.

Quant aux stages, c'est votre assemblée qui a voté en 2014, sous ce gouvernement, une limitation du nombre de stagiaires à 15 % des effectifs de l'entreprise. C'est vous et c'est ce gouvernement.

M. Laurent Furst. Il ne faut pas parler à la gauche, mais à la France !

Mme Myriam El Khomri, ministre. La garantie jeune, la prime de précarité, c'est nous aussi qui les avons mises en place : vous le voyez, la jeunesse reste notre priorité. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.)

Données clés

Auteur : Mme Eva Sas

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Travail

Ministère interrogé : Travail, emploi, formation professionnelle et dialogue social

Ministère répondant : Travail, emploi, formation professionnelle et dialogue social

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 9 mars 2016

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