commerce extracommunautaire
Question de :
Mme Marietta Karamanli
Sarthe (2e circonscription) - Socialiste, écologiste et républicain
Question posée en séance, et publiée le 17 mars 2016
NÉGOCIATIONS COMMERCIALES INTERNATIONALES
M. le président. La parole est à Mme Marietta Karamanli, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
Mme Marietta Karamanli. Ma question s'adresse à M. le secrétaire d'État chargé du commerce extérieur et porte sur l'état des négociations commerciales internationales, notamment de l'accord entre l'Union européenne et le Canada, dit accord CETA.
Ce type d'accord suscite quelquefois des craintes dans la mesure où il prévoit la possibilité d'instituer un système de règlement des différends par des arbitres privés, en lieu et place des juges publics. La crainte est que ces juges privés soient enclins, par intérêt ou conformisme, à faire prévaloir les intérêts des grandes et très grandes entreprises plutôt que la protection des citoyens et des consommateurs dans des domaines comme l'alimentation, la protection de l'environnement ou les droits sociaux.
La France et son gouvernement ne sont pas restés inactifs et ont proposé une alternative conforme à une véritable justice publique impartiale.
Dans cet accord, il a été obtenu que les différends entre investisseurs et États soient réglés par une cour permanente de règlement des différends. La position de la France, que partagent également d'autres États, a donc été entendue. Monsieur le secrétaire d'État, pouvez-vous nous confirmer cette évolution majeure ? Considérez-vous que cette avancée constitue un précédent majeur ?
Par ailleurs, il y a quelques semaines, le Gouvernement français a réaffirmé sa volonté que les négociations commerciales internationales avancent en ce sens. Pouvez-vous également nous confirmer la volonté du Gouvernement de mobiliser les autres États partenaires dans des accords commerciaux internationaux afin de faire prévaloir une solution de justice publique ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l'étranger.
M. Matthias Fekl, secrétaire d'État chargé du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l'étranger. Madame la députée, vous m'interrogez sur un point très précis des relations commerciales internationales, à savoir le fameux ISDS – investor-state dispute settlement – qui permet à des tribunaux privés d'attaquer des choix de politique publique. Ce dossier a fait couler beaucoup d'encre et suscite beaucoup d'inquiétudes, en France et au-delà…
M. Jean-Luc Laurent. À juste titre !
M. Matthias Fekl, secrétaire d'État. …notamment à l'occasion des négociations avec les États-Unis.
Les différentes dérives qui ont été constatées et qui ont conduit à ce que, progressivement, des firmes multinationales s'attaquent frontalement à des choix démocratiques, des choix de politique alimentaire, de politique de santé, de politique énergétique, m'ont amené, le premier, à proposer une réforme fondamentale du système, avec de nouvelles modalités.
Une cour publique de justice commerciale internationale remplacera les tribunaux privés et des juges publics, nommés et rémunérés par les États, remplaceront les arbitres nommés et rémunérés par les parties, et ce afin d'éviter les conflits d'intérêts. Il convient de préserver la possibilité d'attaquer les abus, les expropriations, et d'interdire les attaques contre des choix de politique publique et des choix démocratiques auxquelles se livrent certaines entreprises.
Cette proposition, que j'ai formulée au nom de la France et que j'ai soutenue avec l'Allemagne et d'autres États européens, fait consensus au niveau européen et le Canada est le premier pays qui a accepté de la reprendre. Ce n'est pas un hasard si c'est avec le gouvernement progressiste de M. Trudeau que ces évolutions ont été possibles.
Il s'agit pour nous d'un précédent fondamental. La France considère désormais que cette cour publique de justice commerciale internationale devra intervenir dans tous les accords commerciaux à venir. C'est pour nous une condition de l'acceptabilité de ces accords. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.)
Auteur : Mme Marietta Karamanli
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Politiques communautaires
Ministère interrogé : Commerce extérieur, tourisme et Français de l'étranger
Ministère répondant : Commerce extérieur, tourisme et Français de l'étranger
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 17 mars 2016