14ème législature

Question N° 3819
de M. Marc Le Fur (Les Républicains - Côtes-d'Armor )
Question au gouvernement
Ministère interrogé > Budget
Ministère attributaire > Budget

Rubrique > impôt sur le revenu

Tête d'analyse > paiement

Analyse > prélèvement à la source. perspectives.

Question publiée au JO le : 06/04/2016
Réponse publiée au JO le : 06/04/2016 page : 2668

Texte de la question

Texte de la réponse

PRÉLÈVEMENT À LA SOURCE DE L'IMPÔT SUR LE REVENU


M. le président. La parole est à M. Marc Le Fur, pour le groupe Les Républicains.

M. Marc Le Fur. Ma question s'adresse au ministre des finances et des comptes publics ; elle porte sur le prélèvement à la source.

Monsieur le ministre, vous nous présentez cette réforme comme une réforme technique, dont l'objectif serait la simplification. Pas du tout ! Vous allez compliquer la vie de nos entreprises, en particulier celle de nos petites entreprises, dont M. Tourret vient de parler très justement, et que vous allez transformer en collecteur d'impôt, puisqu'elles devront demain verser au fisc l'impôt dû par leurs propres salariés.

Mettez-vous à la place d'un boulanger ou d'un artisan. Pour lui, cela représentera une charge de travail disproportionnée, qui risque de le dissuader encore un peu plus d'embaucher.

Par ailleurs, les salariés seront victimes de cette réforme. Ils perdront une chose à laquelle ils tiennent : la confidentialité de l'impôt. Deux salariés qui gagnent la même chose n'auront pas le même prélèvement à la source en raison des revenus de leur famille : ce seront autant d'informations dont disposeront les chefs d'entreprise.

M. Pascal Terrasse. Et en Allemagne, comment ça se passe ?

M. Marc Le Fur. Je croise des salariés qui me disent : « Moi, j'aime bien mon patron, mais je n'ai pas envie qu'il sache ce que gagne mon conjoint, si je bénéficie d'une pension alimentaire ou si j'en verse une ! » – autant de choses qui relèvent du cercle familial. Or l'entreprise aura demain connaissance, ne serait-ce que par le taux de l'impôt, de l'existence d'autres revenus.

Ce genre d'informations, dont disposerait demain une direction du personnel, risque en outre de polluer considérablement les négociations salariales. (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe Les Républicains.) Un salarié méritant pourrait se voir refuser une augmentation au motif que ses revenus familiaux sont suffisamment confortables – autant d'éléments dont l'entreprise n'a pas à connaître.

Monsieur le ministre, sur ce sujet, vous avancez masqué. Ce que vous voulez faire à travers cette réforme, c'est revenir à la fusion de la contribution sociale généralisée et de l'impôt sur le revenu, c'est mettre en cause la familialisation de l'impôt. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé du budget.

M. Christian Eckert, secrétaire d'État chargé du budget. Monsieur le député, les principes de la retenue à la source sont très simples.

Premièrement, c'est la Direction générale des finances publiques qui restera le seul interlocuteur du contribuable ; le seul renseignement qui sera transmis à l'employeur, c'est le taux d'imposition. (« Mensonge ! » sur les bancs du groupe Les Républicains.)

Deuxièmement, le taux d'imposition d'un foyer fiscal, dans 90 % des cas, est compris entre 0 et 10 %.

M. Bernard Roman. Eh oui !

M. Christian Eckert, secrétaire d'État. La connaissance d'un taux ne donne aucun renseignement, même à un spécialiste de la fiscalité comme vous, puisqu'un même taux peut correspondre à des situations familiales extrêmement différentes. L'employeur n'aura donc pas connaissance de celles-ci.

M. Bernard Roman. Eh oui !

M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Enfin, quelle est la finalité de cette réforme ? La France pourrait-elle être le dernier pays au monde, ou presque, à ne pas mettre en place la retenue à la source ? (« Et alors ? » sur les bancs du groupe Les Républicains.)

M. Yves Censi et M. Philippe Meunier. Et les 35 heures ?

M. Christian Eckert, secrétaire d'État. La finalité de la réforme est d'adapter le montant de l'impôt payé au moment où le revenu est perçu. (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.) Pour un salarié qui part à la retraite ou qui voit ses revenus diminuer, n'est-il pas logique de voir son impôt s'adapter immédiatement à sa nouvelle situation ? Pour un couple qui change de situation familiale ou qui accueille un enfant, n'est-il pas normal de bénéficier immédiatement d'une demi-part fiscale supplémentaire ?

Vous dites que ce sera une charge considérable pour les employeurs. Monsieur le député, un certain nombre d'organisations passent leur temps à nous reprocher d'être trop lents à faire des réformes ; eh bien, les mêmes nous disent aujourd'hui que cette réforme, qui constituera un progrès pour les couples et pour les familles, est beaucoup trop rapide !

M. Laurent Furst. Ce n'est pas une réforme, ça ; c'est juste pour amuser la galerie !

M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Le travail commencera demain en commission des finances. Le Parlement saura se montrer à la hauteur ! (« Très bien ! » et applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.)