14ème législature

Question N° 3858
de M. Dominique Potier (Socialiste, républicain et citoyen - Meurthe-et-Moselle )
Question au gouvernement
Ministère interrogé > Finances et comptes publics
Ministère attributaire > Finances et comptes publics

Rubrique > droits de l'Homme et libertés publiques

Tête d'analyse > justice

Analyse > lanceur d'alerte. statut. protection.

Question publiée au JO le : 27/04/2016
Réponse publiée au JO le : 27/04/2016 page : 2830

Texte de la question

Texte de la réponse

LANCEURS D'ALERTE


M. le président. La parole est à M. Dominique Potier, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.

M. Dominique Potier. Monsieur le Premier ministre, les accords de Paris seront sans effet si nous ne réussissons pas à vaincre l'injustice de par le monde. Le drame du Rana Plaza, il y a trois ans, et le scandale des « Panama papers » participent de la même logique mortifère. Ils disent l'opacité des chaînes de production dans le monde. La quête de transparence que nous menons tous aujourd'hui, y compris dans les traités internationaux, est une quête de loyauté, ce concept étonnamment moderne. Il existe un besoin d'éthique face à l'ultralibéralisme et à l'individualisme sans limite.

Nous avons besoin de nous affranchir de ce qui s'apparente à un culte du veau d'or : la fascination pour une compétitivité qui fait travailler les enfants et qui vole l'argent public – ce sont 2 000 euros par citoyen européen, dont on prive l'éducation et la santé, et 800 milliards d'euros pour les pays en voie de développement. Nous avons également besoin de nous affranchir des mondanités, avec ces responsables d'une économie qui fabrique, au bout du monde, de la misère et de la barbarie et, au bout de la rue, un nationalisme de faussaires.

Nous avons besoin, dans notre majorité et au-delà, de bâtir un nouvel âge de la mondialisation. Je pense à l'abbé de l'Assemblée constituante, au député Henri Grégoire. Heureusement qu'ils n'ont pas attendu, à l'époque, que les États du sud américains veuillent supprimer l'esclavage pour en proclamer l'abolition dans notre Parlement. J'en appelle à l'esprit des Lumières, parce que ceux qui combattent aujourd'hui pour la transparence sont leurs héritiers.

Je pense à ces syndicalistes, à ces ONG, à ces entreprises responsables et aux lanceurs d'alerte. Je pense à Antoine Deltour, qui est la vigie de la démocratie, la sentinelle d'une économie humaine. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen, du groupe écologiste, du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste et sur plusieurs bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

M. le président. La parole est à M. le ministre des finances et des comptes publics.

M. Michel Sapin, ministre des finances et des comptes publics. Monsieur le député, je vous remercie pour la tonalité de votre question, pour votre fougue et votre volonté de faire partager votre belle passion : qu'il y ait plus de transparence et de justice, aussi bien dans les relations économiques que dans les relations sociales et financières entre les pays de l'ensemble de la planète – car aujourd'hui c'est bien au niveau planétaire qu'il faut penser la question de la transparence.

Vous avez cité Antoine Deltour. Je voudrais à mon tour lui dire toute notre solidarité. J'ai demandé ce matin à l'ambassadeur de France au Luxembourg et au consulat général de bien vouloir le suivre et l'aider, si cela est nécessaire, dans cette période difficile où il défend l'intérêt général mais où il doit répondre devant une juridiction pénale au Luxembourg.

C'est grâce à lui (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen et du groupe écologiste) que nous avons pu mettre fin à l'opacité qui empêchait les pays européens de connaître la situation fiscale exacte de certaines grandes entreprises au Luxembourg.

Au-delà de cela, vous le savez plus que d'autres, monsieur le député, pour travailler dessus : un texte sur la transparence et la lutte contre la corruption est en cours d'examen dans les commissions du Parlement, où sont formulées des propositions pour mieux protéger les lanceurs d'alerte. Vous savez aussi que le Conseil d’État a réfléchi sur ce sujet et qu'il a lui-même fait des suggestions.

Je vous propose, mesdames, messieurs les députés, de travailler ensemble à l'amélioration des premières propositions de ce texte. Il faut un statut qui protège les lanceurs d'alerte. Il faut également créer un processus permettant à ceux-ci, s'ils le souhaitent, de conserver l'anonymat. Nous devons leur apporter l'aide nécessaire dans la lutte pour défendre leurs droits, comme pour faire face aux difficultés financières qu'ils peuvent rencontrer, afin de leur permettre de continuer à jouer ce rôle d'intérêt général auquel nous devons rendre hommage. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.)