Question au Gouvernement n° 3878 :
universités

14e Législature

Question de : M. Luc Chatel
Haute-Marne (1re circonscription) - Les Républicains

Question posée en séance, et publiée le 4 mai 2016


LAÏCITÉ

M. le président. La parole est à M. Luc Chatel, pour le groupe Les Républicains.

M. Luc Chatel. Monsieur le Premier ministre, le 5 avril dernier, dans cet hémicycle, comme nombre de mes collègues, je vous ai applaudi. Je vous ai applaudi, parce qu'en réponse à notre collègue Damien Abad, qui vous interpellait sur la montée du fondamentalisme et sur la question du port du voile sur le sol de la République française, vous avez réaffirmé avec force les valeurs de la République, celles que nous partageons : la liberté d'expression, la liberté de conscience et de culte, mais aussi la laïcité et la stricte égalité des hommes et des femmes sur le sol de la République française. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe Les Républicains.)

Monsieur le Premier ministre, ces principes ne sauraient souffrir d'exception. Pourtant, le 20 avril dernier s'est tenu à Sciences Po un rassemblement qui a considérablement choqué les Français, le hijab day,…

M. Jacques Myard. En français, s'il vous plaît !

M. Luc Chatel. …au cours duquel de jeunes filles voilées ont expliqué leur épanouissement personnel et les ségrégations dont elles seraient victimes sur le sol de la République française. Si vous doutez du caractère prosélyte de ce rassemblement, je vous invite à vous rendre sur le site internet www.worldhijabday.com.

Monsieur le Premier ministre, votre gouvernement n'a pas réagi.

M. Alain Chrétien. C'est scandaleux !

M. Luc Chatel. Votre ministre des droits des femmes, interrogée la semaine dernière, a délibérément évité la réponse. Vous ne pouvez pas rester silencieux. Vous ne pouvez pas, le mardi et le mercredi de chaque semaine, nous rappeler des grands principes républicains auxquels nous adhérons et rester silencieux lorsque la République est testée en permanence sur notre territoire. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.) Monsieur le Premier ministre, réagissez au nom de ces valeurs républicaines. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains et du groupe de l'Union des démocrates et indépendants, ainsi que sur certains bancs du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Manuel Valls, Premier ministre. Monsieur le député, vous avez été ministre de l'éducation nationale ; vous avez donc bien sûr été confronté à ces questions.

Oui, il y a une montée du fondamentalisme, de l'islamisme radical dans nos sociétés, et tout particulièrement dans la société française, qui se manifeste sous différentes formes. La forme la plus extrême, ce sont ces Français ou ces citoyens vivant dans notre pays qui vont combattre en Syrie ou en Irak, notamment pour préparer des attentats, pour tuer des Français, comme cela a été le cas à deux reprises en 2015.

Des milliers de jeunes ou d'individus se sont radicalisés. C'est ce qui mène le Gouvernement à se mobiliser une nouvelle fois, et de nouvelles propositions seront bientôt formulées pour que notre dispositif soit encore plus efficace. C'est tout le Gouvernement qui doit être mobilisé contre cette radicalité, contre ces processus qui sont particulièrement inquiétants et qui touchent…

M. Alain Chrétien. La question !

M. Manuel Valls, Premier ministre. M. Chatel a posé la question avec méthode, permettez-moi de prendre un instant pour lui répondre, messieurs les députés. Ces processus, disais-je, touchent non seulement la société française, mais plus largement le monde entier. Tous les pays y sont confrontés. De l'autre côté du globe, où je me trouvais encore voilà quelques heures, c'est également le cas.

Puis, il y a ces phénomènes de prosélytisme que vous évoquez. Je condamne avec la plus grande fermeté le type d'initiative qui a été prise à Sciences Po. (Applaudissements prolongés sur tous les bancs.)

Mme Claude Greff. Enfin !

M. Manuel Valls, Premier ministre. Plusieurs membres du Gouvernement se sont exprimés.

Cette initiative a d'ailleurs rencontré peu de succès.

M. Charles de La Verpillière. C'est une école publique ! Il faut prendre des sanctions !

M. Manuel Valls, Premier ministre. Nous devons néanmoins être extrêmement attentifs.

Sur ce sujet, ma position est claire, elle m'est personnelle, et je continuerai de l'affirmer, dans le respect, bien sûr, de toutes les croyances : je fais la part entre ce qui relève de la liberté religieuse et ce qui à mes yeux est un signe d'asservissement de la femme. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen et sur les bancs du groupe Les Républicains.)

Mme Claude Greff. Nous sommes d'accord !

M. Manuel Valls, Premier ministre. Et puisque vous avez parlé d'égalité entre les femmes et les hommes, je veux une nouvelle fois soutenir la ministre des droits des femmes, car elle a été mise en cause alors qu'elle avait précisément mis le doigt là où ça fait mal, c'est-à-dire fait face à des groupes, à des réseaux sur internet qui mettent en cause la liberté même, cette liberté fondamentale, cette égalité entre les femmes et les hommes.

Mme Claude Greff. Elle n'a pas dû parler bien fort !

M. Manuel Valls, Premier ministre. Et parce que je combats tous les fondamentalismes,…

M. Daniel Fasquelle. Par quels moyens ?

M. Charles de La Verpillière. Quelles seront les sanctions ?

M. Manuel Valls, Premier ministre. …parce que je combats toutes les identités qui nous amènent précisément à la fracture de nos sociétés, parce que je pense que la cohésion sociale et républicaine est plus que jamais nécessaire, parce que l'école doit jouer un rôle fondamental et parce que l'université, monsieur le ministre, doit en effet aussi protéger de ce fondamentalisme, je continuerai ce combat.

M. Yves Censi. Et la ministre de l'enseignement supérieur, qu'en dit-elle ?

M. Manuel Valls, Premier ministre. Il y a la loi, et nous savons ce qu'elle permet et ce qu'elle interdit, mais il y a aussi le combat politique et citoyen,…

M. Alain Chrétien et M. Charles de La Verpillière. Nous voulons du concret !

M. Manuel Valls, Premier ministre. …combat que je mènerai, parce que je suis convaincu que nous partageons ces valeurs sur tous les bancs. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen et sur plusieurs bancs du groupe écologiste.)

Données clés

Auteur : M. Luc Chatel

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Enseignement supérieur

Ministère interrogé : Premier ministre

Ministère répondant : Premier ministre

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 4 mai 2016

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