Question au Gouvernement n° 3897 :
commerce extracommunautaire

14e Législature

Question de : M. François de Rugy
Loire-Atlantique (1re circonscription) - Socialiste, écologiste et républicain

Question posée en séance, et publiée le 5 mai 2016


TRAITÉ TRANSATLANTIQUE

M. le président. La parole est à M. François de Rugy, pour le groupe écologiste.

M. François de Rugy. J'aurais pu également répondre à M. de Ganay qu'il n'a manifestement pas entendu parler de la faillite d'Areva et du fiasco de l'EPR… (Applaudissements sur les bancs du groupe écologiste et sur quelques bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen. - Protestations sur les bancs du groupe Les Républicains.)

Mais ma question porte sur la négociation du traité de libre-échange entre l'Europe et les États-Unis.

Évidemment, d'un point de vue économique, on ne peut qu'être favorable au développement des échanges commerciaux. Celui-ci doit toutefois se faire dans le cadre d'une démarche progressive, équilibrée et réciproque, sans quoi des pans entiers de notre économie seraient affaiblis. On pense évidemment, s'agissant des États-Unis, à l'agriculture et à l'agroalimentaire, en particulier.

Rappelons d'abord que, contrairement à une idée reçue, les Américains sont très protectionnistes dans un certain nombre de secteurs, comme les télécommunications, la construction automobile et, c'est moins connu, la construction navale : ils y dressent beaucoup de barrières.

Les divergences entre les conceptions américaines et européennes sont très importantes. Les normes sont généralement très différentes, voire inconciliables. Les conceptions des arbitrages en cas de conflit entre les entreprises et les États, précisément à propos de ces normes, s'opposent. Des divergences sérieuses portent également sur le principe de précaution : aux États-Unis d'Amérique, on considère qu'on peut mettre un produit sur le marché sans en avoir préalablement évalué les risques, quitte à arrêter sa commercialisation s'ils sont démontrés par la suite ; nous autres Européens défendons la logique inverse, qui consiste à mesurer les risques avant la mise sur le marché d'un produit.

Monsieur le secrétaire d'État chargé du commerce extérieur, tout en saluant la position de la France, exprimée très clairement hier par le Président de la République, je souhaite vous interroger sur les étapes suivantes. Quels sont les alliés de la France dans l'Union européenne ? Celle-ci suspendra-t-elle les négociations avec les États-Unis ? (Applaudissements sur les bancs du groupe écologiste et sur quelques bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l'étranger.

M. Matthias Fekl, secrétaire d'État chargé du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l'étranger. Monsieur le député, je vous remercie pour votre question et salue l'implication de nombreux parlementaires sur ce sujet, à propos duquel j'ai eu l'occasion, à de nombreuses reprises, de m'exprimer dans cet hémicycle.

Vous l'avez rappelé à juste titre, ces négociations soulèvent de nombreux principes et posent de nombreux problèmes de fond.

Du point de vue de la transparence, d'abord, il est proprement scandaleux que les citoyens doivent attendre des fuites pour savoir ce qui se passe. La France, depuis le début, n'a eu de cesse de réclamer la transparence. Nous avons obtenu des progrès avec le contrôle parlementaire sur les documents.

M. Philippe Cochet. Quelle autorité !

M. Matthias Fekl, secrétaire d'État. Il faut aller beaucoup plus loin en la matière, y compris en recourant à l'open data et en rendant accessibles aux citoyens les négociations qui les concernent et qu'ils ont le droit de connaître.

Un député du groupe socialiste, républicain et citoyen. Chiche !

M. Matthias Fekl, secrétaire d'État. Vous avez évoqué la problématique des tribunaux d'arbitrage : j'ai porté, au nom de la France, la proposition d'une cour de justice commerciale internationale, afin de remplacer les tribunaux privés par une juridiction publique et les arbitres privés rémunérés par les parties par des juges publics rémunérés par les États. L'objectif en jeu, après trente années de dérégulation, c'est de remettre des règles dans la mondialisation et de faire correspondre à une économie mondialisée des règles adaptées à cette réalité. C'est le retour de la puissance publique – une puissance publique moderne – dans les négociations commerciales internationales.

Le Président de la République a indiqué avec beaucoup de force que la France envisageait l'arrêt des négociations et que pour nous, en l'état, c'était non. J'ai été le premier membre d'un gouvernement à l'indiquer, dès 2015, en élaborant cette stratégie, en lien permanent avec le Président de la République et le Premier ministre, sous leur autorité. Nous avons travaillé avec l'Allemagne sur ce sujet et nous tenons bon ; une déclaration commune franco-allemande a encore été publiée ces derniers jours.

La France, dût-elle finalement être seule, tiendra bon. C'est l'honneur de notre diplomatie de défendre des intérêts, des principes et des valeurs. Comptez sur nous pour le faire ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen et du groupe écologiste.)

Données clés

Auteur : M. François de Rugy

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Politiques communautaires

Ministère interrogé : Commerce extérieur, tourisme et Français de l'étranger

Ministère répondant : Commerce extérieur, tourisme et Français de l'étranger

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 5 mai 2016

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