14ème législature

Question N° 3917
de M. Nicolas Dhuicq (Les Républicains - Aube )
Question au gouvernement
Ministère interrogé > Justice
Ministère attributaire > Justice

Rubrique > système pénitentiaire

Tête d'analyse > établissements

Analyse > perspectives.

Question publiée au JO le : 11/05/2016
Réponse publiée au JO le : 11/05/2016 page : 3247

Texte de la question

Texte de la réponse

FERMETURE DE LA CENTRALE DE CLAIRVAUX


M. le président. La parole est à M. Nicolas Dhuicq, pour le groupe Les Républicains.

M. Nicolas Dhuicq. Monsieur le garde des sceaux, devant des élèves de l'École nationale d'administration pénitentiaire, sans prévenir la préfète du département, sans prévenir le président du conseil départemental, également sénateur, sans prévenir le député de la circonscription, sans prévenir le président de la communauté de communes, sans prévenir les maires, vous avez annoncé la fermeture brutale de la centrale de Clairvaux.

Monsieur le ministre, Clairvaux, c'est plus qu'une centrale : c'est tout un symbole, c'est toute l'histoire de l'administration pénitentiaire. Monsieur le ministre, à Clairvaux, depuis des générations, ce sont les surveillants de l'administration pénitentiaire, de grands professionnels, qui travaillent et qui appliquent, comme ne le font pas d'autres centrales, tout le règlement de l'administration pénitentiaire, et rien que le règlement de l'administration pénitentiaire.

Monsieur le ministre, au moment où tout le monde parle du terrorisme et de l'islamisme radical en prison, financé par les pétrodollars présents dans cette enceinte (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen), en ce moment même, à Clairvaux, un imam, un rabbin et un curé travaillent ensemble pour donner une image ouverte de la religion.

Monsieur le ministre, Clairvaux, c'est un bassin d'emploi qui concerne tout le département de l'Aube et tout le département de la Haute-Marne, un bassin d'emploi rural. Monsieur le ministre, avez-vous tant de mépris pour la ruralité, avez-vous tant de mépris pour des gens qui travaillent, avez-vous tant de mépris pour les membres de l'administration pénitentiaire, pour ces fonctionnaires qui travaillent chaque jour pour la sécurité du pays ?

M. Jean Glavany. Donnez-lui son Prozac !

M. Nicolas Dhuicq. Monsieur le ministre, la fermeture de Clairvaux, c'est un crime devant la nation, c'est une atteinte à la sécurité de la nation. Tous les prisonniers les plus dangereux sont passés à Clairvaux. Tous les prisonniers les plus difficiles à gérer sont passés à Clairvaux. Pourquoi voulez-vous fermer une centrale qui n'est pas vétuste, contrairement aux allégations que vous faites ?

M. Jean-Claude Perez. Bâillonnez-le !

M. Nicolas Dhuicq. Oui, il y a nécessité de reconstruire une prison à Lavau, une maison d'arrêt. Mais, de grâce, ne fermez pas la seule centrale de France qui fonctionne, car vous aurez devant vous tous les surveillants de l'administration pénitentiaire, qui ont déjà suffisamment souffert. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Les Républicains – Protestations sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.)

M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux, ministre de la justice.

M. Jean-Jacques Urvoas, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur le député, la dureté de votre question veut sans doute traduire les inquiétudes des personnels de cet établissement. C'est donc à ces interrogations que je vais répondre. La décision de fermer cet établissement n'est ni une foucade ni un acte irréfléchi. Cela procède d'un travail qui a été conduit depuis plus de dix ans par l'administration pénitentiaire, au regard des difficultés que cumule cet établissement – car tel est bien le problème particulier de Clairvaux.

Je ne conteste pas la place particulière qu'occupe cet établissement dans la mémoire pénitentiaire, et que chacun connaît, ni la qualité des personnels qui y servent ; je constate simplement qu'à Clairvaux, nous accumulons les difficultés.

M. Nicolas Dhuicq. Non !

M. Jean-Jacques Urvoas, garde des sceaux. C'est cela, le cœur du problème. Je comprends, monsieur le député, l'émotion des personnels. J'entends les alertes des élus. Et je veux dire à ceux qui s'inquiètent aujourd'hui que je ne prends pas cette situation à la légère.

Vous étiez hier à Clairvaux. Vous y avez rencontré mes plus proches collaborateurs, qui y ont passé la journée. Le directeur-adjoint de l'administration pénitentiaire était là, lui aussi. Au regard des éléments dont mes collaborateurs ont pris connaissance, j'ai demandé un supplément d'information.

M. Guy Geoffroy. Ah !

M. Jean-Jacques Urvoas, garde des sceaux. Évidemment, je suis tout prêt à dialoguer, et je recevrai les organisations syndicales qui pourraient le demander. Mais permettez-moi simplement de vous poser une question : pourquoi en sommes-nous arrivés là ? Parce que ce bâtiment, dont vous connaissez l'histoire, n'a pas été entretenu pendant des décennies,…

M. Nicolas Dhuicq. C'est faux !

M. Jean-Jacques Urvoas, garde des sceaux. …parce que l'on n'a pas investi, parce que les conditions de travail des personnels se sont dégradées…

M. Nicolas Dhuicq. C'est faux !

M. Jean-Jacques Urvoas, garde des sceaux. …parce que les conditions de détention ne sont pas acceptables. C'est cette incurie qui me conduit aujourd'hui à agir. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen et sur quelques bancs du groupe écologiste.)