réforme
Question de :
M. Michel Issindou
Isère (2e circonscription) - Socialiste, écologiste et républicain
Question posée en séance, et publiée le 19 mai 2016
PROJET DE LOI TRAVAIL
M. le président. La parole est à M. Michel Issindou, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
M. Michel Issindou. Madame la ministre du travail, au travers des médias, au fil des manifestations, nous entendons des critiques sur le projet de loi Travail. (« Ah bon ? » sur les bancs du groupe Les Républicains) Si toute contestation est légitime dans notre démocratie, il est tout aussi légitime pour les parlementaires que nous sommes de rétablir la vérité lorsqu'à longueur de journée nous entendons des contrevérités.
M. Sylvain Berrios. C'est la société qui parle !
M. Dominique Le Mèner. 49-3 !
M. Michel Issindou. Je prendrai deux exemples fréquemment entendus ces derniers jours. Il est mensonger de dire que les salariés vont travailler jusqu'à 60 heures par semaine. C'est faux : la règle restera une durée de travail maximale de 48 heures par accord collectif et ce n'est qu'avec l'accord de l'inspecteur du travail qu'elle pourra atteindre 60 heures. Ce n'est rien d'autre que la règle actuelle.
Une autre contrevérité doit être dénoncée : celle selon laquelle les heures supplémentaires ne seraient plus majorées que de 10 %. Là encore, ce ne sera possible que s'il y a un accord majoritaire dans l'entreprise, et l'on peut faire confiance aux organisations syndicales – y compris, d'ailleurs, celles qui manifestent aujourd'hui – pour apprécier la nécessité ou non d'un tel accord.
M. Sylvain Berrios. Y a-t-il un accord majoritaire au PS ?
M. Michel Issindou. À défaut, le taux de 25 % restera bien sûr applicable. La philosophie du projet de loi Travail est là : elle consiste à faire confiance au dialogue social, au plus près du terrain, en conservant le garde-fou de la loi pour ces fondamentaux que sont les 35 heures, le SMIC et le contrat à durée indéterminée. Notre majorité recherche depuis longtemps une organisation du marché du travail à la fois plus souple pour les entreprises et plus sécurisante pour les salariés. C'est possible, ce projet de loi le démontre. Et si ce texte n'a pas vocation à être la panacée pour lutter contre le chômage, il est sûrement un moyen puissant, parmi d'autres – je pense à la formation accélérée de 500 000 demandeurs d'emploi – de faire entrer sur le marché du travail ceux qui en sont exclus car là est le véritable drame.
Pouvez-vous, madame la ministre, nous confirmer le contenu du projet de loi sur les deux thèmes que je viens d'évoquer ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.
Mme Myriam El Khomri, ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social. Vous avez raison, monsieur le député : beaucoup de contrevérités ont été énoncées sur ce projet de loi. Vous avez évoqué le cas des transporteurs routiers, dont une partie des syndicats – je dis bien une partie car ce n'est pas le cas de tous – sont actuellement mobilisés. Il existe en effet une spécificité importante dans ce secteur : la pratique des heures supplémentaires y est généralisée tant elles sont nombreuses. J'entends donc les inquiétudes qui s'expriment, car derrière celle des heures supplémentaires, c'est la question du pouvoir d'achat des salariés qui est posée. Nous y sommes bien sûr, avec Alain Vidalies, particulièrement attentifs, comme d'ailleurs pour l'ensemble des salariés.
Ces inquiétudes ne sont cependant pas fondées. D'abord le projet de loi Travail ne modifie en rien le régime des heures d'équivalence pour les routiers. Ensuite il ne modifie pas les taux de majoration des heures supplémentaires : il est faux de dire que le projet de loi entraîne une baisse mécanique de ces taux. L'accord de branche des transports n'est pas modifié par le projet de loi : les taux de majoration resteront de 25 et 50 %. Vous l'avez dit, la loi permettra, comme partout ailleurs, qu'un accord d'entreprise majoritaire, c'est-à-dire signé par des syndicats ayant recueilli 50 % des suffrages, fixe un taux différent.
M. Marc Dolez. C'est bien là le problème !
Mme Myriam El Khomri, ministre. J'insiste sur cette règle de l'accord majoritaire car elle sera une garantie extrêmement importante pour les salariés. Ce sont les représentants syndicaux pour lesquels ils auront majoritairement voté dans l'entreprise qui devront signer ces accords. En l'absence d'accord, c'est l'accord de branche qui s'appliquera.
Comment imaginer que les syndicats aujourd'hui mobilisés se précipiteront demain pour conclure des accords majoritaires réduisant le taux de majoration des heures supplémentaires ? Contrairement à ce qui a été dit, mon projet de loi n'affaiblit absolument rien sur ce point, et cette analyse est d'ailleurs partagée par la première organisation syndicale de ce secteur, à savoir la CFDT. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen.)
Auteur : M. Michel Issindou
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Travail
Ministère interrogé : Travail, emploi, formation professionnelle et dialogue social
Ministère répondant : Travail, emploi, formation professionnelle et dialogue social
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 19 mai 2016