SNCF
Question de :
M. Gilles Savary
Gironde (9e circonscription) - Socialiste, écologiste et républicain
Question posée en séance, et publiée le 9 juin 2016
SITUATION À LA SNCF
M. le président. La parole est à M. Gilles Savary, pour le groupe socialiste, écologiste et républicain.
M. Gilles Savary. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.
Monsieur le Premier ministre, l’Union européenne s'apprête à ouvrir à la concurrence les réseaux ferroviaires à l'horizon de 2020. La loi portant réforme ferroviaire du 4 août 2014, par anticipation de cette échéance, avait prévu d'instaurer un cadre social harmonisé, avec une date butoir de négociation de façon que le dumping social que l'on observe dans le secteur routier ne se reproduise pas dans le système ferroviaire.
Depuis le 17 février dernier, les négociations sont en cours, non seulement sur une convention de branche – il y a en effet aujourd'hui plusieurs entreprises ferroviaires, notamment dans le fret –, mais aussi un accord d'entreprise pour la SNCF, à la demande des syndicats, y compris, ironie du sort, de ceux qui par principe y sont opposés.
Ces deux accords semblent être conclus, du moins des accords minoritaires paraissent suffisants pour aboutir, mais la grève se poursuit ; 8,3 % des personnels sont toujours grévistes, et surtout plus de 50 % des conducteurs, ce qui bloque la circulation ferroviaire.
Monsieur le Premier ministre, pourriez-vous nous préciser le contenu de ces accords, notamment comparativement à l'ancien règlement horaire dit RH 77 de la SNCF ? Estimez-vous que ces accords préservent suffisamment la capacité de la SNCF de faire face à la concurrence ferroviaire ?
Enfin, je profite de cette question pour vous demander si le Gouvernement honorera – et si oui, quand – l'obligation qui lui est faite par la loi portant réforme ferroviaire de rendre un rapport sur le traitement de la dette ferroviaire, qui atteint aujourd'hui 51 milliards d'euros. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.)
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
M. Manuel Valls, Premier ministre. À un moment où les Français ne peuvent comprendre une grève qui dure sans aucune raison, ainsi que je le rappelais hier, et qui les pénalise lourdement, je veux prendre le temps, comme vous l'avez fait, de replacer ces événements dans le contexte de la réforme ferroviaire.
Il ne faut pas oublier, en effet, que la loi d'août 2014, à laquelle vous avez contribué, a constitué une étape essentielle dans l'assainissement du système ferroviaire français. La création d'un gestionnaire d'infrastructures unifié, SNCF Réseau, a permis de remédier aux dysfonctionnements résultant de la réforme de 1997 grâce à une plus grande efficacité – du moins est-ce bien l'objectif poursuivi – au service de la rénovation et de l'entretien du réseau ferré national, ce qui doit être une priorité.
La loi de 2014 a prévu la mise en place d'un cadre social harmonisé pour l'ensemble des entreprises du secteur comprenant un décret-socle, une convention collective de branche et des accords d'entreprise. Il s'agit de lutter, vous l'avez parfaitement rappelé, contre le dumping social et de préparer le secteur à l'ouverture à la concurrence et à l'essor de celle-ci.
Le projet de convention collective, fruit de plusieurs mois de négociation entre les organisations syndicales et patronales – cela n'a rien à voir avec quelque débat que ce soit sur la loi travail –, est sur le point d'être signé par deux organisations syndicales. Ce texte sera de nature à garantir un niveau élevé de protection sociale à l'ensemble des salariés du secteur ferroviaire.
L'accord d'entreprise, négocié par la direction de la SNCF, a également reçu l'approbation de deux organisations syndicales, et la négociation a conduit à préserver les acquis sociaux des cheminots, auxquels tous les syndicats étaient attachés.
Enfin, le décret-socle, auquel Alain Vidalies a particulièrement œuvré et qui constitue le troisième niveau de ce nouvel édifice, sera publié demain.
Vous m'interrogez par ailleurs sur la situation financière du secteur ferroviaire et de la SNCF. Afin de franchir une nouvelle étape dans le soutien de l'État au secteur ferroviaire, j'ai demandé au secrétaire d'État aux transports de mettre en œuvre les décisions suivantes.
Un plan d'action sera engagé en faveur du fret ferroviaire. Il comportera notamment une subvention de l'État à hauteur de 90 millions d'euros dès cette année et pour les années à venir afin d'alléger le coût des péages pour les opérateurs de fret. S'agissant des trains d'équilibre du territoire, le Gouvernement veillera à en maintenir l'équilibre économique actuel pour la SNCF dans le cadre de la feuille de route qu'il s'est donnée.
Concernant les infrastructures existantes, qui sont pour vous et pour de nombreux parlementaires un sujet de préoccupation, je rappelle que l'effort de renouvellement a déjà été porté de 1,5 à 2,5 milliards d'euros ces dernières années. Il sera poursuivi et porté progressivement à 3 milliards d'euros par an. Dès 2017, ce seront 100 millions d'euros qui seront ajoutés.
Concernant la dette ferroviaire, objet de votre dernière question, le Gouvernement remettra en août prochain au Parlement un rapport sur la dette de SNCF Réseau et sur les solutions qui pourraient être appliquées afin de traiter la dette historique du système ferroviaire. Ce rapport examinera les différentes hypothèses de reprise de tout ou partie de cette dette par l'État et la création d'une caisse d'amortissement ainsi que leurs effets. Le législateur disposera ainsi de l'ensemble des données afin de prendre une décision.
M. André Chassaigne. Elles sont connues, les données !
M. Manuel Valls, Premier ministre. Les contrats de performance qui seront conclus d'ici à la fin de l'année entre l'État et le groupe SNCF entérineront ces mesures et traceront l'avenir du secteur ferroviaire pour les dix prochaines années.
Vous le voyez, le Gouvernement porte une grande ambition pour le ferroviaire et pour la SNCF, et c'est pourquoi il est pleinement impliqué, notamment au travers de l'action d'Alain Vidalies, de son sens du dialogue et de sa précision. Le Gouvernement est déterminé à leur donner les moyens de leur développement dans le cadre d'un effort partagé entre l'ensemble des parties prenantes.
M. Sylvain Berrios. L'État s'endette !
M. Manuel Valls, Premier ministre. Monsieur le député, vous l'avez compris, nous avançons en cohérence avec la loi de 2014, qui avait d'ailleurs donné lieu à un mouvement social, contre lequel nous avions tenu bon. Nous avançons en réaffirmant notre confiance dans l'entreprise, dans ses salariés.
M. Sylvain Berrios. Vous avez capitulé !
M. Manuel Valls, Premier ministre. Nous avançons en donnant à la SNCF les moyens de regarder son avenir avec confiance, et c'est là l'essentiel ; c'est ce que vous attendez et ce qu'attendent les Français. Les défis sont nombreux, ils méritent que chacun prenne ses responsabilités. En tout cas, le Gouvernement prend les siennes. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.)
Auteur : M. Gilles Savary
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Transports ferroviaires
Ministère interrogé : Premier ministre
Ministère répondant : Premier ministre
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 9 juin 2016