terrorisme
Question de :
M. Alain Tourret
Calvados (6e circonscription) - Radical, républicain, démocrate et progressiste
Question posée en séance, et publiée le 7 juillet 2016
LUTTE CONTRE LE TERRORISME
M. le président. La parole est à M. Alain Tourret, pour le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.
M. Alain Tourret. Monsieur le ministre de l’intérieur, il ressort des travaux de la commission d'enquête relative aux moyens mis en œuvre par l'État pour lutter contre le terrorisme depuis le 7 janvier 2015, dirigée avec talent par nos collègues Fenech et Pietrasanta, qu'il n'aurait pas été possible d'éviter les attentats du 13 novembre dernier. Les services de renseignement ne peuvent que très difficilement suivre des personnes aguerries aux méthodes de la dissimulation, qui profitent par ailleurs des faiblesses de l'Union européenne pour préparer depuis la Belgique des attentats destinés à frapper la France. Ces failles ne remettent pas en cause l’extraordinaire courage et le sang-froid de nos forces d'intervention.
La commission propose une refonte totale du renseignement de proximité, profondément désorganisé par la réforme de 2008, qui a abouti à la dissolution des Renseignements généraux au sein de la Direction centrale du renseignement intérieur – DCRI. Êtes-vous donc favorable, monsieur le ministre, à la création d'une direction générale du renseignement territorial ?
La commission conforte par ailleurs le rôle du ministre de l'intérieur comme responsable de la lutte antiterroriste et propose de créer une agence nationale antiterroriste, rattachée directement auprès du Premier ministre, création directement inspirée de l’agence américaine du National Counterterrorism Center et qui aurait pour compétence la coordination de l'ensemble des services antiterroristes, dont la Direction générale de la sécurité extérieure – DGSE.
Le président de la commission a déclaré qu'il faisait un constat objectif en observant que les trois assaillants du Bataclan étaient tous archiconnus, tout comme les frères Kouachi, auteurs de l'attentat contre Charlie Hebdo. À l'évidence, cette commission soulève des problèmes graves, puisqu'elle remet en cause la fiabilité même de nos services de renseignement.
Monsieur le ministre, que compte donc faire le Gouvernement ? Nous devons d'abord apporter une réponse à toutes les victimes et, plus largement, à l'ensemble des Français, alors même qu'on ne cesse de leur rappeler que la première des libertés est la sécurité. (Applaudissements sur les bancs du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur.
M. Bernard Cazeneuve, ministre de l'intérieur. Monsieur le député, les sujets que vous évoquez appellent énormément de précision et de sérieux et je veux remercier le rapporteur Sébastien Pietrasanta pour la qualité et la précision du travail effectué.
D’abord, contrairement à ce que pourrait laisser penser votre question, ce rapport – que vous avez, je le pense, lu avec attention – ne dénonce pas de failles des services de renseignement. Ce qu’il dit, c’est qu’il y a eu, au plan européen, des dysfonctionnements tenant au fait que ceux qui ont franchi les frontières extérieures de l’Union européenne n’ont pas été identifiés par les services des pays traversés, dont c’était le rôle. Je rappelle en effet que la plupart des auteurs de ces attaques n'étaient pas des ressortissants français et ne résidaient pas en France, et qu’il n’appartient pas aux services intérieurs français d’assurer le suivi de tous les terroristes hors des frontières nationales. Il faut le dire, car c’est tout simplement une réalité du fonctionnement des services.
En deuxième lieu, le rapport formule plusieurs propositions, notamment de renforcer le renseignement territorial. Mais qu’avons-nous fait, monsieur Tourret, sinon créer 1 500 emplois dans le renseignement territorial depuis près d’un an et demi, augmenter de 236 millions d’euros les crédits de fonctionnement des services pour leur permettre d’être enfin numérisés et à la hauteur des enjeux, rééquiper les brigades anticriminalité et les pelotons de surveillance et d'intervention de la gendarmerie– PSIG – pour permettre aux primo-intervenants d’être en situation d’agir dans des conditions satisfaisantes ? Qu’avons-nous fait pour améliorer la coordination des services, sinon créer un état-major qui permet désormais, pour chaque cas, un suivi individualisé et un échange de l’information entre tous les services de renseignement ? Qu’avons-nous fait en matière de renseignement, sinon augmenter très significativement les moyens de la Direction générale de la sécurité intérieure – DGSI ?
Ces sujets sont sérieux. Ils impliquent de la persévérance et il faut absolument éviter de se laisser aller aux idées faciles, qui ne sont pas nécessairement les plus efficaces. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.)
Auteur : M. Alain Tourret
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Ordre public
Ministère interrogé : Intérieur
Ministère répondant : Intérieur
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 7 juillet 2016