Question au Gouvernement n° 4131 :
gouvernement

14e Législature

Question de : M. Christian Jacob
Seine-et-Marne (4e circonscription) - Les Républicains

Question posée en séance, et publiée le 7 juillet 2016


POLITIQUE GÉNÉRALE DU GOUVERNEMENT

M. le président. La parole est à M. Christian Jacob, pour le groupe Les Républicains.

M. Christian Jacob. Monsieur le Premier ministre, en utilisant l’article 49.3, en passant en force, en piétinant ainsi l’Assemblée, vous reconnaissez que le pouvoir que vous exercez avec François Hollande est usé jusqu’à la corde. (« Eh oui ! » sur plusieurs bancs du groupe Les Républicains.)

La France n’a jamais connu une telle déliquescence du couple exécutif dans son histoire politique récente. Durant quelques mois, vous avez certes joué un rôle de pare-feu pour François Hollande, mais vous ne le jouez plus. La réalité est que François Hollande est devenu Monsieur-88 % de défiance et vous Monsieur-80 % d’impopularité.

M. Jean Glavany. Et toi, Jacob ?

M. le président. Monsieur Glavany, je vous en prie !

M. Christian Jacob. Vous êtes le chef de gouvernement de la Ve République le plus impopulaire, le plus rejeté par les Français, le plus honni par les vôtres. Ce rejet tient à l’image que vous renvoyez de vous-même, monsieur le Premier ministre – incapable de dialoguer, incapable de réformer –, mais il tient surtout à votre bilan de la France, qui n’est rien d’autre que le dépôt de bilan d’un pays qui a gravement décroché depuis quatre ans. Cette défiance tient aux mensonges de François Hollande, qui a trahi ses électeurs : sa campagne de 2012 a été une véritable imposture. Vous en payez le prix fort. Regardez ce que vous avez fait de votre majorité : elle est devenue un véritable champ de ruines.

Face à un tel bilan, les Français ont dépassé le stade de la déception. Ce qu’ils éprouvent, c’est de l’écœurement et de la colère, après quatre ans d’immobilisme et quatre mois de manifestations incessantes, de blocages dans le transport et de violences orchestrées par l’extrême-gauche.

Dans ce contexte de rupture totale avec les Français, pensez-vous, monsieur le Premier ministre, que ce soit encore une bonne chose que vous restiez à Matignon ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.)

M. François Loncle. Tout en nuances !

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Manuel Valls, Premier ministre. Monsieur Jacob, vos questions se suivent et se ressemblent. Je m’efforcerai donc de m’inscrire dans la même veine. Je prends d’ailleurs vos attaques personnelles, à ce stade de la discussion et venant de vous, comme autant de compliments. (Rires et applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.)

M. Christian Jacob. Et qu'en pensent les Français ?

M. Manuel Valls, Premier ministre. Monsieur Jacob, je vous ai écouté et c’était agréable à entendre. Veuillez m’écouter à votre tour, si vous le voulez bien, quelques instants. Il est assez étonnant – mais peut-être pas tant que cela – de retrouver dans vos expressions les plus personnelles des arguments qu’on peut parfois entendre ailleurs.

M. Christian Jacob. À gauche ?

M. Manuel Valls, Premier ministre. Mais là n'est pas l'essentiel. (Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.)

Même M. Wauquiez est là : c'est dire si c'est un moment important ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.)

M. Christian Jacob. Il gagne les élections, lui !

M. Laurent Furst. Vous, il vous reste dix mois !

M. Manuel Valls, Premier ministre. Monsieur Jacob, il arrive à tout le monde d’en gagner et d’en perdre et si vous êtes là, minoritaires, c’est parce que vous avez perdu les élections de 2012. (Rires et applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain - Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.)

M. Laurent Furst. On est toujours là !

M. Manuel Valls, Premier ministre. Monsieur Jacob, puisque vous parlez du peuple, il est au moins une chose qu’il faut respecter : c’est la parole du peuple. Il faut respecter le peuple. Les élections sont en mai prochain : attendez donc, car les Français sont souverains – mettons-nous au moins d’accord sur ce point.

Je répondrai maintenant très précisément à l’une de vos questions : oui, sur certains textes importants, nous n’avons qu’une majorité relative. (Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.) Je l’assume, car c’est une réalité.

M. Guy Geoffroy. Ça s’appelle une minorité !

M. Manuel Valls, Premier ministre. De la part de quelqu’un qui se réclame d’une formation gaulliste, votre position est du reste assez étonnante, car la Constitution nous permet de faire adopter des textes en engageant la responsabilité du Gouvernement. C’est la Constitution : une ou plusieurs motions de censure peuvent être déposées ; si elles sont adoptées – c’est arrivé une fois sous la Ve République –, chacun en tire les conséquences. (Exclamations persistantes sur les bancs du groupe Les Républicains.)

Je respecte la Constitution et il n’y a pas de majorité alternative, notamment sur ce texte. En effet, les critiques exprimées à l’égard de la loi travail défendue par Myriam El Khomri sont de nature différentes : certains lui reprochent d’être vide et proposent leur projet – ce qui est tout à fait normal et c’est ce que nous avons vu au Sénat –, tandis que d’autres lui reprochent d’en faire trop et expriment leur opposition, ici au Parlement ou dans la rue.

Dans ces moments difficiles pour le monde, pour l’Europe à la suite du Brexit et pour notre pays compte tenu des défis qu’il affronte, vous décrivez, en dépit de résultats économiques qui vont aujourd'hui dans le bon sens et de la maîtrise que nous avons de la situation – à propos de laquelle le ministre de l'intérieur aurait du reste pu lui aussi vous répondre –, une situation caricaturale, ce qui est, je le sais bien, le jeu de l'opposition. (Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.)

On pourrait pourtant évoquer ceux qui proposaient par exemple, voici quelques semaines, de supprimer les fans zones », voire de reporter l’Euro de football, ou encore, voici quelques mois, d’annuler la COP21.

Mme Cécile Untermaier. Il y en avait en effet qui proposaient cela !

M. Manuel Valls, Premier ministre. Soyons sérieux et tenons-nous en à la réalité du pays.

Monsieur Jacob, faute de majorité alternative sur ce texte, j’ai en effet engagé la responsabilité du Gouvernement. C’est ma responsabilité. C’est l’idée que je me fais de l’exercice du pouvoir et, en tant que Premier ministre, je continuerai à gouverner avec cette majorité relative, car c’est là le mandat que j’ai reçu des Français. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain. – Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.)

M. Laurent Furst. Vous n'avez plus de majorité !

Données clés

Auteur : M. Christian Jacob

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : État

Ministère interrogé : Premier ministre

Ministère répondant : Premier ministre

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 7 juillet 2016

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