14ème législature

Question N° 4146
de M. François Rochebloine (Union des démocrates et indépendants - Loire )
Question au gouvernement
Ministère interrogé > Affaires européennes
Ministère attributaire > Affaires européennes

Rubrique > étrangers

Tête d'analyse > réfugiés

Analyse > accueil. politique européenne.

Question publiée au JO le : 14/07/2016
Réponse publiée au JO le : 14/07/2016 page : 5359

Texte de la question

Texte de la réponse

ACCORD AVEC LA TURQUIE SUR LES MIGRANTS


M. le président. La parole est à M. François Rochebloine, pour le groupe de l'Union des démocrates et indépendants.

M. François Rochebloine. Monsieur le Premier ministre, le 18 mai dernier, notre groupe de l'UDI vous demandait un débat sur l'accord relatif aux réfugiés passé entre l'Union européenne et la Turquie. Cet accord, nous l'avons dit, insuffisant pour apporter une vraie réponse à la crise migratoire, est dangereux pour l'Europe. Il est dangereux parce qu'il relance le processus d'adhésion de la Turquie à l'Union européenne, remettant en cause notre identité. Il est dangereux parce qu'il prévoit une exemption de visas pour les ressortissants turcs, ce qui nous exposerait à des risques sécuritaires d'une ampleur inédite.

Initialement prévue pour le 1er juillet, cette exemption est restée au point mort depuis mai, la Turquie ne répondant pas aux soixante-douze critères exigés. De fait, sept critères fondamentaux ne sont toujours pas remplis, au premier rang desquels la révision de la législation anti-terroriste turque, trop éloignée de nos standards.

Monsieur le Premier ministre, c'est maintenant qu'il est urgent d'agir avant qu'il ne soit trop tard ! C'est aujourd'hui que la France doit enfin faire entendre sa voix. Face à ce marchandage, la France doit avoir le courage de dire non à cet accord ; non à la libéralisation des visas ; non à l'adhésion de la Turquie, ni aujourd'hui, ni demain !

L'UDI refuse de se plier à ce chantage, au moment où le président Erdogan renforce son pouvoir personnel au travers de la nomination d'un nouveau premier ministre encore plus à sa main que le précédent, alors que l'ambassadeur de l'Union européenne vient d'être contraint à la démission, dans un contexte très préoccupant de tensions et de violences avec la minorité kurde. Aussi, monsieur le Premier ministre, ma question sera simple : allez-vous enfin, au nom de la France, demander la suspension de cet accord passé entre la Turquie et l'Union européenne et très défavorable à la France ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union des démocrates et indépendants.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé des affaires européennes.

M. Harlem Désir, secrétaire d'État chargé des affaires européennes. Monsieur le député, l'accord conclu entre l'Union européenne et la Turquie le 18 mars dernier était nécessaire pour mettre un terme aux trafics d'êtres humains en mer Méditerranée. Aux termes de cet accord, la Turquie s'est engagée à reprendre les arrivants illégaux sur les îles grecques…

M. Claude Goasguen. Tu parles !

M. Harlem Désir, secrétaire d'État. …et à faire en sorte que ce soit dans un cadre légal qu'avec le haut-commissariat aux réfugiés l'Europe puisse décider si des personnes qui relèvent de la protection internationale seront ou non accueillies sur son sol. Cela se fait dans le cadre d'une répartition que l'on appelle une réinstallation. Cet accord a été efficace.

Nous avons, nous, l'Union européenne, pris également l'engagement d'aider la Turquie à mieux accueillir les réfugiés syriens sur son sol. Plus de 2,5 millions de Syriens sont aujourd'hui accueillis en Turquie. Nous avons pris l'engagement d'aller jusqu'à 3 milliards d'euros. Aujourd'hui, plus de 200 millions d'euros ont été versés, non pas au budget de la Turquie mais à des projets d'aide à l'hébergement, à la scolarisation et à l'accueil des réfugiés syriens en Turquie. C'est notre intérêt et c'est l'intérêt de ces réfugiés de pouvoir rester le plus près possible de leur pays car ils espèrent que la guerre s'arrêtera et qu'ils pourront rentrer chez eux.

M. François Rochebloine. Et les visas ?

M. Harlem Désir, secrétaire d'État. C'est pourquoi nous aidons la Turquie, le Liban et la Jordanie.

Nous avons également pris l'engagement d'examiner l'opportunité d'une libéralisation des visas, soumise à des critères, au nombre de soixante-douze, comme vous l'avez dit. Aujourd'hui, plusieurs d'entre eux ne sont pas remplis.

M. François Rochebloine. Sept !

M. Harlem Désir, secrétaire d'État. Nous avons également, avec le ministre de l'intérieur, demandé qu'une clause de sauvegarde, à caractère suspensif, soit adoptée avant d'envisager une quelconque libéralisation des visas avec la Turquie comme avec d'autres pays tiers. Nous attendons l'adoption de cette clause. Il n'y a donc pas de changement sur ce plan.

Il est vrai enfin que des chapitres de négociation ont été ouverts mais je vous rappelle que onze l'avaient été entre 2007 et 2012 ; deux entre 2005 et 2007 et seulement trois l'ont été depuis 2012. C'est un rapprochement entre l'Union européenne et la Turquie, qui ne préjuge en rien d'une future adhésion. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.)