14ème législature

Question N° 4181
de M. Laurent Wauquiez (Les Républicains - Haute-Loire )
Question au gouvernement
Ministère interrogé > Intérieur
Ministère attributaire > Intérieur

Rubrique > ordre public

Tête d'analyse > terrorisme

Analyse > lutte et prévention.

Question publiée au JO le : 29/09/2016
Réponse publiée au JO le : 29/09/2016 page : 5667

Texte de la question

Texte de la réponse

PARTAGE D'INFORMATIONS SUR LES PERSONNES FICHÉES S


M. le président. La parole est à M. Laurent Wauquiez, pour le groupe Les Républicains. (Vives exclamations et huées sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.)

M. Laurent Wauquiez. Monsieur le président, mes chers collègues, ma question s'adresse à M. le Premier ministre (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.)

M. le président. Je vous en prie, chers collègues !

M. Laurent Wauquiez. Notre pays est la principale cible du terrorisme islamiste et je ne doute pas que ma question puisse nous rassembler sur l'ensemble de ces bancs. (Exclamations sur quelques bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.)

Les événements dramatiques de Nice et de Saint-Étienne-du-Rouvray nous rappellent l'intensité terrible de la menace mais, aussi, la volonté de nos ennemis de frapper des lieux symboliques.

Nos établissements scolaires sont plus que jamais des cibles : rappelons-nous l'attentat de mars 2012 perpétré par Mohamed Merah. Les familles attendent que tout soit fait pour protéger nos enfants. Nous devons garantir à nos compatriotes qu'aucun individu fiché S n'est recruté dans nos établissements scolaires. Or, ce n'est pas le cas aujourd'hui.

Les maires, les présidents de département ou de région sont inquiets car lors de l'embauche de personnels éducatifs, ils ne disposent d'aucune information sur des individus potentiellement dangereux faute d'un partage des informations. Votre ministre de l'éducation nationale a elle-même reconnu avoir suspendu une « dizaine » d'agents, dont des fichés S, au sein du personnel éducatif.

Un tel partage d'information est-il possible ? Bien sûr, car un tel dispositif existe contre les prédateurs sexuels : les élus peuvent consulter avant toute embauche le fichier judiciaire automatisé des auteurs d'infractions sexuelles.

M. Jacques Myard. Très bien !

M. Laurent Wauquiez. Notre demande est donc très précise et appelle une réponse concrète. Vous engagez-vous, pour les fichés S, à faire bénéficier les maires, les présidents de départements et de régions du même système que celui qui concerne les prédateurs sexuels ? C'est le bon sens ! Écoutez cet appel des maires et des élus de terrain de tendances diverses ! Nous ne pouvons pas prendre de risque, n'attendez pas un drame pour agir ! Personne ne comprendrait que ces mesures de bon sens ne soient pas prises.

Monsieur le Premier ministre, l'école de la République et ses enfants doivent être protégés. Ce n'est pas après les drames qu'il faut agir, mais avant ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur.

M. Bernard Cazeneuve, ministre de l'intérieur. Monsieur le député Wauquiez, vous demandez une réponse précise et je vais vous la fournir.

S'agissant tout d'abord des informations dont disposent les autorités de l'État – notamment les services de renseignement – concernant les fichés S, je rappelle que nous sommes encadrés par des mesures de droit. Ce que nous devons et pouvons faire dépend de ce qu'est le droit. Je sais que, pour vous, le droit est un ensemble d' « arguties juridiques », que c'est un chiffon de papier dont on peut ne pas tenir compte (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain. - Protestations sur les bancs du groupe Les Républicains) mais, quant à nous, nous respectons le droit (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain) parce que l'on ne luttera pas contre le terrorisme en abandonnant les principes de l'État de droit.

M. Christian Jacob. Vous êtes vraiment un petit, petit ministre.

M. Bernard Cazeneuve, ministre. Que dit le droit ? Des choses extrêmement précises. Il dit que les magistrats qui disposent d'informations concernant des individus fichés judiciarisés peuvent, en vertu de l'article 11-2 du code pénal, communiquer aux élus des informations dès lors qu'elles sont de nature à éviter des troubles à l'ordre public – et ils le font. C'est le premier point.

Deuxièmement, concernant les fiches S, un décret a été pris, très précisément le 28 mai 2010, qui définit les conditions dans lesquelles les informations qu'elles contiennent peuvent être communiquées ainsi que la liste des personnes auxquelles elles peuvent l'être.

M. Christian Jacob. La situation a un peu évolué depuis !

M. Bernard Cazeneuve, ministre. Ce décret, pris par le précédent gouvernement, interdit la communication de ces informations dans les conditions que vous venez d'indiquer. Ce que vous demandez est donc totalement illégal. (Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.)

Cependant, comme je souhaite qu'il soit répondu favorablement à votre préoccupation, j'ai pris un certain nombre de dispositions. J'ai ainsi réuni les grandes associations d'élus le 6 septembre – je pense que le président de l'Association des régions de France vous en a informé – pour expliquer, d'une part, que nous mettions en place un groupe de travail (Rires et exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains) et, d'autre part, que le fichier FSPRT que j'ai instauré, qui compte 13 000 noms et qui est décliné localement, permettra aux préfets de contacter l'ensemble des élus pour leur donner les informations dont ils ont besoin. Le 14 septembre, j'ai envoyé une circulaire aux préfets pour leur demander de mettre en œuvre ces instructions.

Voilà qui devrait vous rassurer…

M. le président. Je vous remercie.

M. Bernard Cazeneuve, ministre. …et vous conduire à ne plus faire peur aux Français ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.)

M. Philippe Vitel. Ce n'est pas nous qui leur faisons peur !