Question de : M. Gilles Lurton
Ille-et-Vilaine (7e circonscription) - Les Républicains

M. Gilles Lurton appelle l'attention de M. le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie sur la question des certificats d'économies d'énergie. Créés par la loi de programmation fixant les orientations de la politique énergétique du 13 juillet 2005, les certificats d'économies d'énergie incitent les fournisseurs d'énergie à promouvoir l'efficacité énergétique auprès de leurs clients, en leur imposant une obligation triennale de réalisation d'économies d'énergie. C'est un outil mixte qui associe une obligation réglementaire, sous forme d'un objectif fixé par les pouvoirs publics, et le jeu du marché, en laissant les fournisseurs d'énergie choisir la forme de leurs actions. En cas de non-respect des objectifs, les fournisseurs d'énergie doivent s'acquitter d'une pénalité. Afin d'améliorer l'efficacité du dispositif, le simplifier, le rendre plus transparent et le mettre en cohérence avec les objectifs et les instruments de la politique d'efficacité énergétique, la Cour des comptes propose de renégocier les conditions de la délégation de service public du gestionnaire du registre EMMY. Il lui demande de bien vouloir lui indiquer la position du Gouvernement à ce sujet.

Réponse publiée le 10 décembre 2013

Les économies d'énergie sont l'un des axes prioritaires de la transition énergétique avec pour objectif de développer le pouvoir d'achat des ménages, la compétitivité des entreprises, l'innovation et la création d'activité économique. Sans attendre la loi de transition énergétique, nous disposons d'un outil essentiel pour maîtriser la demande d'énergie, au travers des certificats d'économies d'énergie (CEE). Le rapport de la Cour des comptes analysant le dispositif à la demande du Premier ministre a été publié le 16 octobre 2013. Il précise en particulier que les CEE jouent un rôle important dans la réduction de la consommation énergétique des ménages, notamment pour des travaux de rénovation progressifs. Les douze recommandations de la Cour des comptes reflètent le besoin exprimé par l'ensemble des parties prenantes de faire évoluer un dispositif qui a pu s'avérer lourd sur le plan administratif : 1. « rendre obligatoires les études a posteriori auprès des obligés pour améliorer la connaissance des économies "réellement" obtenues grâce aux opérations financées par les CEE ». Les forfaits d'économies d'énergie attribués pour les opérations standardisées sont élaborés par rapport à une situation de référence de performance énergétique, qui correspond à l'état technique et économique du marché du produit ou du service à la date la plus récente pour laquelle des données sont disponibles. Afin de décrire au mieux les économies réellement obtenues, les forfaits sont déclinés dans des fiches d'opérations standardisées selon un ensemble de paramètres : zone géographique, surface du bâtiment, type de logement, performance technique de l'équipement, etc. Les forfaits utilisés dans les fiches d'opérations standardisées sont donc vrais en moyenne même si pour une opération donnée, un écart pourrait être constaté entre les économies d'énergie forfaitaires et réelles. Dès lors, les études a posteriori n'apporteraient pas d'information supplémentaire pour l'évaluation du dispositif. Afin de décrire au mieux les économies réellement obtenues, il est en revanche pertinent de revoir régulièrement les fiches pour en actualiser la situation de référence : c'est l'objet de la recommandation n° 2. 2. « procéder à la révision triennale des fiches et des calculs qu'elles contiennent, notamment à partir des résultats constatés, pour supprimer celles qui sont rattrapées par la réglementation ou dont l'efficacité est trop faible, notamment du fait de l'évolution du parc ou du marché ». Le dispositif des CEE vise à valoriser les économies d'énergie additionnelles par rapport à la performance énergétique moyenne du marché. Le marché ayant fortement évolué depuis la rédaction de certaines fiches, il est nécessaire de les réviser en prenant en compte les données mises à jour. 3. « renforcer la professionnalisation du secteur du bâtiment à la fois par une inscription dans une logique de moyen terme du programme de formation aux économies d'énergies des entreprises et artisans du bâtiment (FEEBAT) et la généralisation de l'éco-conditionnalité comme condition nécessaire à l'obtention d'un CEE ». L'éco-conditionnalité sera généralisée en même temps que pour le CIDD (1er janvier 2015), à l'occasion de la révision des fiches évoquée à la recommandation n° 2. En ce qui concerne FEEBAT, toutes les pistes seront explorées afin d'en garantir le financement sur le moyen terme. 4. « apporter à court terme des simplifications au dispositif local du programme "habiter mieux". Une opération spécifique permettant la simplification de la valorisation des opérations soutenues par le programme "habiter mieux" de l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat (ANAH) est en cours de mise en place : les nouvelles dispositions seront opérationnelles d'ici la fin de l'année 2013. 5. "préciser l'objectif à atteindre en matière de CEE "réalisés au bénéfice des ménages en situation de précarité énergétique" (article L. 222-1 du code de l'énergie) et mettre en place un dispositif de quota ou de bonification qui oriente les acteurs vers cet objectif ». Un système de sous-objectifs via un quota conduirait à créer deux marchés étanches, ce qui complexifierait le dispositif. Par ailleurs, le traitement de la précarité énergétique se heurte au problème de l'identification des populations concernées et de leur accompagnement dans le passage à l'acte. Il semble donc plus pertinent de s'assurer de la mise en place de programmes d'action précis, s'appuyant le cas échéant sur des structures spécialisées (Agence nationale de l'habitat, fondation Abbé Pierre, etc.), et bénéficiant de bonifications pour les rendre attractifs. 6. « créer une instance de concertation réunissant tous les acteurs (administrations, représentants des obligés et des éligibles, Association technique énergie environnement ATEE, associations) afin d'assurer un dialogue permanent entre les intervenants ». Afin d'assurer une fonction de dialogue institutionnalisé autour du dispositif pendant le fonctionnement courant des périodes, le remplacement est à l'étude du « GT procédures », actuellement animé par l'ATEE, par un Comité de pilotage du dispositif, composé des services et agences de l'État, des associations techniques, des représentants des obligés et des éligibles aux CEE, des organisations non gouvernementales (ONG) environnementales et des associations de consommateurs. Les modalités de fonctionnement de ce comité seront précisées dans les prochains mois. 7. « engager immédiatement et par sondage les contrôles a posteriori prévus par les textes et qui n'ont jamais été mis en oeuvre ». Afin d'évaluer à la fois la conformité de l'action des titulaires d'un plan d'actions agréé et les dispositions actuelles relatives aux sanctions dans la perspective de la préparation des règles de la troisième période, la DGEC vient de lancer un cycle de contrôles, conformément à la recommandation de la Cour des Comptes. 8. « à court terme, mettre en place les simplifications nécessaires en terme notamment de standardisation des documents ; la DGEC, "pôle national des certificats d'économies d'énergie" (PNCEE) ayant déjà travaillé sur ce sujet, leur mise en oeuvre pourrait être rapide ». Les travaux techniques conduits en préparation de la troisième période (2015-2017) chercheront à simplifier significativement le dispositif, en rendant par exemple obligatoires des modèles de documents pour certaines pièces justificatives (standardisation des attestations de fin de travaux notamment) ceci permettra de limiter les interprétations et la charge administrative des acteurs. 9. « pour la troisième période, passer à une architecture différente fondée sur le triptyque dématérialisation/système déclaratif/contrôle a posteriori par échantillonnage ». En troisième période seront mis en oeuvre des contrôles a posteriori du dispositif, sur un échantillon de dossiers, qui permettra de sanctionner les dérives éventuelles. Les réflexions sont en cours pour étudier la mise en place à terme d'une certification obligatoire des demandeurs ou de leur mandataire, via un organisme certificateur accrédité et/ou agréé par l'administration. 10. « développer le dispositif des "passeports énergétiques" sous forme d'un programme au sens de l'article L. 221-7 du code de l'énergie, afin de mieux cibler les logements visés et les travaux prioritaires et accompagner la démarche des ménages ». Le dispositif des « passeports énergétiques » sera mis en oeuvre en 2014, conformément à l'engagement du Président de la République pris lors de la conférence environnementale 2013. Son financement reste à préciser. Une possibilité serait de l'inclure dans le cadre d'un programme CEE d'accompagnement sur le thème de l'information. 11. « renégocier les conditions de la délégation de service public du gestionnaire du registre national des certificats d'économies d'énergie (EMMY) ». En 2013, les frais d'inscription des CEE sur le registre s'élèvent à 0,95 c€ / MWhcumac, soit 0,2 % du prix d'échange des CEE. Pour les années suivantes, des discussions seront conduites pour adapter les frais en fonction des objectifs fixés pour la troisième période. 12. « assurer la transparence et la sécurité des transactions, en séparant les fonctions d'enregistrement des certificats et la gestion des transactions, en assurant la visibilité de celles-ci (prix, quantités, effectivité des transactions). Si les volumes échangés le justifient, privilégier la relance d'un véritable marché ». A l'issue de la première concession de service public s'étant étendue sur la période 2007-2012, un appel d'offres a été lancé au cours de l'année 2012 : les aspects transparence et sécurité des transactions ont été renforcés dans le cahier des charges, et ont fait l'objet d'un examen attentif au cours de l'analyse des offres des candidats. Au terme du processus, c'est la société locasystem international qui a été retenue pour la période 2013-2017. Le teneur de registre doit publier tous les mois le prix moyen et le volume moyen des transactions déclarées ce qui assure la transparence sur les niveaux de prix et les volumes de transaction. Le transfert de CEE entre deux comptes n'est par ailleurs effectif qu'après signatures des deux parties concernées, ce qui garantit l'effectivité des transactions. La séparation des fonctions d'enregistrement des CEE et de gestion des transactions n'est en revanche pas envisagée, car cela reviendrait d'une part à complexifier le dispositif en multipliant les intervenants, et d'autre part, à modifier une disposition fondamentale de la convention de concession de service public en cours d'application, ce qui remettrait en question l'économie générale de la délégation. L'ensemble de ces évolutions techniques feront l'objet d'une consultation auprès des parties prenantes sous l'égide de la DGEC dans les prochaines semaines, en vue de la préparation des textes règlementaires encadrant la troisième période des certificats d'économie d'énergie.

Données clés

Auteur : M. Gilles Lurton

Type de question : Question écrite

Rubrique : Énergie et carburants

Ministère interrogé : Écologie, développement durable et énergie

Ministère répondant : Écologie, développement durable et énergie

Dates :
Question publiée le 12 novembre 2013
Réponse publiée le 10 décembre 2013

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