14ème législature

Question N° 4224
de M. Philippe Goujon (Les Républicains - Paris )
Question au gouvernement
Ministère interrogé > Affaires sociales et santé
Ministère attributaire > Affaires sociales et santé

Rubrique > drogue

Tête d'analyse > toxicomanie

Analyse > salles d'injection de drogue. mise en place.

Question publiée au JO le : 12/10/2016
Réponse publiée au JO le : 12/10/2016 page : 6059

Texte de la question

Texte de la réponse

SALLES DE SHOOT


M. le président. La parole est à M. Philippe Goujon, pour le groupe Les Républicains.

M. Philippe Goujon. Monsieur le président, chers collègues, aujourd'hui, madame la ministre de la santé, vous avez inauguré, avec la maire de Paris, la seule salle de shoot de France (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain), rompant un consensus politique suivi par tous les gouvernements. C'est une fausse bonne idée : ces salles ne sont pas utiles ; pire, elles sont dangereuses.

Elles ne sont pas utiles car notre offre de réduction des risques est l'une des plus performantes au monde, avec deux tiers des usagers traités dans des centres spécialisés : overdoses divisées par cinq – il y en a cinq fois moins qu'en Allemagne, pays des salles de shoot –, contaminations par VIH divisées par quatre, mais aussi quatre fois moins d'héroïnomanes qu'en Suisse, quatre fois moins de cocaïnomanes qu'en Espagne, autres pays des salles de shoot.

Ces salles sont aussi dangereuses, d'abord parce que tout médecin sait bien que nulle intoxication ne peut être traitée par le produit qui l'a créée, d'où leur condamnation par nos académies de médecine, de pharmacie et par l'ordre des médecins ; mais aussi par les riverains qui redoutent ces zones de non-droit et d'implantation des trafics autour d'une salle ouverte uniquement aux heures de bureau. Surtout, elles brouillent le message de l'État, qui ne peut mener une politique de désintoxication tout en accompagnant la consommation, banalisant, voire légitimant la drogue par une dépénalisation de fait, alors qu'en la matière, les interdits sont essentiels.

M. Jacques Myard. L'État veut nous intoxiquer !

M. Philippe Goujon. Le pire, c'est que ces salles ne résoudront pas non plus les contaminations puisque les usagers problématiques de drogue sont, hélas, déjà porteurs de ces morbidités. Sortir les jeunes de la drogue, ce n'est certainement pas les aider à se droguer, soi-disant proprement, pour un résultat improbable. Alors, madame la ministre, dites-nous franchement : la prochaine étape, c'est la dépénalisation ? C'est la légalisation des drogues ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains et sur les bancs du groupe de l'Union des démocrates et indépendants.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.

Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé. Monsieur le député, oui, ce matin, j'ai inauguré, avec votre collègue Seybah Dagoma, la première salle de consommation à moindre risque, qui ouvre ses portes en France.

Mme Danielle Auroi, Mme Michèle Bonneton, M. Sergio Coronado et Mme Véronique Massonneau. Très bien !

Mme Marisol Touraine, ministre. Dans quelques jours, j'inaugurerai une deuxième salle à Strasbourg…

M. Laurent Furst. Rue de Solférino me paraît être un meilleur endroit !

Mme Marisol Touraine, ministre. …et je souhaite que d'autres expérimentations soient possibles sur notre territoire. Cela fait trente ans que des expérimentations sont menées à travers le monde.

M. Yves Fromion. Avec quel résultat ?

Mme Marisol Touraine, ministre. Dix pays sont déjà engagés dans cette politique, et les résultats sont extrêmement satisfaisants. Monsieur le député, ce n'est pas en niant la réalité qu'on y apporte des réponses. Ma volonté et celle du Gouvernement – car c'est la loi de modernisation de notre système de santé qui a permis cette expérimentation – est de ne pas exclure, de ne pas stigmatiser, mais au contraire de permettre l'accompagnement de tous.

Mme Seybah Dagoma. Très bien !

M. Philippe Goujon. Dans ce cas, allez jusqu'au bout de la démarche, et légalisez !

Mme Marisol Touraine, ministre. Ces salles de consommation à moindre risque s'adressent à des femmes et à des hommes éloignés de tout, exclus des systèmes de santé. Nous avons des objectifs de santé publique : les overdoses sont diminuées, les risques de contamination, réduits. Nous avons des objectifs sociaux : faciliter la réinsertion. Et nous avons des objectifs de sécurité, car qui peut se satisfaire d'une situation où des enfants trouvent des seringues souillées dans des bacs à sable ou dans des cages d'escalier ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain. - Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.) Nous voulons l'éviter, et ce n'est pas en stigmatisant ou en dénonçant que l'on résout les problèmes. La volonté de ce Gouvernement est d'accompagner, de soigner et de soutenir ceux qui en ont besoin. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain. - Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.)

M. Christian Jacob. Irresponsables !