Question de : M. Dominique Dord
Savoie (1re circonscription) - Les Républicains

M. Dominique Dord attire l'attention de M. le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie sur la valorisation et la protection de l'espace maritime français. Les océans recouvrent 71 % de la superficie du globe. La France ne prend pas pleinement conscience de la puissance maritime qu'elle constitue. Ainsi, dans une économie mondialisée, les ports sont des outils indispensables au développement du transport maritime. Ce sont 40 000 emplois qui sont directement générés par les ports français métropolitains, et ce chiffre ne tient pas compte des emplois industriels et logistiques présents sur les zones portuaires. De même qu'il n'est pas tenu compte de la place de leader de la France en matière de tourisme, et particulièrement dans la plaisance et les loisirs nautiques. Or les trafics de marchandises et le transport de personnes régressent régulièrement, à l'aune de ce qui se passe outre-Rhin, ou encore dans le plus grand port européen, où les pouvoirs publics ont pris conscience de l'intérêt de développer une flotte maritime nationale significative. À l'heure de la transition énergétique des investissements sont indispensables pour améliorer la desserte et le raccordement aux réseaux transeuropéens de nos ports français. Il faut pour cela réduire les coûts, et cela passe par une concentration importante des trafics de marchandises, de circulation des personnes, et par une simplification des procédures d'autorisation. Il lui demande si le Gouvernement entend donner une suite favorable à cette suggestion.

Réponse publiée le 21 janvier 2014

Par la loi n° 2008-660 du 4 juillet 2008 portant réforme portuaire, l'État a entamé une profonde mutation de sa politique portuaire. Cette réforme repose sur trois piliers : une modification de la gouvernance de sept ports autonomes (Marseille, Le Havre, Dunkerque, Nantes Saint-Nazaire, Rouen, Bordeaux et La Rochelle) devenant des grands ports maritimes (GPM), un transfert des outillages des grands ports maritimes aux opérateurs privés, et un transfert du personnel des grands ports maritimes employés à l'exploitation ou à la maintenance des outillages précédents aux opérateurs privés également. Si la réforme de 2008 a mis les ports français dans des conditions d'exploitation similaires aux grands ports du Nord de l'Europe, elle ne s'est pas accompagnée d'une vision stratégique sur le rôle des ports français. Le ministre délégué, chargé des transports de la mer et de la pêche, en a fait une priorité, et a souhaité insuffler une dynamique prospective en élaborant une stratégie nationale portuaire. Elle vise à positionner ces derniers comme architectes de solutions logistiques intégrées et compétitives. Elle encourage les ports à être des zones de développement de filières industrielles novatrices générant des trafics. Enfin, cette stratégie renforce les GPM dans le rôle d'aménageur de l'espace portuaire. Il s'agit de faire des ports maritimes un puissant levier au service de l'économie, contribuant à la création d'emplois ainsi qu'à un aménagement équilibré du territoire. Cette stratégie a été conçue conjointement entre l'État, les GPM et l'ensemble des acteurs du monde portuaire. La stratégie portuaire est aussi en phase avec les conclusions de la Commission mobilité 21. Ces deux textes font du renforcement de la desserte ferroviaire des ports un levier indispensable au développement de l'activité économique française. Des investissements dans les infrastructures portuaires devront donc être réalisés pour accompagner la mise en oeuvre de la stratégie portuaire. Le financement apporté par l'État pour réaliser les projets portuaires est assuré par l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF). Les financements européens seront également sollicités pour réaliser les projets portuaires. Les GPM affichent aujourd'hui des résultats encourageants, malgré les difficultés économiques que l'on connaît. Leurs trafics conteneur en 2012 sont globalement meilleurs que la plupart de leurs concurrents européens, notamment au Havre et à Marseille-Fos. Ainsi, entre 2011 et 2012, le trafic français de marchandises conteneurisées exprimé en tonnage progresse de 5,6 %, alors qu'il diminue de 2,6 % pour l'ensemble des grands ports européens. La part de marché française atteint donc 6,1 % en 2012 contre 5,7 % un an plus tôt, soit 7,9 % de hausse. Les effets de la stratégie portuaire devraient encore accentuer ce regain de compétitivité. On constate aussi que les ports français s'intègrent bien dans la reconfiguration des lignes maritimes, notamment la future alliance entre les compagnies Maersk, MSC et CMA-CGM, qui envisagent de mutualiser en 2014 leurs services Asie Nord-Europe (alliance P3). Le Havre obtiendrait d'être touché par cinq des huit services communs, ce qui devrait lui assurer une croissance importante de ses trafics dans les années à venir. Outre le développement de l'activité des grands ports que sont Le Havre et Marseille, le ministre considère que la coopération inter-portuaire de façade entre GPM, mais aussi, avec les ports décentralisés constitue un levier de compétitivité indéniable pour les ports français. Cette coopération peut s'exprimer par un échange d'informations notamment commerciales, par la prospection commune, la mise en place d'offres communes, voire la mise en place de partenariats plus formels (type HAROPA). Sur ce point, il parait en particulier important de mieux valoriser l'articulation entre les ports maritimes (grands ports et ports décentralisés) et les ports intérieurs, de façon à pouvoir répondre au plus près des besoins des clients, qui sont demandeurs de solutions logistiques globales. C'est à ce niveau de regroupement que la voix des ports français peut être entendue. Les ports décentralisés sont donc amenés à jouer un rôle de plus en plus important dans la compétitivité du système portuaire français. Ils représentent aujourd'hui 20 % du trafic de marchandise et 80 % du trafic de passagers des ports français. Le ministre est conscient de leur importance dans l'architecture portuaire française. En ce sens, il a chargé Mme la sénatrice Odette Herviaux d'une mission temporaire sur la « Gouvernance des ports décentralisés », qui vise à procéder à un état des lieux des rapports entre les différents acteurs du secteur et de dresser un bilan de la décentralisation portuaire. S'agissant de la place des ports français dans le réseau transeuropéen de transport (RTE-T), celui-ci constitue la politique de l'Union européenne destinée à réaliser l'interconnexion entre les réseaux nationaux et structurer un réseau de grands axes européens. Cet instrument qui permet, notamment, le financement de projets d'infrastructures portuaires, a été entièrement révisé en 2013. Il en est ressorti une reconfiguration des schémas de financements, concentrés aujourd'hui autour des « corridors multimodaux ». L'État français s'est fortement impliqué dans cette révision, ce qui lui a permis d'obtenir son positionnement sur quatre corridors : le corridor Mer du Nord-Méditerranée (Édimbourg - Amsterdam - Marseille), le corridor Atlantique (Lisbonne-Strasbourg), le corridor Méditerranée (Algeciras - Budapest) et le corridor Danube (Strasbourg - Constanta). Les ports de Marseille, Le Havre et Dunkerque figurent en bonne place au sein des corridors. Tout a été mis en oeuvre pour qu'ils bénéficient pleinement du RTE-T, qui constitue un levier financier prépondérant pour la concrétisation de plusieurs grands projets d'investissement. Enfin, s'agissant de la simplification des procédures portuaires, les ports sont un maillon de la chaîne logistique de bout à bout, et doivent faciliter le transit des marchandises. Pour ce faire, le ministre a décidé d'intégrer à la stratégie nationale portuaire un choc de simplification comportant trois principaux volets : - améliorer les processus d'implantations industrielles et logistiques dans les ports : une mission confiée au Conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD) et au Conseil général de l'économie, de l'industrie, de l'énergie et des technologies (CGEIET) est en cours ; - alléger les charges liées à la perception de la TVA : un groupe de travail a été mis en place entre services de l'État, transitaires et chargeurs ; - accélérer la dématérialisation au travers du guichet unique portuaire, du déploiement de systèmes dématérialisés de suivi de la marchandise et d'une démarche de rationalisation de la perception des droits de port. Le ministre a particulièrement insisté sur la réalisation rapide de ce dernier volet. Il a donc retenu en février 2013 un scénario de guichet unique en concertation avec l'ensemble des professionnels du secteur. Cette action vise la dématérialisation des échanges de données entre le navire ou son représentant et les autorités portuaires et ce afin d'harmoniser et de simplifier ces échanges. Le ministre a insisté pour que la France soit en pointe sur ce dossier, et pour que les travaux de mise en oeuvre des guichets uniques soient réalisés avant le 1er janvier 2015.

Données clés

Auteur : M. Dominique Dord

Type de question : Question écrite

Rubrique : Transports par eau

Ministère interrogé : Écologie, développement durable et énergie

Ministère répondant : Transports, mer et pêche

Dates :
Question publiée le 12 novembre 2013
Réponse publiée le 21 janvier 2014

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