Question de : Mme Véronique Louwagie
Orne (2e circonscription) - Les Républicains

Mme Véronique Louwagie attire l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale sur les enseignements de recherches sur l'effet de l'autonomie des établissements scolaires. La grande majorité des pays de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) ont accru le degré d'autonomie de leurs établissements scolaires, c'est-à-dire les marges de manœuvre dont ces derniers disposent en termes de pédagogie, de gestion financière et de ressources humaines. Cette autonomie étendue a généralement pour contrepartie un contrôle plus strict des résultats obtenus par les établissements. La France est restée relativement en retrait de ce mouvement, les établissements bénéficiant d'un degré de liberté restreint, notamment en termes de recrutement et de programmes scolaires. L'autonomie permet de faire émerger des structures et des dispositifs éducatifs innovants. Dans sa note d'analyse de janvier 2013, le Centre d'analyse stratégique propose de « privilégier l'autonomie en matière de gestion des personnels et d'adaptation locale de l'organisation des enseignements ». Aussi, elle souhaite connaître quelles sont ses intentions suite à cette proposition.

Réponse publiée le 30 décembre 2014

La loi d'orientation et de programme pour l'avenir de l'école du 23 avril 2005 faisait une place à l'autonomie des établissements. Il s'agissait de faire du chef d'établissement le véritable pilote pédagogique de l'EPLE en s'appuyant sur une nouvelle instance, le conseil pédagogique. Le projet d'établissement constitue le cadre général de l'autonomie des établissements et peut prévoir des expérimentations (article 34) permettant de mettre en oeuvre des mesures innovantes, sous réserve de l'approbation des autorités académiques. Le contrat d'objectif, dont le cadre légal est institué à l'article 36 de la même loi, est un outil de dialogue entre le chef d'établissement et les autorités académiques. La politique du gouvernement ne remet pas en cause cette volonté. La loi n° 2013-595 du 8 juillet 2013 d'orientation et de programmation pour la refondation de l'école de la République a pour ambition de permettre la réussite de tous les élèves et de réduire les inégalités face aux apprentissages. Une grande confiance est accordée aux professionnels de l'éducation, chefs d'établissement, équipes enseignantes, et à la communauté éducative en général, pour trouver les solutions pédagogiques et éducatives les plus adaptées aux caractéristiques particulières à chaque territoire. Il ne s'agit pas, en France, d'accorder une autonomie en matière de programmes d'enseignement. L'affirmation d'un socle commun de connaissances, de compétences et de culture, dont on attend qu'il soit acquis par tous les jeunes, suppose que les contenus -et donc les programmes d'enseignement- soient les mêmes sur l'ensemble du territoire. La création du Conseil supérieur des programmes (CSP) dont la mission est de formuler des propositions à la fois concernant le socle (objectif) et les programmes (moyen d'atteindre les objectifs) prend, dans ce cadre, tout son sens. L'autonomie des établissements, c'est donc avant tout la capacité à définir, dans le cadre structurant socle-programmes, une démarche pédagogique et éducative adaptée à tous les élèves et exigeante pour chacun d'entre eux. Certes, l'approche est différente dans le premier et le second degrés compte tenu de la nature juridique des écoles, des collèges et des lycées. Pourtant, la notion de projet d'équipe et la capacité à réunir les acteurs sont au coeur de la refondation : ainsi la scolarisation des moins de trois ans, le dispositif « plus de maîtres que de classes » reposent sur un projet partagé au sein d'une école. D'autres dispositifs témoignent des marges de manoeuvre dont peuvent se saisir les acteurs sur le terrain : - la mise en oeuvre de la réforme des rythmes scolaires qui permet d'assurer les apprentissages fondamentaux en tenant compte des rythmes de l'enfant donne une certaine souplesse d'organisation des services qui répond à cette idée d'une certaine autonomie, au plan local, du Directeur académique des services de l'éducation nationale ; - la mise en place des cycles, l'institution du conseil école-collège doivent permettre aux acteurs de terrain d'oeuvrer à la fluidité des parcours des élèves en évitant, notamment, le redoublement ; - la lutte contre l'absentéisme ou le décrochage scolaire dans toutes ses dimensions s'appuie, elle aussi, sur une approche globale qui réunit différents acteurs au-delà, d'ailleurs, de l'éducation nationale ; - la refondation de l'éducation prioritaire qui s'intéresse à l'actualisation de sa géographie mais aussi aux méthodes d'enseignement se veut porteuse d'innovations et d'expérimentations. Le temps de concertation et de travail en équipe est reconnu dans le premier comme dans le second degré ; - le contrat d'objectifs tripartite institué par la loi de refondation de l'école du 8 juillet 2013, pour les collèges et les lycées, est la traduction d'un diagnostic et d'une stratégie partagés à la fois par un établissement et l'autorité académique mais également par la collectivité territoriale compétente, si elle le souhaite. Il doit renforcer le cadre de l'autonomie de l'établissement ; - la délégation des moyens d'enseignement aux établissements doit donner une marge de manoeuvre aux chefs d'établissement qui disposent d'ores et déjà d'une certaine latitude, dans le respect des programmes, pour organiser les enseignements au collège, en lycée général et technologique et, plus encore peut-être, en lycée professionnel ; - sur le plan financier, la réforme du cadre budgétaire et comptable des établissements qui s'inscrit pleinement dans le cadre de la LOLF, permet une lecture plus stratégique du budget de l'établissement, dans le sens de son autonomie. En revanche, l'autonomie en termes de gestion des ressources humaines trouve ses limites, notamment dans le statut des fonctionnaires en général et dans celui des personnels enseignants en particulier. Certaines exceptions existent : le chef d'établissement a souvent toute latitude pour recruter les assistants d'éducation ou les emplois aidés qui correspondent à ses besoins. Quelques postes d'enseignants peuvent être des postes à profil, notamment en éducation prioritaire (ECLAIR). Ce statut des fonctionnaires est facteur d'équité sur l'ensemble du territoire et garantit, pour tous les élèves, des enseignants recrutés sur cette base et désormais mieux formés dans les ESPÉ. Le recrutement des enseignants est national : en effet, une autonomie accrue d'un recrutement local serait facteur d'inégalité notamment dans certaines zones d'éducation prioritaire ou de grande ruralité. Pour conclure, l'autonomie ne se décrète pas, elle doit s'installer peu à peu. Les acteurs doivent pouvoir s'en emparer. L'autonomie ne consiste pas à laisser les équipes seules face à leurs responsabilités. Elle doit être accompagnée et les services académiques autant que l'administration centrale sont mobilisés pour mettre à disposition des écoles et des établissements les outils pédagogiques susceptibles de répondre à leurs attentes.

Données clés

Auteur : Mme Véronique Louwagie

Type de question : Question écrite

Rubrique : Enseignement

Ministère interrogé : Éducation nationale

Ministère répondant : Éducation nationale, enseignement supérieur et recherche

Dates :
Question publiée le 19 novembre 2013
Réponse publiée le 30 décembre 2014

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