activités
Question de :
Mme Véronique Louwagie
Orne (2e circonscription) - Les Républicains
Mme Véronique Louwagie attire l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale sur les enseignements de recherches sur l'effet de l'autonomie des établissements scolaires. La grande majorité des pays de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) ont accru le degré d'autonomie de leurs établissements scolaires, c'est-à-dire les marges de manœuvre dont ces derniers disposent en termes de pédagogie, de gestion financière et de ressources humaines. Cette autonomie étendue a généralement pour contrepartie un contrôle plus strict des résultats obtenus par les établissements. La France est restée relativement en retrait de ce mouvement, les établissements bénéficiant d'un degré de liberté restreint, notamment en termes de recrutement et de programmes scolaires. L'autonomie permet de faire émerger des structures et des dispositifs éducatifs innovants. Dans sa note d'analyse de janvier 2013, le Centre d'analyse stratégique propose « d'accompagner cette évaluation d'un système réactif permettant d'épauler les équipes en cas de résultats insuffisants ». Aussi, elle souhaite connaître quelles sont ses intentions suite à cette proposition.
Réponse publiée le 30 décembre 2014
Dans sa note d'analyse n° 316 « Enseigner des recherches sur l'effet de l'autonomie des établissements scolaires » de janvier 2013, le Centre d'analyse stratégique propose de privilégier l'autonomie en matière de gestion des personnels et d'adaptation locale de l'organisation des enseignements ; de renforcer les dispositifs d'évaluation des établissements - qu'il s'agisse d'évaluations externes et collectives par des inspecteurs, d'auto-évaluations ou encore de production et suivi d'indicateurs de « valeur ajoutée » des établissements - construits avec l'ensemble des personnels du monde éducatif ; et d'accompagner cette évaluation d'un système réactif permettant d'épauler les équipes en cas de résultats insuffisants. Le législateur a souhaité donner à l'évaluation un nouvel élan par la création, par la loi n° 2013-595 du 8 juillet 2013 d'orientation et de programmation pour la refondation de l'école de la République, du Conseil national d'évaluation du système scolaire (CNESCO), instance indépendante. Ses avis, ses évaluations, son rapport annuel et son bilan annuel des expérimentations seront rendus publics. Par ailleurs, le Conseil national de l'innovation pour la réussite éducative (CNIRE) a été installé en avril 2013 pour favoriser l'esprit d'innovation et de mutualisation des bonnes pratiques des enseignants. Ce repérage des pratiques de terrain, croisées avec des travaux issus de la recherche française et internationale, est de nature à faire émerger des recommandations pour le système éducatif dans son ensemble. De plus, les indicateurs produits chaque année au RAP (Rapport annuel de performance) permettent à la représentation nationale de connaître les progrès réalisés et les marges de progrès possibles au regard des objectifs fixés dans le PAP (Projet annuel de performance). Enfin, le ministère de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche impulse et conduit cette politique de l'évaluation et de la performance dans le dialogue qui a lieu chaque année avec les autorités académiques (recteur d'académie et IA-DASEN). Il a engagé, depuis 2012, une contractualisation avec les 30 académies sur quatre ans, dans une démarche parallèle à celle des EPLE avec les autorités académiques. Ce contrat permet d'afficher des objectifs partagés avec chaque académie sur son territoire et d'apporter une aide et des mesures d'accompagnement adaptées par l'administration centrale. Ainsi, au niveau national, le cadre institutionnel est fixé pour soutenir et accompagner les autorités académiques dans leur démarche propre, sur leur territoire, en fonction du public qu'elles doivent scolariser (ou re-scolariser après décrochage des élèves les plus en difficulté). Les établissements scolaires disposent par ailleurs de nombreux repères évaluatifs. La France a en effet un système éducatif mixte, à la fois déconcentré et décentralisé. Dans ce cadre, elle a développé l'autonomie des établissements scolaires, en particulier dans le second degré (collèges, lycées et lycées professionnels) en souhaitant donner à chacun d'entre eux la possibilité de construire un projet d'établissement et de signer un contrat d'objectifs tripartite dans lequel, pour ce dernier, la collectivité territoriale de rattachement peut être désormais partie prenante, si elle le souhaite (art. R421-3 et R421-4), dans le respect mutuel des compétences propres de l'Etat (la pédagogie) et des collectivités locales (la maintenance informatique, le fonctionnement). Le projet d'établissement, sur la base d'un diagnostic, fixe les objectifs à atteindre et les programmes d'action à mettre en oeuvre au sein de l'établissement. Le contrat d'objectifs actuellement signé avec les autorités académiques (recteur d'académie ou IA-DASEN), permet de rattacher ces objectifs particuliers à ceux du projet académique arrêté par le recteur sur son territoire pour la même périodicité (en général 3 ou 4 ans). Dans les deux cas (projets et contrats d'objectifs), de nombreux indicateurs sont mis à la disposition des établissements, eux-mêmes aidés par les services statistiques académiques, avec des références départementales, académiques et nationales (exemple de l'outil APAE : aide au pilotage et à l'auto-évaluation des établissements sur des champs diversifiés : taux de passage de seconde en première, réorientation, taux d'accès en seconde, taux de réussite au diplôme national du brevet - DNB - ou au baccalauréat, données sur la scolarisation des filles, devenir des bacheliers, etc.. . ). Pour le second degré, le direction de l'évaluation, de la prospective et de la performance (DEPP) calcule chaque année des indicateurs de valeur ajoutée des lycées qui mesure le taux d'accès au baccalauréat des élèves entrant en seconde et calcule un taux attendu de réussite aux examens (en fonction de différents critères : origine sociale, retard à l'entrée en seconde...) confrontés aux résultats aux examens. Ainsi cet indicateur de valeur ajoutée (IVAL) permet-il de mesurer la capacité d'un établissement à accompagner ses élèves vers la réussite. Certains établissements peuvent être considérés à forte valeur ajoutée avec un taux de réussite au baccalauréat de 75 % alors que, dans d'autres établissements, un taux de réussite à 90 % peut être considéré comme décevant. Par ailleurs, certaines labellisations (lycée des métiers, par exemple) nécessitant la conduite d'un audit ont permis de faire accepter progressivement la démarche. De même, les projets d'établissement, les contrats d'objectifs, les lettres de mission des chefs d'établissement sont autant de documents qui ont permis de développer une culture de la performance adaptée du système éducatif. Sans qu'il revête le caractère formel d'une évaluation, le dialogue de gestion qui s'est progressivement installé entre les chefs d'établissements et les autorités académiques (recteur, IA-DASEN) est souvent l'occasion de réfléchir aux résultats d'un établissement, à sa politique et à son pilotage. La construction d'indicateurs, de « radars » permettent aux collèges et lycées de se situer les uns par rapport aux autres. Progressivement, les équipes éducatives sont amenées à s'interroger non plus simplement sur les résultats obtenus aux examens mais plus globalement au parcours des élèves. Par exemple, il ne suffit pas qu'un élève réussisse le diplôme national du brevet et qu'il soit orienté en seconde générale. La question est plutôt de savoir s'il est bien préparé au lycée pour réussir sa seconde et avoir accès au baccalauréat. Autre exemple, les autorités académiques peuvent amener les équipes à comparer les résultats des filles et des garçons. Si les conclusions qui en sont tirées sont évidemment intéressantes, le questionnement suscité sur la pratique pédagogique est tout aussi pertinent. Au-delà du dialogue régulier entre établissement et services académiques, des évaluations peuvent être menées selon des formes diverses dans les écoles et les EPLE, souvent conduites par des représentants des corps d'inspections, sans que cela revête un caractère exclusif. Une approche pluridisciplinaire est souvent profitable. L'accompagnement des équipes dont les résultats sont insuffisants est déterminant. Il ne s'agit pas de stigmatiser les personnels et de ne pointer que les difficultés. Il faut sensibiliser les personnels à l'auto-évaluation, au diagnostic, les plus objectifs possibles. Cela passe naturellement par la formation et en particulier celle des cadres du système éducatif, au premier rang desquels figurent les chefs d'établissements et les corps d'inspection. Lorsqu'un établissement apparaît comme présentant des difficultés particulières, les services académiques disposent de plusieurs moyens d'action : actions de formation ciblées prenant la forme, par exemple, d'aides négociées animées par des inspecteurs ou des formateurs au bénéfice de l'équipe enseignante pour traiter d'un sujet précis nécessitant une attention soutenue (problème de lecture ou politique d'évaluation et de notation des élèves) ; visites sur le terrain. Enfin, les services académiques, eux-mêmes, sont de plus en plus souvent dans l'anticipation. Ce sont aussi des services d'expertise pédagogique et éducative. En effet, peu à peu les « états-majors » des rectorats et dans une moindre mesure des directions académiques se sont étoffés et sont constitués de cadres pédagogiques de haut-niveau qui travaillent à la mise à disposition d'outils pour répondre à des problématiques identifiées par le recteur et susceptibles de bénéficier à l'ensemble des écoles ou des établissements de l'académie, selon les contextes particuliers. L'éducation doit être nationale, au sens où elle doit portée par la même exigence et la même ambition. Mais elle ne doit pas être uniforme, car l'exigence et l'ambition n'ont de sens que si des marges de manoeuvre pédagogiques sont laissées aux équipes pédagogiques locales, seules en mesure de choisir et de diversifier les démarches et les approches permettant à tous leurs élèves de réussir. L'autonomie des établissements est celle qui vise à donner des marges de manoeuvre pédagogiques pour mettre en oeuvre les priorités nationales aux équipes locales. L'autonomie pédagogique implique un mode de pilotage des établissements et un véritable travail d'équipe autour du projet, une collégialité et un pilotage interne clair, fort et responsable. Le conseil pédagogique, dont un décret vient de revoir la composition, est l'instance qui sur laquelle le chef d'établissement doit s'appuyer pour que soient préparés et partagés les choix meilleurs pédagogiques pour la réussite des élèves. La réforme à venir du collège, qui sera lancée en janvier 2015, donnera enfin une véritable autonomie aux collèges qui, aujourd'hui, en sont dépourvus, avec : - la mise en place d'approches pédagogiques différenciées ; - la mise en place d'enseignements complémentaires au tronc commun qui dépendront, en grande partie, des projets des équipes pédagogiques.
Auteur : Mme Véronique Louwagie
Type de question : Question écrite
Rubrique : Enseignement
Ministère interrogé : Éducation nationale
Ministère répondant : Éducation nationale, enseignement supérieur et recherche
Dates :
Question publiée le 19 novembre 2013
Réponse publiée le 30 décembre 2014