Premier ministre
Question de :
M. Christian Jacob
Seine-et-Marne (4e circonscription) - Les Républicains
Question posée en séance, et publiée le 3 novembre 2016
PROPOS TENUS PAR LE PREMIER MINISTRE
M. le président. La parole est à M. Christian Jacob, pour le groupe Les Républicains.
M. Christian Jacob. Monsieur le Premier ministre, savez-vous ce qu'est un sentiment d'abaissement et d'humiliation qui résulte d'une atteinte à l'honneur et à la dignité ? C'est la définition même de la honte, cette honte que vous dites ressentir à l'égard du Président de la République. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.)
Imaginez une seconde, monsieur le Premier ministre, que j'aie osé évoquer, comme tous les Français l'éprouvent, cette honte qu'inspirent les comportements du Président de la République. Vous vous seriez drapé dans votre vertu, invoquant le manque de respect de la fonction présidentielle, les attaques personnelles et indignes à l'égard du Président de la République française,…
M. Guy Geoffroy. Très bien !
M. Christian Jacob. …un débat et une opposition qui ne seraient pas à la hauteur. Mais ce qui n'est pas à la hauteur, monsieur le Premier ministre, ce sont les comportements légers, inquiétants et dangereux d'un Président Narcisse qui s'est noyé dans un torrent de confidences qui ont abîmé la fonction présidentielle et sa propre image. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.)
M. Sébastien Denaja. Au moins n'est-il pas mis en examen, lui !
M. Christian Jacob. Ce qui n'est pas à la hauteur, c'est un Président qui dévoile des opérations classées secret défense, y compris des attentats ciblés. Ce qui n'est pas à la hauteur, c'est le spectacle sans précédent d'un Premier ministre qui a honte du Président qui l'a nommé ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.)
M. Bruno Le Roux. Il n'est pas un repris de justice !
M. Christian Jacob. La question qui s'impose à ce stade est simple, monsieur le Premier ministre : n'avez-vous pas, vous-même, honte d'être encore le chef du Gouvernement de François Hollande ? Si vous pensez réellement ce que vous avez dit, vous auriez dû démissionner ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Les Républicains.) C'est le minimum de cohérence que l'on attend d'un homme politique qui revendique de ne pas se taire et de nommer les choses.
Mais pour cela, monsieur le Premier ministre, il ne s'agit pas de faire des phrases, il faut avoir du courage. Et une fois de plus, je crains que vous ne soyez plus fort dans le verbe que dans l'action. (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
M. Manuel Valls, Premier ministre. Monsieur le président, Monsieur le président Christian Jacob, c'est vrai, nous sommes à la veille d'un rendez-vous important, celui qui comptera pour le destin du pays, l'élection présidentielle. Votre famille politique est d'ailleurs en train de le préparer. C'est donc l'occasion de dresser un bilan, de comparer et d'ouvrir des perspectives.
Nous avons déjà eu l'occasion d'évoquer ce bilan la semaine dernière, en termes de politique économique, de chiffres du chômage. Même si nous devons rester modestes, rappelons tout de même que nous comptons 90 000 chômeurs de moins depuis le début de l'année. (Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.)
Le vote de la première partie de la loi de finances nous a fourni l'occasion de faire le point sur les baisses d'impôts en faveur des classes moyennes et des couches populaires. Le projet de loi de financement de la Sécurité sociale sera voté tout à l'heure…
M. Sylvain Berrios. Et à part ça, François Hollande, il va bien ?
M. Manuel Valls, Premier ministre. C'est l'occasion de rappeler – car nous y avons travaillé avec la majorité – la mesure relative à la baisse de la CSG pour les retraités.
M. Christian Jacob. Avez-vous honte, monsieur le Premier ministre ?
M. Manuel Valls, Premier ministre. C'est l'occasion également de souligner qu'un État fort, digne de ce nom, est capable d'évacuer dans des conditions dignes, humaines et en même temps fermes, la « jungle » de Calais. (Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.)
M. Christian Jacob. Ça rame !
M. Manuel Valls, Premier ministre. C'est l'occasion de dire, face au malaise des policiers, ce que nous avons fait pour la police et la gendarmerie, contrairement à vous !
M. Guy Geoffroy. Monsieur le président, le Premier ministre peut-il répondre à la question ?
M. Manuel Valls, Premier ministre. Et puisque vous m'y invitez, c'est l'occasion aussi d'affirmer, comme je le fais régulièrement ici, dans les médias ou lors de réunions publiques…
M. Christian Jacob. Faut-il que je rappelle la question ?
M. Manuel Valls, Premier ministre. ...la fierté qui fut la nôtre lorsque le Président de la République décida d'envoyer nos armées sauver le Mali. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain – Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.)
C'est l'occasion de saluer l'action de la France quand il s'est agi de sauver la Grèce menacée de sortir de la zone euro, de saluer, nous allons le faire à la COP22 de Marrakech, le rôle diplomatique joué par la France dans ce rendez-vous essentiel pour l'avenir de la planète, de saluer l'attitude du Président de la République et de tous les responsables politiques face au terrorisme.
Monsieur Jacob, contrairement à vous, je n'ai aucun problème pour assumer ce que nous avons fait depuis 2012. Bien sûr, des erreurs ont été commises et des problèmes se sont posés, mais nous sommes fiers de l'action que nous avons menée.
M. Christian Jacob et M. Guy Geoffroy. Pourquoi la honte ?
M. Philippe Meunier. Partez donc avant qu'il ne soit trop tard !
M. Manuel Valls, Premier ministre. C'est l'occasion aussi de comparer, puisqu'un débat entre les candidats à la primaire de la droite aura encore lieu demain.
M. Christian Jacob. Ce n'est pas du tout la question !
M. Manuel Valls, Premier ministre. Quel est le programme de la droite ? Mettre fin à l'ISF, supprimer entre 300 000 et 700 000 fonctionnaires selon les programmes, ramener l'âge du départ à la retraite à soixante-cinq ans, ce qui signifie concrètement un départ à soixante-dix ans pour ceux qui ont besoin d'une retraite à taux plein.
M. Christian Jacob. On n'attend que ça, la retraite de François Hollande !
M. Philippe Meunier. Combien de chômeurs en plus depuis 2012 ?
M. Manuel Valls, Premier ministre. Voilà quelle doit être la nature du débat, pour nous permettre d'ouvrir des perspectives.
Monsieur Jacob, je vais vous répondre. (« Ah ! » sur les bancs du groupe Les Républicains.) Dans ce moment où notre pays est toujours sous la menace du terrorisme, dans ce moment où nous devons encore lutter contre le chômage de masse, dans ce moment où la parole publique n'a jamais été autant mise en doute, alors que le débat qui est en train de se dérouler voit nombre d'attaques personnelles – je pense notamment à celles qui ont visé François Bayrou et qui ne rehaussent pas, me semble-t-il, le débat… (Rires et exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.)
...le chef du Gouvernement que je suis souhaiterait que les rires, les interpellations, les mises en cause laissent place à la dignité. Le rôle des responsables publics, quels qu'ils soient, est de redonner de la fierté et de l'espérance ! (Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.)
Je vous laisse à vos sarcasmes. Je n'ai qu'une seule boussole, la France et la gauche, la gauche et la France. Je ne veux pas que vous arriviez au pouvoir, car je pense que nous pouvons prolonger ce quinquennat.
M. Philippe Cochet. Ce n'est pas vous qui déciderez, c'est le peuple !
M. Marc Francina. Et le peuple, alors ?
M. Manuel Valls, Premier ministre. Les Français ont besoin de retrouver de l'espoir. Nous le devons au pays, mais ce n'est pas vous qui pourrez le leur proposer ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.)
Auteur : M. Christian Jacob
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Ministères et secrétariats d'état
Ministère interrogé : Premier ministre
Ministère répondant : Premier ministre
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 3 novembre 2016