14ème législature

Question N° 4322
de M. Pouria Amirshahi (Non inscrit - Français établis hors de France )
Question au gouvernement
Ministère interrogé > Intérieur
Ministère attributaire > Intérieur

Rubrique > police

Tête d'analyse > exercice de la profession

Analyse > arrestations. violences. lutte et préventions.

Question publiée au JO le : 03/11/2016
Réponse publiée au JO le : 03/11/2016 page : 6963

Texte de la question

Texte de la réponse

ATTITUDE DES FORCES DE L'ORDRE


M. le président. La parole est à M. Pouria Amirshahi, au titre des députés non inscrits.

M. Pouria Amirshahi. Monsieur le Premier ministre, Adama Traoré est mort le 19 juillet dernier, le jour de son vingt-quatrième anniversaire, dans la cour de la brigade de gendarmerie de Persan. Lorsque sa mère s'est présentée à la gendarmerie, on lui a répondu que son fils était en garde à vue. Il était en fait déjà mort.

Un sapeur-pompier volontaire intervenu dans la caserne de gendarmerie pour tenter de réanimer Adama Traoré a clairement signifié à l'inspection générale de la gendarmerie nationale que, contrairement aux affirmations des gendarmes, non seulement le jeune homme n'avait pas été placé en position latérale de sécurité, mais qu'il n'avait également plus de ventilation. À leur arrivée, les pompiers n'ont détecté aucun pouls et ont dû s'y prendre à deux fois pour obtenir des gendarmes qu'ils lui retirent les menottes afin de procéder au massage cardiaque. Malheureusement, le cœur d'Adama Traoré n'est jamais reparti ; celui de Wissam El-Yamni non plus, qui est décédé à la suite de son interpellation à Clermont-Ferrand, pas plus que celui d'Amadou Koumé, décédé dans un commissariat parisien après son arrestation.

Ce qui choque, ce qui blesse et parfois révolte les familles, au-delà des deuils, c'est qu'il n'est pas mis le même empressement – c'est en tout cas ressenti ainsi – pour établir les faits et permettre la connaissance de la vérité. D'ailleurs, monsieur le Premier ministre, avez-vous vous-même ou un autre membre de votre gouvernement adressé un mot, un message, à la famille de notre jeune compatriote décédé ?

Le fossé se creuse avec les institutions. Il se creuse d'autant plus que, chaque fois, plutôt que la violence, les familles et leurs soutiens choisissent le droit et veulent encore croire en la justice. La lutte contre l'impunité doit concerner tout le monde, monsieur le Premier ministre, y compris et peut-être surtout celles et ceux qui sont dépositaires d'une parcelle du pouvoir et de l'autorité publique.

Monsieur le Premier ministre, vous accordez dans votre discours une grande importance à la police et aux forces de l'ordre. Je veux vous dire qu'avoir un débat national sur les rapports entre État, police, justice et citoyens est salutaire pour notre État de droit. (Applaudissements sur quelques bancs.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur.

M. Bernard Cazeneuve, ministre de l'intérieur. Monsieur le député, dans le contexte particulier que traverse notre pays, qui est le théâtre d'emportements, d'antagonismes et de fractures, je n'aspire qu'à une chose : le respect. Or, le respect commence par la reconnaissance du travail que font les forces de l'ordre pour assurer la protection des Français dans un contexte extrêmement difficile. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain, et sur les bancs du groupe Les Républicains et du groupe de l'Union des démocrates et indépendants.)

M. Joël Giraud. Très bien !

M. Bernard Cazeneuve, ministre. Bien entendu, en tant que ministre de l'intérieur, je souhaite, et j'en fais mon premier devoir, qu'il puisse être rendu compte de chaque sujet sur lequel on nous interpelle. Ce que je ne peux cependant plus accepter, et je vous le dis sans énervement et avec la plus grande franchise, c'est la mise en cause permanente, à longueur de semaine, du travail accompli par les forces de l'ordre (Mêmes mouvements.) ; c'est prôner la théorie selon laquelle la violence est consubstantielle à la police, sans que jamais il n'y ait un mot pour ces policiers qui portent l'uniforme, qui assurent la protection de lieux de culte, qui assurent la protection des Français,…

M. Pierre Lellouche. Très bien !

M. Bernard Cazeneuve, ministre. …et dont un certain nombre sont aujourd'hui hospitalisés et souffrent le martyre après avoir été atteints dans les conditions abjectes que l'on sait. (Mêmes mouvements.)

Je demande donc pour eux, parce qu'ils le méritent, comme les gendarmes qui ont été agressés en Nouvelle-Calédonie, qu'on puisse dire une chose simple : que ces agressions sont inacceptables et que les policiers et les gendarmes de France, en raison de l'uniforme qu'ils portent, sont attachés aux valeurs de la République et à l'État de droit plus que tout autre, parce qu'ils savent ce que signifie l'abandon de ces principes, lequel se traduit par une violence à leur encontre. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain, et sur les bancs du groupe Les Républicains et du groupe de l'Union des démocrates et indépendants.)

Monsieur le député, l'inspection générale de la police nationale et l'inspection générale de la gendarmerie nationale sont saisies à chaque fois que se présente un sujet du type de celui que vous évoquez. Et chaque fois que des tragédies se produisent, que des violences sont constatées, nous faisons en sorte que la vérité soit établie, car c'est aussi l'honneur de la police et du ministère de l'intérieur de le faire. J'appelle donc à abandonner les postures, à cesser de dresser les uns contre les autres, j'appelle à se respecter les uns les autres. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain, et sur les bancs du groupe Les Républicains et du groupe de l'Union des démocrates et indépendants.)