14ème législature

Question N° 4344
de M. Malek Boutih (Socialiste, écologiste et républicain - Essonne )
Question au gouvernement
Ministère interrogé > Premier ministre
Ministère attributaire > Premier ministre

Rubrique > ordre public

Tête d'analyse > terrorisme

Analyse > lutte et prévention.

Question publiée au JO le : 10/11/2016
Réponse publiée au JO le : 10/11/2016 page : 7180

Texte de la question

Texte de la réponse

LUTTE CONTRE LE TERRORISME


M. le président. La parole est à M. Malek Boutih, pour le groupe socialiste, écologiste et républicain.

M. Malek Boutih. Monsieur le Premier ministre, je ne m'adresse pas à vous comme dirigeant de la majorité mais comme Premier ministre de tous les Français.

Les attentats du 13 novembre ont tout changé. D'abord pour les familles des victimes, bien sûr, et les blessés. Pour chaque Français, le 13 novembre c'est le jour où l'on prend conscience, violemment, que la guerre est venue chez nous et peut frapper n'importe lequel d'entre nous.

La France a changé sous les coups qui la frappent aveuglément et injustement. Oui, injustement, parce que rien n'est plus insupportable que d'entendre les explications fallacieuses de ceux qui, au bout du compte, finissent par justifier le terrorisme. Nous ne comprenons pas, nous ne voulons pas comprendre ce qui pourrait expliquer la mort d'un gosse un soir de feu d'artifice.

La France a le droit, a le devoir de se défendre, de se protéger et de poursuivre tous les protagonistes, de la petite main lâche qui fournit les armes aux cerveaux pervers qui planifient l'horreur.

Nos forces de police et de gendarmerie, nos magistrats, nos soldats mènent un combat depuis des mois, jour et nuit, sans relâche. Je voudrais leur dire merci et courage. (Applaudissements sur tous les bancs.)

Face à nos ennemis, la République française a démontré sa force. La plupart des tueurs de ces attaques ont été arrêtés ou mis hors d'état de nuire. L'État islamique, qui veut semer la terreur, est désormais en sursis et assiégé. Son sort n'est plus qu'une question de temps. Enfin et surtout, notre pays, les Français, ont fait preuve d'un courage exemplaire en ne cédant jamais à la panique ou à la peur. Loin de nous mettre à genoux, nos ennemis ont soudé notre pays, ils nous ont rappelé que ce qui nous différencie n'est rien face à ce qui nous unit.

Oui, quand je vois la dignité, la solidarité, la force de notre peuple, je suis tellement fier d'être Français ! (Applaudissements sur tous les bancs.)

Comme vous l'avez dit, monsieur le Premier ministre, ce combat est loin d'être fini : d'autres batailles nous attendent, à l'extérieur de nos frontières comme au cœur de notre territoire. La France doit être au premier rang. Elle ne se venge pas, ne défend pas simplement son territoire. Ce dont il s'agit, c'est de toute l'histoire de la République, du combat pour la liberté, pour la démocratie.

Oui, monsieur le Premier ministre, vous qui êtes en pointe dans ce combat, la France doit vaincre la bête immonde islamiste. (Applaudissements sur tous les bancs.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Manuel Valls, Premier ministre. Monsieur le député Malek Boutih, vous l'avez rappelé, dans quelques jours nous allons saluer la mémoire des victimes du 13 novembre 2015.

Il y a un an, notre pays était frappé par le terrorisme, par la barbarie, par le djihadisme, par l'islamisme radical. Ce jour-là, c'est la France qui a été visée pour ce qu'elle représente aux yeux du monde.

Je pense comme vous aux victimes, aux blessés, à leur famille et à leurs proches. Nous les rencontrons souvent – le Président de la République, le ministre de l'intérieur, la secrétaire d'État chargée de l’aide aux victimes, vous tous, souvent, dans vos circonscriptions. C'est toujours un moment douloureux parce que nous savons qu'eux vivent et vivront toujours avec ces blessures physiques et morales.

Comme vous, j'ai aussi une pensée pour tous ceux, agents de l’État, des collectivités, ou simples citoyens, qui sont venus en aide à ces victimes.

Cette pensée, nous devons l'avoir pour toutes les victimes du terrorisme, car celui-ci a frappé avant le 13 novembre ; il a aussi frappé ensuite et vous avez raison de rappeler que nous vivons, et nous vivrons, avec cette menace constante, permanente. Elle fait partie, d'ailleurs, de la nouvelle donne mondiale que j'évoquais il y a un instant. Nous devons la regarder en face. Nous voyons bien que le monde a changé et que nous devons mener cette guerre que le terrorisme lui-même mène contre nous sur notre sol.

Depuis plusieurs années, nous avons fait beaucoup pour adapter notre pays à cette menace et il faudra poursuivre, avec l'état d'urgence bien sûr, le renforcement de l'arsenal législatif en matière de lutte contre le terrorisme et l'engagement de nos soldats au Levant et au Sahel. Nous savons que cet effort devra être poursuivi pendant plusieurs années, car c'est l'affaire d'une génération.

Mais lutter contre le terrorisme et plus généralement faire face à l'histoire qui est en train de s'écrire, c'est mobiliser toute la société et tous nos citoyens. Nous le savons, la douleur profonde qui a suivi le 13 novembre, la sidération qui nous a frappés après l'attentat de Nice, rien de cela ne s'est estompé, mais attention : nous sommes sortis d'une période d'insouciance et il est normal que les responsables publics, tout comme le peuple, aient envie de tourner cette page – de fermer cette parenthèse dramatique et sanglante.

Attention aussi aux peurs qui s'enracinent, qui prennent le dessus, qui divisent : c'est un poison pour la société française. Et je veux dire ma détermination, notre détermination, ici sur tous les bancs, à lutter contre ce poison. Nous ne laisserons pas et nous ne devons pas laisser le terrorisme diviser notre pays. Nous ne devons pas laisser le terrorisme fragiliser notre société. Nous ne devons pas laisser le terrorisme fissurer notre démocratie et notre République. Et nous devons tous mener ce combat de front, en défendant sans cesse nos valeurs, en tenant un discours de responsabilité et de courage quelles que soient les circonstances.

Monsieur le député, vous avez raison de nommer les choses : cette jeunesse qui, dans certains de nos quartiers populaires, est à la dérive ; cette confusion entre la délinquance et le terrorisme ; cet islamisme, cet islam politique qu'on a laissé prospérer. Nous devons le dire avec d'autant plus de force que nous devons aider et protéger nos compatriotes musulmans qui sont une part de notre identité nationale. Nous devons tout faire pour assurer la sécurité des Français.

Alors, oui, soyons fiers et dignes de nos valeurs, de nos principes fondamentaux, de ce qui est au cœur de la République.

J'ai une conviction que je partage avec vous tous : la société française, malgré les doutes, malgré les peurs, a en son sein tous les atouts pour sortir victorieuse de cette épreuve ; tous les atouts pour vaincre les menaces de la période qui s'ouvre ; tous les atouts aussi pour en saisir les opportunités.

Parmi ces opportunités, il y a le dialogue, la jeunesse, le métissage d'une partie de notre société, nos quartiers populaires, la culture, nos intellectuels, notre modèle républicain, la laïcité, l'égalité entre les femmes et les hommes : il y a tout simplement la France. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain et du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.)

Forts de ces atouts, étant capables de nous rassembler et d'élever le débat public, oui, nous serons capables de surmonter les épreuves et de vaincre la bête immonde. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain et du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste, et sur quelques bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)