Question au Gouvernement n° 4374 :
réglementation

14e Législature

Question de : M. Jacques Krabal
Aisne (5e circonscription) - Radical, républicain, démocrate et progressiste

Question posée en séance, et publiée le 17 novembre 2016


TRAVAILLEURS DÉTACHÉS

M. le président. La parole est à M. Jacques Krabal, pour le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.

M. Jacques Krabal. Monsieur le Premier ministre, depuis le début de cette législature, les débats sur les travailleurs détachés n'ont pas manqué. Traité par la loi du 10 juillet 2014 visant à lutter contre la concurrence sociale déloyale, le sujet a été à nouveau débattu dans le cadre de la loi travail et de la loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques. Il est cependant toujours d'actualité.

Le 4 juillet, monsieur le Premier ministre, vous avez émis la possibilité de ne plus appliquer la directive européenne sur les travailleurs détachés. Favoriser la libre circulation des biens et des personnes est une chose, mais lutter contre le dumping social en est une autre.

M. Paul Giacobbi. Tout à fait !

M. Jacques Krabal. Cette lutte est indispensable pour faire reculer le chômage et la précarité : les secteurs du bâtiment, des travaux publics, du transport, de l'agriculture, et maintenant les entreprises multinationales voire les majors de notre économie sont concernés.

Ce dispositif provoque une concurrence déloyale entre les entreprises et fait des ravages dans le monde des salariés et des ouvriers, alors que le chômage demeure très élevé et que le nombre de travailleurs déplacés ne cesse d'augmenter : il s'élevait en 2015 à 286 000, en hausse de 25 %. Il est vrai que les contrôles se sont multipliés, ce qui a abouti à davantage de déclarations. C'est bien, mais les objectifs doivent être de voir le nombre de travailleurs détachés diminuer et de favoriser l'embauche de nos chômeurs.

Ce système crée la désespérance chez nos ouvriers : pour faire reculer la peur du déclassement, mettons tout en œuvre pour protéger nos salariés. Ce sont ces mêmes employés et ouvriers qui, hier, aux États-Unis ont manifesté leur colère contre un système trop éloigné de leurs préoccupations.

Alors, monsieur le Premier ministre, où en est-on de l'évolution de ce dispositif ? De la mise en place d'un salaire égal pour un travail identique ? De la question de la durée du détachement ?

N'oublions pas ce qu'écrivait Jean de La Fontaine, originaire de Château-Thierry, dans la fable Les Deux Taureaux et une Grenouille : « Hélas ! on voit que de tout temps / Les petits ont pâti des sottises des grands. » (Applaudissements sur les bancs du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.)

Mme Isabelle Attard. Bravo !

M. le président. La parole est à Mme la ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.

Mme Myriam El Khomri, ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social. Monsieur le député, je connais votre territoire et ses problématiques, pour m'être notamment rendue à Villers-Cotterêts. Je connais également les aspirations de vos concitoyens, en particulier de ceux qui sont au chômage. Aussi, je tiens à vous répondre très clairement sur le sujet que vous évoquez.

Nous sommes tous attachés à la liberté de circulation des travailleurs européens. Ce qui mine notre modèle social, ce qui crée de la concurrence déloyale et porte atteinte à la dignité des travailleurs européens, ce sont les fraudes au détachement.

Au niveau européen, un combat doit être mené pour obtenir une révision de la directive de 1996. Ce texte, pensé il y a vingt ans, ne répond plus à la situation actuelle. La France soutient la proposition de la Commission européenne visant à promouvoir le principe « à travail égal, salaire égal dans le même lieu » et à ajouter l'hébergement au noyau dur des règles. En cela, elle lutte pour une plus grande dignité des travailleurs dans l'espace européen.

Nous souhaitons toutefois aller au-delà, en interdisant les entreprises « boîtes aux lettres » et essayons de rallier d'autres pays européens en vue du conseil des ministres européen, qui se tiendra en décembre prochain sur cette question. Il s'agira aussi de mettre en place les propositions de la Commission européenne, selon un tempo que nous tentons d'accélérer.

Sur le plan national, après la loi Savary, la loi Macron… (Rires et exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains)

M. Sylvain Berrios et M. Alain Marty. Macron est-il d'accord avec vous ?

Mme Myriam El Khomri, ministre. …et la loi travail, nous avons renforcé les contrôles : trente chantiers ont été suspendus. Ces mesures sont particulièrement importantes mais je conçois comme vous, mesdames et messieurs les députés, que l'Europe sociale ne se décrète pas et qu'il faut réviser la directive de 1996. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.)

M. Jacques Krabal. Très bien !

Données clés

Auteur : M. Jacques Krabal

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Travail

Ministère interrogé : Travail, emploi, formation professionnelle et dialogue social

Ministère répondant : Travail, emploi, formation professionnelle et dialogue social

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 17 novembre 2016

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