14ème législature

Question N° 4495
de M. Pascal Cherki (Socialiste, écologiste et républicain - Paris )
Question au gouvernement
Ministère interrogé > Premier ministre
Ministère attributaire > Premier ministre

Rubrique > politique extérieure

Tête d'analyse > Grèce

Analyse > dette publique. attitude de la France.

Question publiée au JO le : 22/12/2016
Réponse publiée au JO le : 22/12/2016 page : 9067

Texte de la question

Texte de la réponse

SOUTIEN À LA GRÈCE


M. le président. La parole est à M. Pascal Cherki.

M. Pascal Cherki. Monsieur le Premier ministre, le 14 décembre dernier, le porte-parole de la présidence de l'Eurogroupe annonçait que le Mécanisme européen de solidarité – MES – avait décidé de suspendre unilatéralement, à la demande de certains pays, dont l'Allemagne, les mesures d'allégement de la dette de la Grèce.

Ces pays, dirigés par des amis politiques de M. Fillon (Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains), reprochent au gouvernement grec de M. Tsipras d'avoir décidé de verser un troisième mois de pension aux petites retraites afin d'éviter que des centaines de milliers de retraités modestes ne basculent dans la pauvreté.

M. Yann Galut. Bravo !

M. Pascal Cherki. Ils reprochent également à M. Tsipras d'avoir décidé de reporter la hausse de la TVA dans les îles de la mer Égée où s'entassent plus de 15 000 migrants qui attendent aux portes de l'Europe de pouvoir être dignement accueillis.

Ainsi, la solidarité européenne tant appelée de nos vœux se résume pour certains pays à se comporter envers le peuple grec et son gouvernement comme de vulgaires prêteurs sur gage.

Ce refus d'accorder un allégement de la dette est une insulte faite aux Grecs. Heureusement, la France a dénoncé cette décision. Michel Sapin a rappelé à juste titre qu'elle contrevenait à la décision d'allégement sans condition de la dette grecque prise lors de la dernière réunion des ministres des finances de la zone euro.

Le 15 décembre dernier, le Président de la République a dénoncé cette décision et a affirmé son plein et entier soutien au gouvernement de M. Tsipras.

M. Razzy Hammadi. Très bien !

M. Pascal Cherki. Aussi je vous demande, monsieur le Premier ministre, de bien vouloir indiquer à la représentation nationale quelles initiatives la France entend prendre dans les prochains jours pour infirmer la décision de la présidence de l'Eurogroupe ? Et, à moyen terme, de nous indiquer également quelles initiatives la France entend prendre pour convaincre ses partenaires européens d'annuler une partie encore plus substantielle de la dette de la Grèce ?

Monsieur le Premier ministre, vous le savez bien, la Grèce ne pourra jamais rembourser la totalité de sa dette qui représente aujourd'hui 180 % de son PIB. La cohésion de l'Europe passe par l'annulation d'une partie substantielle de la dette de la Grèce et plus généralement par la mutualisation de la dette des pays européens, au risque sinon de voir les peuples tourner encore plus le dos à l'Europe. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

M. André Chassaigne. Excellent !

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Bernard Cazeneuve, Premier ministre. Monsieur le député, la France a été en permanence aux côtés de la Grèce au cours des derniers mois, des dernières années par l'impulsion et l'attention portées par le Président de la République à la situation de ce pays, mais également pour des raisons qui tenaient à la cohésion de la zone euro, à la nécessité de maintenir l'intégrité, l'unité, l'indivisibilité de la zone euro dans un contexte de crise particulier. Mais nous n'avons pas simplement été aux côtés de la Grèce sur la question de son redressement, nous l'avons été aussi lorsque ce grand pays était confronté à des flux migratoires extrêmement importants qui déstabilisaient son économie et le mettaient en face d'épreuves extrêmement difficiles auxquelles il n'était pas en situation de faire face seul.

La France a été le pays de l’Union européenne qui a mobilisé le maximum de moyens en Grèce pour aider ce pays à mettre en place des dispositifs d'accueil des migrants. Elle a été le premier pays de l’Union européenne à respecter, à partir de la Grèce, les dispositifs de relocalisation. Elle l'a fait avec une grande fierté pour des raisons qui tiennent à la solidarité historique qui unit notre pays à la Grèce, et au fait que, sous le quinquennat de François Hollande, la France a, en Europe, incarné la volonté de faire preuve de plus de solidarité et d'avoir plus de croissance. En faisant ce que nous avons fait pour la Grèce, nous avons agi pour l'Europe.

M. Christian Jacob. Avec un tel bilan, pourquoi alors, ne se représente-t-il pas ? (Sourires sur les bancs du groupe Les Républicains.)

M. Christian Jacob. Dommage que les socialistes n'en veuillent plus ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.)

M. le président. Monsieur Jacob.

M. Bernard Cazeneuve, Premier ministre. Lors de la réunion de l'Eurogroupe du 5 décembre dernier, il a été décidé d'envisager la réduction ou la renégociation de la dette à court terme de la Grèce.

Le Premier ministre Tsipras a décidé au début du mois de décembre d'octroyer aux retraités les plus modestes une prime, justifiée par les efforts faits par ces retraités, et par ailleurs de différer l'augmentation de la TVA pour les îles qui avaient été l'objet de la pression migratoire. Il l'a fait dans des conditions dont la France pense qu'elles ne remettent en rien en cause les objectifs que la Grèce se devait d'atteindre compte tenu des engagements qu'elle avait pris devant l’Union européenne.

Vous nous demandez ce que nous allons faire…

M. Christian Jacob. Rien !

M. Bernard Cazeneuve, Premier ministre. …pour que ce qui a été décidé le 5 décembre soit appliqué. Nous allons faire ce qu'ont toujours fait Michel Sapin, le Président de la République…

M. Philippe Briand. C'est-à-dire laisser tomber.

M. Bernard Cazeneuve, Premier ministre. …c'est-à-dire agir au sein de l’Union européenne pour que les faits soient rétablis, pour que les pays de l’Union européenne aient des positions équilibrées et justes et pour que la Grèce soit soutenue par l’Union européenne, et au premier rang par le Gouvernement français qui convaincra, j'en suis certain, l’Union européenne d'aller dans cette direction.

Je veux conclure ma réponse en vous disant très simplement, monsieur le député, que la France sera aux côtés de la Grèce pour son redressement,…

M. Claude Goasguen. Elle est sauvée, alors !

M. Christian Jacob. On est rassurés !

M. Bernard Cazeneuve, Premier ministre. …qu'elle a toute confiance dans la capacité de la Grèce à assumer ses responsabilités et toute confiance dans la capacité de l’Union européenne de le reconnaître.

Sur un sujet aussi grave, j'aimerais que l'opposition soit pour une fois dans la responsabilité (Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains) car si on vous avait écoutés, mesdames et messieurs de l'opposition, la Grèce ne serait plus aujourd'hui dans la zone euro et aurait été livrée à son sort. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain. – Vives exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.) Si la politique que vous voulez mener demain au sein de l’Union européenne est une politique d'abandon des plus faibles au détriment de l'esprit solidaire de l'Union, vous nous aurez face à vous,...

M. Daniel Fasquelle. Lamentable !

M. Bernard Cazeneuve, Premier ministre. …et ce combat face à vous, nous le gagnerons ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.)

M. Sébastien Huyghe. Menteur !