14ème législature

Question N° 45921
de M. Marc Le Fur (Union pour un Mouvement Populaire - Côtes-d'Armor )
Question écrite
Ministère interrogé > Budget
Ministère attributaire > Budget

Rubrique > ventes et échanges

Tête d'analyse > commerce électronique

Analyse > opérations transfrontalières. fraude fiscale. lutte et prévention.

Question publiée au JO le : 10/12/2013 page : 12793
Réponse publiée au JO le : 18/03/2014 page : 2637

Texte de la question

M. Marc Le Fur attire l'attention de M. le ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget, sur le coût de la fraude à la TVA liée au commerce en ligne. Ainsi un rapport du Sénat rédigé par la commission des finances sur la fraude fiscale estime à quelques milliards d'euros par an l'évaporation de TVA liée au commerce en ligne. En effet ce commerce en ligne est en plein essor, son chiffre d'affaires est estimé à 45 milliards d'euros par an, mais ses spécificités favorisent la fraude : anonymat, transformation permanente des sites, morcellement des envois... Face à cela, l'administration ne bénéficie pas de moyens adaptés pour lutter contre cette fraude à la TVA. La perte est particulièrement nette sur les envois provenant de pays extérieurs à l'Union européenne et notamment l'Asie pour lesquels les droits et les taxes ne sont pas recouvrés à leur juste niveau. Ainsi seuls 5,5 millions d'euros ont été redressés cette année à Roissy, où transitent la majorité des envois extra-communautaires, sur 1,3 milliards de droits et taxes collectés. Le biais du système vient du fait que le calcul des droits et taxes à l'importation repose sur un régime purement déclaratif. La sous-valorisation des colis permet alors souvent de passer sous la franchise de 22 euros en deçà de laquelle les biens sont exonérés de TVA. Il lui demande donc de préciser sa position sur cette question et de lui indiquer quelles solutions le Gouvernement souhaite proposer pour renforcer la lutte contre la fraude et pour réduire le montant de cette perte dans les recettes de l'État.

Texte de la réponse

D'une manière générale, la problématique du contrôle du fret express et du fret postal s'explique par la volumétrie significative des flux concernés (plusieurs dizaines de millions de colis/an) mise en rapport avec le temps très court imparti aux services douaniers pour les traiter. Dans ce cadre, il semble nécessaire de rappeler les spécificités propres à chaque type de flux. En fret express, les déclarations en douane sont dématérialisées via delt@ X, ce qui permet le ciblage des marchandises par un moteur automatisé (« RMS » risk management system) facilitant la réalisation de contrôles lors du dédouanement. Le fret postal présente quant à lui deux spécificités complexifiant la réalisation des contrôles : d'une part, les déclarations en douane ne sont pas dématérialisées, ce qui empêche leur ciblage automatisé par RMS et, d'autre part, les obligations déclaratives sont allégées, ce qui limite la réalisation d'analyses de risques. L'analyse de risques et les contrôles sur les vecteurs fret express et fret postal sont effectués par des cellules de ciblage spécialisées, principalement localisées sur les plates-formes aéroportuaires. Si l'action de ces services se concentre actuellement sur des enjeux de lutte contre la fraude (LCF), la mission fiscale n'est pas négligée pour autant. À titre d'exemple, le bureau de douane de Lyon aéro Saint-Exupéry réalise un ciblage portant à 60 % sur des enjeux LCF et à 40 % sur des enjeux fiscaux. Par ailleurs, le montant cumulé des droits et taxes redressés en 2013, par les trois principaux bureaux de contrôle en fret express et postal s'élève à 1 260 827 €. La direction générale des douanes et droits indirects (DGDDI) structure sa mission de contrôle des flux express et postaux notamment autour des outils suivants : - RMS : moteur de ciblage automatique permettant de cibler les flux de marchandise en fret express. Concernant le fret postal, la DGDDI mène une politique incitative auprès de la Poste pour le recours au dédouanement électronique, pré-requis à l'automatisation et la mécanisation de l'analyse de risques ; - Cyberdouane : cellule rattachée à la direction nationale du renseignement et des enquêtes douanières (DNRED) qui mobilise dix analystes en cybercriminalité. Ces agents effectuent une veille sur internet, qui consiste essentiellement à identifier les personnes physiques ou morales qui agissent de manière anonyme derrière un site de vente en ligne et à cartographier les fraudes complexes. Les éléments à charge sont transmis au parquet pour saisine du service national de la douane judiciaire (SNDJ) ou sont communiqués aux services d'enquête spécialisés de la DNRED. La douane judiciaire dispose d'un outil juridique supplémentaire - la commission rogatoire internationale - qui lui permet de contourner efficacement l'obstacle lié aux hébergeurs localisés à l'étranger et couvrant des activités illégales ; - coopération avec la direction générale des finances publiques et la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGFiP/DGCCRF) : organisées autour de protocoles, ces coopérations permettent d'augmenter et de fluidifier l'échange d'informations entre directions et ainsi d'optimiser les techniques de ciblage ; - pouvoirs des agents DGDDI : le dispositif des « coups d'achat » créé en 2011 permet aux agents des douanes, sur autorisation du Procureur, de procéder anonymement à des achats de marchandises illicites ou fortement taxées, pour identifier les acteurs de la fraude (art. 67 bis I du code des douanes). Les évolutions suivantes pourraient être de nature à optimiser l'action de contrôle de la DGDDI en la matière : - faire évoluer le système informatique (SI) de la DGDDI pour permettre la réalisation de contrôles ex post. La mise en oeuvre de tels contrôles permettrait d'une part, aux agents de gérer la volumétrie des flux en remontant sur les antériorités d'un opérateur et, d'autre part, un traitement fiscal efficace des infracteurs. Dans cette perspective, la DGDDI travaille sur une refonte de l'outil Delt@-X destinée à compléter les informations mises à disposition des services de contrôle. Ces dernières pourront être utilisées dans le cadre d'une analyse de risques plus fiable visant à mieux cibler les opérations à risques et à programmer des contrôles ex post ; - remise en question des exemptions et allègements dont bénéficient le fret express et le fret postal : la Commission européenne travaille actuellement sur cette thématique. Des modifications sont attendues dans le domaine de la sûreté-sécurité mais également dans d'autres domaines (représentation en douane, formalités de dédouanement...). Dans l'attente d'une modification des dispositions d'application du code des douanes communautaire en ce sens, toute modification législative élaborée au niveau national semble prématurée et source éventuelle de divergences réglementaires entre les États membres de l'Union européenne ; - instaurer un système d'échange automatique d'informations avec les opérateurs du fret express et du fret postal. La proposition de loi tendant à renforcer la lutte contre la contrefaçon, définitivement adoptée par le Parlement le 26 février 2014, prévoit l'insertion au code des douanes d'une disposition permettant un traitement automatisé des données ainsi collectées, dans le cadre de la recherche d'activités de nature délictuelle.