14ème législature

Question N° 4632
de M. Christophe Léonard (Socialiste, écologiste et républicain - Ardennes )
Question au gouvernement
Ministère interrogé > Transports, mer et pêche
Ministère attributaire > Transports, mer et pêche

Rubrique > transports routiers

Tête d'analyse > transport de marchandises

Analyse > réglementation.

Question publiée au JO le : 08/02/2017
Réponse publiée au JO le : 08/02/2017 page : 778

Texte de la question

Texte de la réponse

DUMPING SOCIAL DANS LES TRANSPORTS ROUTIERS EN EUROPE


M. le président. La parole est à M. Christophe Léonard, pour le groupe socialiste, écologiste et républicain.

M. Christophe Léonard. Ma question s'adresse à M. le secrétaire d'État aux transports. « La France est ma patrie, l'Europe est notre avenir », aimait à rappeler le président François Mitterrand. L'avenir radieux s'est depuis passablement assombri : le Brexit en témoigne ! La montée de l'extrême droite et de l'abstention aussi ! L'austérité budgétaire européenne est passée par là. C'est pourquoi, avec d'autres, je considère qu'il est urgent de refonder l'Europe autour de la défense, de l'énergie, d'un plan massif d'investissements et d'une nouvelle gouvernance de la zone euro pour réussir enfin l'harmonisation fiscale et sociale.

À titre d'exemple, le dumping social exerce une tension extrême dans le transport routier de marchandises. Ce sujet est tout sauf anecdotique puisque cela concerne 600 000 emplois en France, répartis dans 40 000 entreprises et, en particulier, 2 722 salariés dans le département des Ardennes. Victimes du cabotage illégal, comme du cabotage légal d'ailleurs, mais aussi de la prolifération des véhicules inférieurs à 3,5 tonnes non astreints à la réglementation européenne sur le temps de conduite et de repos, les entreprises françaises ferment les unes derrière les autres.

Les solutions existent pourtant. En avril dernier, la commission des transports du Parlement européen a ainsi adopté un texte volontariste prônant la création d'une agence européenne de contrôle dans le transport routier de marchandises. La question du contrôle est de fait cruciale pour lutter contre le dumping social et fiscal, le travail détaché et donc pour sauvegarder le made in France.

Mais contrôler les entreprises qui fraudent et les donneurs d'ordres complices suppose des fonctionnaires pour effectuer ces contrôles en toute impartialité. C'est pourquoi je doute que la solution pour la France soit les « moins 500 000 fonctionnaires » comme le prônent par certains.

Monsieur le secrétaire d'État, le 31 janvier dernier, à votre initiative, se sont réunis à Paris l'Allemagne, l'Autriche, la Belgique, le Danemark, la France, l'Italie, le Luxembourg, la Norvège et la Suède pour lancer un plan d'action dénommé « Alliance du routier ». Pouvez-vous nous dire concrètement ce qu'il faut en attendre ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé des transports, de la mer et de la pêche.

M. Alain Vidalies, secrétaire d'État chargé des transports, de la mer et de la pêche. Monsieur le député, le transport routier de marchandises en Europe est aujourd'hui victime d'une concurrence déloyale, dont vous avez cité un certain nombre d'exemples. Cela est vrai de la fraude sophistiquée consistant à équiper les camions de systèmes de chronotachygraphes truqués. Cela est vrai également du non-respect des règles sociales sur le temps de travail : chacun a pu observer, sur les parkings, des conducteurs passant tout le week-end dans la cabine de leur camion. Cela est vrai aussi de l'utilisation massive de véhicules de moins de 3,5 tonnes pour contourner les règles sur le cabotage. Tout cela est une réalité à laquelle l'ensemble de nos pays sont confrontés.

J'ai réuni huit pays européens la semaine dernière pour adresser un message très clair à la Commission. Dans cette situation, s'il n'y a pas de réponse européenne, alors ceux qui prônent le repli à l'intérieur les frontières nationales l'emporteront. Nous ne voulons pas une Europe de la loi de la jungle ; nous voulons une Europe qui soit un marché, mais dans lequel les règles de la concurrence sont équilibrées par le respect des règles sociales. Voilà le message que nous avons voulu, avec cette « Alliance du routier », adresser à la Commission.

Avec Myriam El Khomri, nous nous sommes rendus au Parlement européen, il y a quelques semaines, pour porter ce message. Je le dis très clairement à la Commission : avec les autres pays, nous n'accepterons pas une nouvelle étape de libéralisation du transport routier s'il n'y a pas, préalablement, un règlement sur la question sociale. Avec cet exemple, c'est toute une conception de l'Europe que nous voulons affirmer : l'une Europe est certes un marché, mais elle partage également des valeurs, notamment des valeurs sociales. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.)