Question de : M. Yann Galut
Cher (3e circonscription) - Socialiste, écologiste et républicain

M. Yann Galut alerte Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur les moyens légaux laissés aux propriétaires pour répondre à l'occupation illicite de leur résidence secondaire. Lorsqu'un propriétaire ou locataire constate l'occupation de son domicile principal ou secondaire meublé et occupé momentanément ou quotidiennement, les forces de police, conformément à la jurisprudence actuelle sur le flagrant délit, ne pourraient expulser les occupants illégaux que durant les quarante-huit premières heures. Dans le cas contraire, la victime ne peut pas faire immédiatement expulser les occupants et c'est l'article 61 de loi du 9 juillet 1991 portant réforme des procédures civiles d'exécution qui s'applique. Celui-ci dispose : « Sauf disposition spéciale, l'expulsion ou l'évacuation d'un immeuble ou d'un lieu habité ne peut être poursuivie qu'en vertu d'une décision de justice ou d'un procès-verbal de conciliation exécutoire et après signification d'un commandement d'avoir à libérer les locaux ». Dans ce cas, le propriétaire ou le locataire doit alors engager de longues démarches administratives et judiciaires avant de pouvoir réintégrer son domicile. Bien que le vol de domicile, sanctionné par l'article 226-4 du code pénal, soit caractérisé, la victime se voit dans l'impossibilité d'agir dans les plus brefs délais et se trouve bien souvent démuni face à de tels faits de violence. Aussi, il souhaite connaître les mesures que le Gouvernement envisage afin de répondre à ces situations.

Réponse publiée le 1er juillet 2014

L'article 226-4 du code pénal réprime l'occupation illicite du domicile d'autrui. Ce texte dispose en effet qu'est puni d'une peine d'un an d'emprisonnement et de quinze mille euros d'amende le fait de s'introduire ou de se maintenir dans le domicile d'autrui à l'aide de manoeuvres, menaces, voies de fait ou contrainte, hors les cas où la loi le permet. L'article 226-4 du code pénal n'a pas pour objet de garantir d'une manière générale la propriété immobilière contre une usurpation, qui relève des dispositions civiles, mais de protéger le domicile en tant qu'élément encadrant et protégeant un lieu de vie privé, justifiant une protection juridique plus rigoureuse au moyen du droit pénal (Cour de cassation, chambre criminelle, 22 janvier 1997). Contrairement au vol, qui constitue une atteinte aux biens, l'infraction de violation de domicile est d'ailleurs réprimée dans le code pénal au titre des atteintes à la personne humaine, et en particulier des atteintes à la personnalité. La jurisprudence constante et ancienne de la Cour de cassation considère ainsi que « le domicile ne désigne pas seulement le lieu où une personne a son principal établissement, mais encore le lieu, qu'elle y habite ou non, où elle a le droit de se dire chez elle, quel que soit le titre juridique de son occupation et l'affectation donnée aux locaux » (arrêt du 26 février 1963), et qu'il peut s'agir d'un local d'habitation, d'une chambre d'hôtel, ou bien encore d'une tente ou d'une caravane de vacanciers. En outre, la jurisprudence n'a pas hésité à assimiler au domicile des lieux affectés à l'usage d'une profession, comme par exemple un cabinet dentaire (Cour de cassation, chambre criminelle, 13 octobre 1986). En revanche, dans sa jurisprudence, la Cour de cassation estime que quand bien même les squatteurs s'introduisent par effraction dans un appartement, ils ne commettent pas de violation de domicile, si l'appartement est vide de meubles, que ce soit parce que l'immeuble vient d'être achevé, ou parce que l'on se trouve dans l'intervalle entre deux locations, ou bien encore parce que l'immeuble est promis à une démolition. Pour qu'il y ait violation de domicile, il faut non seulement que le local corresponde à la définition donnée du domicile par la Cour de cassation, mais encore que l'auteur se soit introduit ou maintenu dans le domicile à l'aide de manoeuvres, menaces, voies de fait, ou contrainte. Les manoeuvres recouvrent tout procédé astucieux ou ruse, comme par exemple le fait de se présenter sous une qualité usurpée. Les menaces correspondent à une attitude inquiétante ou à des paroles d'une personne prête à accomplir des actes de violence. La voie de fait est un acte de violence pouvant être dirigé contre les biens ou contre les personnes. Enfin, la contrainte se rapporte à toute situation où le consentement de l'occupant ne serait pas libre. Il ne peut donc y avoir violation de domicile que si la personne ne bénéficiait pas de l'autorisation de l'occupant afin de s'introduire ou de se maintenir à l'intérieur. L'infraction de violation de domicile est un délit continu : tant que la personne se maintient dans les lieux selon les conditions ci-dessus définies, les services de police ou de gendarmerie peuvent diligenter une enquête dans le cadre de la flagrance. Cela leur permet notamment l'arrestation de l'auteur de l'infraction, dans les lieux, entre 6 heures et 21 heures, et son placement en garde à vue afin que des poursuites pénales puissent être diligentées. Ainsi, les légitimes propriétaires peuvent aussitôt récupérer l'usage de leur bien qualifié de domicile. En outre, en matière civile, l'article 38 de la loi n° 2007-290 du 5 mars 2007 instituant le droit au logement opposable et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale prévoit un dispositif qui permet aux victimes de personnes qui se sont introduites dans leur domicile, en leur absence, de reprendre rapidement possession des lieux. Le texte dispose : « En cas d'introduction et de maintien dans le domicile d'autrui à l'aide de manoeuvres, menaces, voies de fait ou de contrainte, le propriétaire ou le locataire du logement occupé peut demander au préfet de mettre en demeure l'occupant de quitter les lieux, après avoir déposé plainte, fait la preuve que le logement constitue son domicile et fait constater l'occupation illicite par un officier de police judiciaire. La mise en demeure est assortie d'un délai d'exécution qui ne peut être inférieur à vingt-quatre heures. Elle est notifiée aux occupants et publiée sous forme d'affichage en mairie et sur les lieux. Le cas échéant, elle est notifiée au propriétaire ou au locataire. Lorsque la mise en demeure de quitter les lieux n'a pas été suivie d'effet dans le délai fixé, le préfet doit procéder à l'évacuation forcée du logement, sauf opposition du propriétaire ou du locataire dans le délai fixé pour l'exécution de la mise en demeure ». Il n'est pas envisagé dans ces conditions de modifications du dispositif législatif en vigueur.

Données clés

Auteur : M. Yann Galut

Type de question : Question écrite

Rubrique : Droit pénal

Ministère interrogé : Justice

Ministère répondant : Justice

Dates :
Question publiée le 4 février 2014
Réponse publiée le 1er juillet 2014

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