Question de : M. Edouard Philippe
Seine-Maritime (7e circonscription) - Les Républicains

M. Edouard Philippe attire l'attention de M. le ministre de l'économie et des finances sur les conditions dans lesquelles le pouvoir adjudicateur peut, à l'occasion de la mise en œuvre des procédures de passation prévues au code des marchés publics, prévenir d'éventuels conflits d'intérêt entre les entreprises attributaires d'un marché public et plus généralement s'assurer qu'elles accomplissent leurs prestations en toute indépendance. Il est en effet fréquent qu'à l'occasion d'une opération de construction d'un ouvrage public le maître d'ouvrage s'entoure d'assistants à maîtrise d'ouvrage. Ceux-ci sont notamment chargés de réaliser des études préliminaires, de concevoir sur le plan technique les dossiers de consultation remis aux candidats à l'attribution des marchés de services et de travaux ultérieurs, d'émettre des avis sur les offres remises par ces candidats, puis éventuellement d'assurer le suivi, le contrôle et la validation des prestations réalisées par les titulaires de certains de ces marchés. La fiabilité des prestations d'assistance ainsi effectuées suppose que ces assistants à maîtrise d'ouvrage n'entretiennent avec les candidats sur lesquels ils expriment une appréciation, et les titulaires des marchés dont ils suivent l'exécution, aucun lien de nature à les influencer dans l'accomplissement de leur mission auprès du maître d'ouvrage. Il souhaiterait que lui soit précisé si les articles 45 et 52 du code des marchés publics et l'arrêté du 28 août 2006 autorisent un pouvoir adjudicateur à exiger des candidats à l'attribution d'un marché de travaux ou de services la production de documents, portant par exemple sur l'actionnariat de la société ou l'existence de liens contractuels, de nature à établir l'absence de lien entre le candidat et le titulaire d'un marché d'assistance à maîtrise d'ouvrage en cours d'exécution, puis, le cas échéant, à écarter au stade des candidatures les candidats qui, alors même qu'ils satisfont les niveaux de capacité professionnelles et financières requis, ne parviendraient pas à faire la preuve de leur indépendance.

Réponse publiée le 20 septembre 2016

Le maître d'ouvrage peut recourir à une assistance à maîtrise d'ouvrage afin de le conseiller pour la définition de ses besoins. L'assistant à maîtrise d'ouvrage (AMO) peut en outre se voir confier, le cas échéant, dans les conditions fixées par la loi no 85-704 du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise d'ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d'œuvre privée, une mission d'assistance générale à caractère administratif, financier et technique portant notamment sur la passation de marchés publics. Dans cette hypothèse, l'AMO ne peut toutefois se substituer au maître de l'ouvrage, qui reste seul compétent pour prendre les décisions émanant de la procédure de passation. L'AMO doit, lorsqu'il participe au déroulement de la procédure de passation, éviter tout conflit d'intérêts. Pour autant, l'AMO peut collaborer ponctuellement avec l'un des candidats au marché, pourvu que l'égalité entre les candidats ait été préservée (CE, 24 juin 2011, Sté Autostrade, req no 347720). En particulier,  l'AMO ne doit pas fournir à certains candidats des informations privilégiées susceptibles de les avantager pour l'élaboration de leurs offres ou restreindre l'accès au marché en définissant le besoin ou les spécifications techniques (CJCE, 3 mars 2005, Fabricom SA, aff. C-21/03 et C-34/03). Ces principes sont rappelés dans la nouvelle directive no 2014/24/UE du 26 février 2014 sur la passation des marchés publics. En outre, l'AMO et les candidats à la procédure de passation ne doivent pas, par la mise en œuvre d'une pratique concertée, contrevenir aux dispositions du code de commerce prohibant les ententes anticoncurrentielles. Afin de s'assurer qu'aucun lien susceptible de mettre en cause l'impartialité de l'AMO n'existe, le pouvoir adjudicateur ne peut toutefois exiger des candidats la production de documents portant sur l'actionnariat de la société ou permettant d'établir les liens juridiques éventuels entre le candidat et le titulaire d'un marché d'assistance à maîtrise d'ouvrage (CAA Paris, 6 novembre 2001, Commune de Saint-Maur-des-Fossés, req no 99PA04215). En effet, à l'appui des candidatures, le pouvoir adjudicateur ne peut exiger des candidats que des renseignements ou documents permettant d'évaluer leur expérience, leurs capacités professionnelles, techniques et financières ainsi que des documents relatifs aux pouvoirs des personnes habilitées à les engager (article 45-I du code des marchés publics). La vérification de ces garanties par le pouvoir adjudicateur ne peut s'effectuer qu'au regard des seuls renseignements ou documents prévus à l'article 1er de l'arrêté du 28 août 2006 fixant la liste des renseignements et des documents pouvant être demandés aux candidats aux marchés passés par les pouvoirs adjudicateurs (CE, 21 février 2014, sociétés AD3 et Les Lavandières, req no 373096). Le pouvoir adjudicateur ne peut, en toute hypothèse, rejeter la candidature d'une entreprise au seul motif que le candidat ne parviendrait pas à faire la preuve de son indépendance. Le pouvoir adjudicateur doit toutefois prendre les mesures préventives propres à éviter tout risque de conflit d'intérêts, notamment en imposant des obligations spécifiques à l'AMO (CE, 24 juin 2011, Sté Autostrade, précité). Le pouvoir adjudicateur peut ainsi insérer, dans le marché d'assistance à maîtrise d'ouvrage, une clause imposant à son titulaire de divulguer, sur simple demande, les liens qui l'uniraient aux opérateurs économiques présentant leur candidature lors d'une procédure de passation ultérieure.

Données clés

Auteur : M. Edouard Philippe

Type de question : Question écrite

Rubrique : Marchés publics

Ministère interrogé : Économie et finances

Ministère répondant : Économie et finances

Dates :
Question publiée le 11 février 2014
Réponse publiée le 20 septembre 2016

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