dossier médical personnel
Question de :
M. Jean-Pierre Decool
Nord (14e circonscription) - Les Républicains
M. Jean-Pierre Decool interroge Mme la ministre des affaires sociales et de la santé sur l'expérimentation du dossier médical personnel (DMP) sur support amovible. Engagée par l'association Apicem, gérant de la messagerie médicale sécurisée Apicrypt, elle propose aux patients de s'approprier leur dossier de santé tout en permettant à chaque citoyen, équipé ou non d'un ordinateur et d'internet, d'avoir accès à ses informations personnelles. Actuellement, des bornes interactives sont prêtes à fonctionner, comme dans la mairie de Brouckerque, mais ne peuvent être utilisées. La loi HPST de 2011 a en effet fixé au 31 décembre 2013 l'échéance de ces expérimentations. Lors de l'examen du PLF 2014, elle a indiqué vouloir engager le "DMP 2e génération", ciblant plus particulièrement les personnes âgées et les patients porteurs de maladies chroniques, avec un système intégré, et non par la voie d'une clef USB. Il regrette que cette nouvelle voie ne concerne plus le grand public, alors que le système prôné par Apicem, consistant en un carnet de santé numérique personnel sur support amovible, est bien plus fiable et prêt à être utilisé. Il est exceptionnel de pouvoir envisager un dispositif novateur, simple et peu coûteux pour l'État ; la clef de sa mise en œuvre est entre les mains du ministère dont elle a la charge. Dans l'intérêt des patients, il lui demande donc de bien vouloir prolonger l'expérimentation du DMP sur support amovible.
Réponse en séance, et publiée le 31 janvier 2014
EXPÉRIMENTATION DU DOSSIER MÉDICAL PERSONNEL SUR SUPPORT AMOVIBLE
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Decool, pour exposer sa question, n° 509, relative à l'expérimentation du dossier médical personnel sur support amovible.
M. Jean-Pierre Decool. Engagée par APICEM, association de professionnels de santé, l'expérimentation du dossier médical personnel sur clef USB répond aux attentes de la loi Kouchner, et propose aux patients, équipés ou non d'un ordinateur et d'internet, de s'approprier leurs données de santé.
Le 7 novembre dernier, lors de l'examen du budget de la santé, Mme la ministre des affaires sociales et de la santé a définitivement enterré cette expérimentation, en refusant de repousser la date d'échéance fixée au 31 décembre 2013, afin de privilégier un « DMP deuxième génération ». Or, d'une part, cette nouvelle voie ne concerne malheureusement plus le grand public, mais les personnes âgées et les porteurs de maladies chroniques. Le système prôné par APICEM, qui consiste en un carnet de santé numérique sur clef USB, est pourtant fiable et prêt à être utilisé. D'autre part, j'avoue ne pas comprendre les motivations de la lettre datée du 17 janvier dernier dans laquelle Mme la ministre affirme qu'il y a un risque concernant la protection des données, alors que la clef USB est bien évidemment cryptée.
Ce concept s'adresse par ailleurs à tous, grâce à l'installation de bornes interactives dans des lieux accessibles. Actuellement, des bornes sont d'ailleurs prêtes à fonctionner dans ma mairie de Brouckerque, mais le Gouvernement n'en autorise pas l'emploi. Mme la ministre n'a pas daigné envoyer un membre de son cabinet constater le potentiel de ces équipements !
En cette période de restriction budgétaire, ce serait une chance exceptionnelle que de pouvoir envisager un dispositif novateur, simple et qui coûte peu à l'État. Mais le ministère de la santé a déjà dépensé 500 millions d'euros pour le DMP ; il est certainement difficile d'admettre qu'il était possible de réussir avec peu de moyens comme le propose APICEM. La presse évoque même des conflits d'intérêts liés à ce dossier, mais tout cela m'échappe.
Ce projet n'est pas le mien, c'est celui de l'intérêt général, et il fait consensus auprès des professionnels de santé. La clef de sa mise en œuvre est entre les mains de Mme la ministre des affaires sociales et de la santé. Je lui demande donc solennellement d'accepter enfin de prolonger l'expérimentation du DMP sur support amovible.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre des outre-mer.
M. Victorin Lurel, ministre des outre-mer. Monsieur le député Jean-Pierre Decool, vous avez saisi la ministre des affaires sociales et de la santé d'une demande de prolongation de l'expérimentation d'un dossier médical sur un support numérique sécurisé, prévue par l'article 30 de la loi du 10 août 2011 modifiant la loi HPST. Vous lui avez indiqué que la commune de Brouckerque, dont vous êtes le maire, a le projet de mener une telle expérimentation en s'appuyant sur l'association APICEM.
La ministre des affaires sociales et de la santé considère qu'un tel dispositif – c'est là l'objet de votre désaccord – présente de nombreux inconvénients et ne répond pas aux besoins des patients et des professionnels de santé en matière de partage d'information dans l'intérêt de la coordination des soins. Elle vous prie de croire que ce n'est pas un conflit d'intérêts qui aurait motivé cette nouvelle orientation.
Il faut rappeler que la CNIL, consultée au mois d'avril 2012 sur le projet de décret donnant un cadre à ce type d'expérimentation, avait émis de fortes réserves sur le choix de ce support mobile en raison de ses limites techniques et des risques, de perte ou de vol, notamment, qu'il présente et qui sont susceptibles de constituer un obstacle à la confiance des patients et des professionnels. Par ailleurs, monsieur le député, il a été constaté que ce projet d'expérimentation ne suscitait que peu d'intérêt des représentants des professionnels et des patients.
Pour toutes ces raisons, la ministre n'est pas favorable à la mise en œuvre de telles expérimentations. Elle n'est donc pas favorable à la prolongation des délais qui les permettent.
En revanche, le partage des données de santé entre professionnels est un enjeu majeur : il doit permettre d'améliorer la coordination des soins, tout en donnant la possibilité aux patients d'accéder à ces informations et en assurant la maîtrise des accès. C'est pourquoi un dossier médical personnel de deuxième génération – que vous avez évoqué – a été conçu dans la concertation par et pour les professionnels. Il devra répondre à leurs besoins ainsi qu'aux attentes des patients. Mis en œuvre de manière pragmatique et progressive dans le cadre d'une nouvelle gouvernance, il sera articulé avec les projets en cours : dossier pharmaceutique, dossier communicant de cancérologie, messagerie sécurisée santé. Il bénéficiera en priorité, dans un premier temps, aux personnes atteintes de maladies chroniques.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Decool.
M. Jean-Pierre Decool. Monsieur le ministre, je regrette le blocage de cette expérimentation. D'une part, je précise qu'il ne s'agit pas d'un projet de la mairie de Brouckerque, mais de l'APICEM, association de professionnels de santé qui travaille pour les professionnels de santé. Si Mme la ministre de la santé n'accorde pas de crédit à mes propos, qu'elle écoute au moins ce que disait le dernier rapporteur du budget de la Sécurité sociale. Notre collègue socialiste prônait ainsi un modèle de DMP sur support amovible. Un tel DMP s'impose, selon lui, comme une alternative peu onéreuse.
C'est donc une supplique que je vous adresse, monsieur le ministre : envoyez donc un délégué de Mme la ministre de la santé pour constater de visu les possibilités offertes par ces bornes. Faisons profiter les patients de cette avancée technologique, essayons de l'améliorer. Cette solution est peu coûteuse : dans une période comme la nôtre, je pense que chacun se féliciterait de cette avancée.
Auteur : M. Jean-Pierre Decool
Type de question : Question orale
Rubrique : Assurance maladie maternité : généralités
Ministère interrogé : Affaires sociales et santé
Ministère répondant : Affaires sociales et santé
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 21 janvier 2014