Question de : M. Patrick Hetzel
Bas-Rhin (7e circonscription) - Les Républicains

M. Patrick Hetzel souhaite interroger M. le ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget, sur une information parue récemment dans la presse faisant état d'un doublement des droits d'accises sur la bière dans le cadre du PLF 2013. La brasserie française ne pourrait pas supporter une augmentation de droits d'accises, au-delà de l'indexation annuelle sur l'inflation déjà appliquée. Avec un chiffre d'affaires de 2 milliards d'euros HT, ce secteur économique est déjà fortement contributeur, tant par les recettes fiscales et sociales générées directement (337 millions de droit d'accises en 2010), qu'indirectement par la place qu'occupe la bière dans la distribution alimentaire et le secteur des cafés-hôtels-restaurants. À l'amont de la filière, la forte contribution de l'orge brassicole (2e exportateur mondial) à la balance commerciale agricole et la place des malteurs français parmi les premiers intervenants mondiaux de leur secteur doivent être préservées. Elles ne le seront que si les brasseries françaises peuvent continuer à jouer un rôle actif au sein de cette filière, en particulier en termes d'achat de proximité auprès des agriculteurs français, mais aussi d'investissements et de ressources humaines dans les domaines de la qualité, de la recherche et du développement, spécificités compétitives françaises reconnues à l'international. À l'aval de la filière, la bière représente plus du tiers du revenu des cafés-brasseries et constitue donc un soutien majeur à ce secteur d'activité en difficulté, qui a subi la fermeture de plus de 12 000 établissements depuis 2007. De surcroît, les brasseries françaises contribuent fortement, par leur soutien, à favoriser l'ouverture de nouveaux points de vente et à soutenir leur développement. Le marché de la bière en France est fragile, comme en témoignent, d'une part, la baisse structurelle de la consommation, - 38 % depuis 1976, et, d'autre part, la position d'avant-dernier pays consommateur en Europe avec moins de 30 litres/an/habitant. Les conséquences de nouvelles taxes auraient un impact fortement négatif sur toute la filière, des agriculteurs à la distribution. Ainsi, alors que 70 % de la bière consommée dans notre pays est produite en France, les emplois directs du secteur seraient menacés, après des années de restructurations difficiles mais exercées de façon responsable par les brasseurs pour adapter la capacité de production à la taille du marché (de 12 213 salariés en 1983, les effectifs des brasseurs sont passés à 6 700 en 1993 et à environ 3 500 aujourd'hui). L'activité indirecte liée à la brasserie s'en trouverait aussi menacée : les emplois directs et indirects de la filière brassicole sont passés de 71 500 en 2009 à 65 385 en 2011, soit - 8,6 % en deux ans. En outre, s'agissant d'un produit populaire, la répercussion du prix au consommateur fera passer cette mesure comme une atteinte supplémentaire au pouvoir d'achat des ménages. Enfin, il y a un risque important que les recettes fiscales attendues ne soient pas assurées, compte tenu de la forte élasticité prix-volumes. L'équilibre actuel a été atteint au prix de réorganisations profondes et de stratégies actives d'innovation de la part des brasseurs français. C'est cette détermination qui leur a permis de maintenir leurs engagements à l'égard de l'ensemble de la filière, de l'environnement (modes de production), et de la politique de santé (consommation responsable). Les Français en général, et les Alsaciens en particulier, ne comprendraient pas qu'un produit aussi populaire que la bière puisse faire l'objet de nouvelles mesures fiscales. En conséquence il lui demande ce que prévoit le Gouvernement afin de préserver les emplois de ce secteur industriel, reflet de l'identité régionale.

Réponse publiée le 5 février 2013

L'augmentation des droits d'accises sur la bière poursuit avant tout un objectif de santé publique qui s'inscrit dans la politique de limitation de la consommation d'alcool, particulièrement chez les jeunes. La bière constitue en effet le point d'entrée des jeunes dans l'alcool et reste la boisson alcoolisée qu'ils consomment le plus. Cette diffusion de l'usage de la bière est facilitée par le prix faible et peu dynamique de la bière en France. Ces prix s'expliquent en partie par la très faible taxation de la bière en France, qui est la 22e plus faible d'Europe, et se situe à un niveau six fois moindre qu'en Irlande, huit fois moindre qu'au Royaume-Uni et près de douze fois moindre qu'aux Pays-Bas. C'est pour répondre à cette situation qu'une hausse des droits d'accises sur la bière a été prévue par le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013. De façon cohérente avec les objectifs de santé publique, l'ampleur de cette hausse est proportionnelle à la fois au volume et au degré d'alcool : les droits d'accises sur la bière augmenteront de 1,1 centime par demi (25 cl) et par degré d'alcool. En conséquence, la hausse de taxation rapportée au prix de vente sera d'autant plus forte sur les produits alcoolisés ou à bon marché qui permettent une alcoolisation excessive. La consommation conviviale au comptoir sera nettement moins concernée en proportion, du fait de prix de vente plus élevés et d'une hausse de taxe qui n'est pas proportionnelle au prix. En effet, pour un demi titrant à 4,5° la hausse ne sera que de 5 centimes, quel que soit le réseau de distribution, et non de 40 centimes, sauf à ce que les intermédiaires choisissent d'accroître leurs marges. Rapporté à un prix de 2,50 € cela représente une hausse tout à fait modique. Les inquiétudes exprimées par les brasseurs sur l'avenir de leurs marges ne paraissent pas fondées. En effet, trois groupes internationaux concentrent 85 % du marché. Ils pourront largement répercuter la hausse des droits dans les prix de vente à la grande distribution pour préserver leurs marges. S'agissant des petits brasseurs, leur marché ne sera pas affecté par la hausse des droits d'accises : l'impact sur leurs prix sera très limité au regard du coût de ces produits de qualité, et leur consommation est davantage orientée par le choix d'un goût et d'un terroir que par le prix. En outre, au cours du débat parlementaire, les réductions de taux dont bénéficient les produits des petits brasseurs (pour une production comprise entre 10 000 et 200 000 hl) ont été renforcées au maximum de ce que permet le droit communautaire. Ainsi, les droits d'accises sur ces produits ne croîtront que de 0,4 à 0,5 centime par degré pour un demi, soit une hausse de 2 centimes pour un demi à 4,5° . Enfin, s'agissant de la filière brassicole, il convient de noter qu'environ 80 % de la production nationale de houblon et de malt est destinée à l'exportation et ne sera donc pas impactée par cette mesure.

Données clés

Auteur : M. Patrick Hetzel

Type de question : Question écrite

Rubrique : Contributions indirectes

Ministère interrogé : Budget

Ministère répondant : Budget

Dates :
Question publiée le 25 septembre 2012
Réponse publiée le 5 février 2013

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