universités
Question de : Mme Isabelle Attard (Normandie - Écologiste)
Mme Isabelle Attard attire l'attention de Mme la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche sur les conditions d'application de la loi n° 2013-660 du 22 juillet 2013 relative à l'enseignement supérieur et à la recherche. L'article L. 718-2 du code de l'éducation créé par cette loi prévoit une coordination territoriale des établissements d'enseignement supérieur à l'échelle académique ou inter-académique, y compris pour Paris et l'Île-de-France. Le chapitre VIII bis de cette loi permet aux établissements de choisir entre trois possibilités, décrites chacune par une section : la fusion (section 2), la fédération (communauté d'universités et établissements, section 3) ou la confédération d'établissements (association, section 4). Elle rappelle l'objectif de cette disposition de la loi, tel que Mme la ministre l'a exposé lors de la séance du 21 juin 2013 au Sénat : "la coopération la plus large et la plus stratégique possible au cœur d'une gouvernance territoriale de l'enseignement supérieur et de la recherche, qui prolongera en les améliorant les PRES actuels, sous la forme de fusions, communautés ou associations, fédérales ou confédérales - l'autonomie sera donc au rendez-vous, puisque les territoires pourront décider de leur organisation ", le territoire étant défini à l'article 718-2 de la loi comme académique ou interacadémique, et non infra-académique. Elle rappelle que le travail parlementaire a permis, par des amendements proposés par le Gouvernement, par Mme Gillot, rapporteure du projet de loi, et par le groupe écologiste, de faire évoluer profondément le regroupement par association. Dans le respect de leur autonomie statutaire, les regroupements d'universités et d'établissements peuvent choisir une organisation "fédérale ou confédérale", ces mots étant pris dans leur acception contemporaine : la fédération suppose la création d'un nouvel établissement auxquels les établissements fédérés transfèrent compétences et souveraineté décisionnaire ; la confédération suppose une association d'établissements qui partagent des compétences et conservent "leur personnalité morale et leur autonomie financière". Lors de la séance du 21 juin 2013, les avancées obtenues au Sénat sur la dimension confédérale du mécanisme de l'association ont été saluées par Mme la ministre en ces termes : "l'égalité est rétablie entre les établissements dans le cas des regroupements par association, conformément au souhait du groupe écologiste. [...] Toutes les mentions aux « établissements associés » ont été en conséquence reformulées pour que l'association n'apparaisse plus dissymétrique. Elle rappelle que nous sommes partis de la notion de « rattachement », pour évoluer vers celle « d'association », laquelle permettait déjà d'atténuer l'idée d'un lien de sujétion ou de subordination, pour finalement supprimer les termes « d'établissement associé »." Mme la ministre s'est engagée devant le Sénat, lors de cette même séance, à ce que "le choix de l'organisation [soit] laissé aux sites, qui pourront décider de manière autonome". Le cas de Paris et de l'Île-de-France pose un problème important, puisque les regroupements, dans leur contour actuels, ne semblent pas prendre conscience de l'exigence posée par la loi d'une coordination territoriale à l'échelle académique ou inter-académique - l'exception de l'article L. 718-3, 2°, b, alinéa 2, pour l'Île-de-France portant en effet sur la coordination (plurielle) et non sur la définition du territoire, énoncée à l'article L. 718-2. Ces regroupements semblent au contraire morceler avec volontarisme le tissu de coopérations existant. Elle lui demande donc de bien vouloir indiquer comment le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche, tout en respectant l'autonomie des établissements, envisage d'atteindre cette coordination territoriale académique ou interacadémique par la négociation et la mise en place du contrat pluriannuel avec les établissements regroupés.
Réponse publiée le 3 juin 2014
La question de l'honorable parlementaire interroge le lien entre le texte de la loi sur l'enseignement supérieur et la recherche du 22 juillet 2013 et l'interprétation qu'en ferait mes courriers des 28 février et 6 mars 2014, adressés aux présidents d'universités et aux directeurs d'établissements. Selon l'honorable parlementaire, la notion de « chef de file » introduite dans mes courriers pour désigner le coordonnateur du regroupement territorial voulu par le législateur dans l'article 62 de la loi (codifié dans les articles L 718-2 et sq. du code de l'éducation) serait en contradiction avec la possibilité introduite par la loi d'un mode confédéral de regroupement à travers la convention d'association. Si la notion de « chef de file » ne figure pas explicitement dans le texte, on peut toutefois soutenir que son usage s'inscrit parfaitement dans l'esprit de la loi du 22 juillet 2013. Cette dernière, en effet, stipule clairement en son article 62 (section 1 et section 4, codifiées notamment par les articles L 718-2 à L 718-5 et L 718-16) que, quel que soit le mode de coordination territoriale retenue, fusion, regroupement sous forme de communauté ou regroupement par convention d'associations, « la coordination territoriale est organisée par un seul établissement d'enseignement supérieur sur un territoire déterminé ». Cet établissement est, selon le cas, « soit le nouvel établissement issu de la fusion, soit la COMUE [communauté d'universités et d'établissements] lorsqu'il en existe une, soit l'établissement avec lequel les autres établissements ont conclu une convention d'association ». Quant à la dérogation prévue pour les trois académies d'Ile-de-France où « plusieurs établissements peuvent assurer la coordination territoriale », elle doit être entendue simplement comme la possibilité d'avoir plusieurs regroupements dans un territoire d'une telle dimension. La notion de « chef de file » employée dans mes courriers se comprend ainsi aisément comme la désignation d'un « primus inter pares » - notion à laquelle le système éducatif français est attaché de longue date - appelé à jouer le rôle de coordonnateur territorial du projet partagé et de ce fait interlocuteur privilégié de l'Etat pour le fonctionnement du regroupement correspondant. Dans le cas de la convention d'association, comme le dit très explicitement la loi, il est un établissement auquel les autres s'associent autour d'un projet partagé, défini librement en commun, et qu'il a la charge de coordonner et de porter vers l'extérieur, à l'instar des nombreuses confédérations qui organisent notamment le paysage social français. La notion ne saurait donc nourrir le soupçon d'une introduction subreptice d'une autorité institutionnelle non consentie au sein d'un regroupement : elle signifie, au contraire, la garantie que le projet partagé, sur lequel se fonde la convention d'association, soit réellement porté, au sein du regroupement comme vis-à-vis de ses partenaires extérieurs dont l'Etat. Ainsi, les différents textes d'application doivent avoir le souci de veiller à ce que soit respectée la volonté du législateur d'inciter à des regroupements adaptés autant que possible aux situations locales, le texte et l'esprit de la loi reconnaissant le pluralisme des universités. L'important à mes yeux est, en effet, la dynamique engagée, celle dotant notre pays d'une université de son temps, capable de rayonner à l'échelle internationale en toute région et à la hauteur des talents qu'elle accueille. C'est cette ambition qui guide mes décisions. Elle suppose de la souplesse, de l'intelligence des situations bien davantage que des modèles uniformes. Mais elle suppose aussi une volonté partagée par tous les acteurs d'aller de l'avant et de savoir inventer, dans la concertation et le respect mutuel, les nouveaux modes indispensables d'organisation et de fonctionnement au service de deux priorités : - la réussite des étudiants, de la formation à l'insertion professionnelle, - le renforcement de la recherche au niveau territorial, national, européen et international.
Auteur : Mme Isabelle Attard (Normandie - Écologiste)
Type de question : Question écrite
Rubrique : Enseignement supérieur
Ministère interrogé : Enseignement supérieur et recherche
Ministère répondant : Enseignement supérieur et recherche
Dates :
Question publiée le 25 mars 2014
Réponse publiée le 3 juin 2014