Question orale n° 569 :
magistrats du parquet

14e Législature

Question de : M. Charles de La Verpillière
Ain (2e circonscription) - Les Républicains

M. Charles de La Verpillière appelle l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur le manque d'effectif dont souffrent certaines juridictions, notamment dans les parquets. Chaque année, le ministère de la justice diffuse une circulaire de localisation des emplois de magistrats et de fonctionnaires (CLE). Force est de constater que ces CLE ne prennent pas toujours en compte les évolutions que connaissent nos territoires, et ne tirent pas les conséquences de la réforme de la carte judiciaire. À titre d'exemple, dans le département de l'Ain, la CLE de 2007 prévoyait 8 postes pour le parquet de Bourg-en Bresse, et 2 postes pour le parquet de Belley. L'Ain, dont le territoire était alors divisé entre deux TGI, se voyait donc promettre 10 postes. Le TGI de Belley est aujourd'hui fusionné avec le TGI de Bourg-en -Bresse. Or les CLE pour 2012 et 2013 n'ont attribué que 8 magistrats au nouveau parquet de Bourg-en-Bresse dont le ressort couvre dorénavant tout le département de l'Ain. Cela représente une différence de 20 % entre les promesses de 2007 et la réalisation. Cela semble difficilement compréhensible alors que, dans le même temps, ce département a gagné plus de 42 000 habitants, ouvert un centre pénitentiaire de 730 places, et connu en 2013 une hausse de 18 % des cambriolages. Aussi il lui demande quelles mesures elle compte prendre pour remédier à ces difficultés.

Réponse en séance, et publiée le 26 février 2014

MANQUE D'EFFECTIFS DU PARQUET DE BOURG-EN-BRESSE
Mme la présidente. La parole est à M. Charles de La Verpillière, pour exposer sa question, n°  569, relative au manque d'effectifs du parquet de Bourg-en-Bresse.

M. Charles de La Verpillière. Ma question s'adresse à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice. Mes collègues députés de l'Ain, Xavier Breton, Étienne Blanc, Michel Voisin et Damien Abad s'y associent. Je souhaite appeler son attention sur l'insuffisance des effectifs de magistrats du ministère public au tribunal de grande instance de Bourg-en-Bresse. En 2007, avant la fusion des tribunaux de Bourg-en-Bresse et de Belley, il y avait huit postes à Bourg-en-Bresse et deux à Belley, soit un effectif total théorique de dix magistrats. Or, à l'issue de la fusion, le parquet du tribunal de grande instance de Bourg-en-Bresse, ayant désormais compétence sur tout le département, n'a conservé que huit magistrats. Le département de l'Ain a donc perdu deux parquetiers.

Cette diminution a été d'autant plus mal ressentie que trois facteurs objectifs sont venus augmenter considérablement la charge de travail du parquet. Le premier facteur tient à la croissance démographique : le département est sur ce plan l'un des plus dynamiques de France puisque nous avons gagné 42 000 habitants en cinq ans, pour dépasser les 600 000 au dernier recensement. Le deuxième facteur d'accroissement de la charge de travail est l'augmentation sensible de la délinquance, avec notamment 18 % de cambriolages en plus en 2013. Le parquet est donc mobilisé par un plus grand nombre d'enquêtes. J'ajoute que la situation géographique de l'Ain, que vous connaissez, monsieur le ministre,…

M. Arnaud Montebourg, ministre. Je la connais même très bien !

M. Charles de La Verpillière. …entre Lyon et Genève, l'expose particulièrement à des trafics en tous genres et au grand banditisme. Le troisième facteur, c'est l'ouverture d'un nouveau centre pénitentiaire de 730 places en septembre 2010. Il occupe pratiquement à plein-temps un magistrat sur les huit que compte le parquet pour les mesures d'aménagement des peines, sans parler des délits commis au sein de la prison ou autour d'elle. Bref, la situation est vraiment difficile, pour ne pas dire critique. Il ne me paraît donc pas déraisonnable de demander une augmentation sensible des effectifs de magistrats affectés au parquet de Bourg-en-Bresse. Je comprends bien, et même j'admets, que la conjoncture ne se prête pas à des largesses inconsidérées. Je souhaiterais néanmoins que des ouvertures de postes de magistrats, sur deux ans s'il le faut, viennent corriger tant la sous-dotation initiale que l'augmentation très forte de la charge de travail du parquet de Bourg-en-Bresse.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre du redressement productif.

M. Arnaud Montebourg, ministre du redressement productif. Monsieur le député Charles de La Verpillière, je vous prie d'excuser l'absence de Christiane Taubira. Connaissant un peu votre département, et connaissant aussi, par expérience personnelle, le secteur judiciaire, je me permets de vous donner, ainsi qu'à vos collègues, les informations suivantes s'agissant du manque d'effectifs dont souffrent en effet les parquets de certaines juridictions, et notamment celui de Bourg-en-Bresse.

Mme Taubira m'a chargé de vous dire que l'amélioration des moyens et de l'efficacité de la justice est l'un de ses objectifs prioritaires. Elle a ainsi décidé de répondre aux préoccupations des parquetiers en lançant un plan d'action en faveur du ministère public, qu'elle a présenté aux 36 procureurs généraux et aux 171 procureurs de la République réunis le 10 février dernier à l'École nationale de la magistrature, en présence du procureur général près la Cour de cassation. Ce plan est articulé autour de quatre axes et dix-neuf mesures concrètes, parmi lesquelles l'adaptation des effectifs des parquets pour tenir compte de l'importance et de la diversité de leurs missions.

Mme la garde des sceaux a pris l'engagement de diminuer l'écart entre le taux de vacance des magistrats du siège et celui des magistrats du parquet, car si le nombre de ces derniers a beaucoup augmenté ces dernières années, cela est allé de pair avec une augmentation du nombre de leurs missions. Ainsi, l'écart va prochainement se réduire : le taux de vacance du siège passera de 5,12 % à 5,79 % et le taux de vacance du parquet passera de 7,20 % à 6,45 %. Ce ne sont que des statistiques, mais elles ont beaucoup de conséquences sur la vie quotidienne des juridictions. Il n'a d'ailleurs été possible de réduire ces non-remplacements que par une politique très volontariste de recrutement que la garde des sceaux mène depuis son arrivée, après l'absence totale d'anticipation des départs à la retraite de nos prédécesseurs. Ainsi, 250 magistrats vont rejoindre en septembre prochain les juridictions, contre 105 magistrats recrutés sur plusieurs années antérieurement.

La circulaire de localisation des emplois, qui est l'un des leviers permettant de parvenir à l'adaptation des effectifs du parquet, fixe pour l'année 2013 l'effectif du parquet du tribunal de grande instance de Bourg-en-Bresse à huit magistrats. Il est vrai, monsieur le député, que l'effectif du parquet n'a pas évolué malgré la fermeture le 1er octobre 2009 du tribunal de grande instance de Belley et son rattachement à celui de Bourg-en-Bresse. Il faut dire que l'initiative de la réforme de la carte judiciaire, qui a été pensée de façon assez improvisée, sans grande cohérence et sans s'inquiéter des conséquences en termes d'emplois et d'accessibilité du territoire, se paye, et se paye cher, monsieur le député !

Dans le cadre des derniers dialogues de gestion en vue de l'élaboration de la circulaire de localisation des emplois 2014, les chefs de la cour d'appel de Lyon ont sollicité la création d'un poste de substitut au parquet du tribunal de grande instance de Bourg-en-Bresse, motivée par l'extension du centre de détention, l'ouverture du quartier de semi-liberté, la création d'une zone de sécurité prioritaire et la participation aux sessions de la cour d'assises de l'Ain. Cela fait beaucoup de travail en plus, raison pour laquelle Mme la garde des sceaux sera particulièrement vigilante à ce que cette demande, qui est encore à l'étude, soit prise en compte en priorité.

Mme la présidente. La parole est à M. Charles de La Verpillière.

M. Charles de La Verpillière. Merci, monsieur le ministre. Je me permets de vous prier de transmettre à Mme la garde des sceaux mes remerciements pour cette réponse qui, certes, n'est pas totalement satisfaisante, mais qui est encourageante.

M. Arnaud Montebourg, ministre. C'est déjà ça !

Données clés

Auteur : M. Charles de La Verpillière

Type de question : Question orale

Rubrique : Justice

Ministère interrogé : Justice

Ministère répondant : Justice

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 18 février 2014

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