multipropriété
Question de :
M. Jean-Marie Sermier
Jura (3e circonscription) - Les Républicains
M. Jean-Marie Sermier interroge M. le ministre de l'économie et des finances sur les nécessaires adaptations juridiques concernant les sociétés d'attribution d'immeubles en jouissance à temps partagé. Ces entreprises sont règlementées par les articles L212-1 et suivants du Code de la construction et de l'habitation et plus précisément par la loi du 6 janvier 1986. Ce système de vacances à temps partagé est un moyen d'acheter un droit d'occupation d'un appartement d'une taille déterminée dans un lieu précis, pendant une durée limitée à une certaine période de l'année. La formule est séduisante, mais de plus en plus nombreux sont nos concitoyens qui y rencontrent des problèmes. Tout d'abord, à la différence de certaines législations étrangères qui permettent d'acquérir simplement un droit d'utilisation, la situation française permet à l'acquéreur de détenir des parts de société (type SCA ou SCI) avec ses assemblées générales et ses charges (entretien, réparations). Pour en sortir, il faut donc pour le propriétaire impérativement trouver un acquéreur. Et comme le marché est « mort », il n'y a pas d'acquéreur sur nombre de périodes. L'utilisateur est finalement bloqué jusqu'à la fin de vie de la société tout en en réglant les charges. Le problème est parfois prenant lorsque ce sont les héritiers d'une personne décédée qui sont appelés à payer les charges d'un appartement qu'ils n'occupent jamais et dont ils ne peuvent se démettre. D'un actif, la situation est devenue un passif à vie. Ensuite, profitant du blocage énoncé précédemment, des sociétés sans scrupules rachètent à vil prix les parts des propriétaires excédés. Petit à petit, elles cumulent des parts de sociétés et finissent par avoir une majorité suffisante pour imposer des charges nouvelles, accroissant ainsi la dépendance de ceux qui leur résistent. Nombreux sont ceux qui finissent ainsi par céder. Puis elles finissent par dissoudre la société à temps partagé afin de récupérer le bien immeuble qu'elles revendent au prix fort. Ceux qui ont résisté jusqu'au bout n'ont alors plus rien. Ces sociétés spéculent au détriment de tous ces petits propriétaires impuissants. Il faudrait pour l'éviter fixer un seuil maximum de parts de capital à l'article 15 de la loi n° 86-18 du 6 janvier 1986 modifiée par la loi n° 2009-888 du 22 juillet 2009 afin d'empêcher cette dérive précitée. Il aimerait savoir quelles sont les mesures qu'il ne manquera pas de prendre pour protéger ces milliers de petits propriétaires.
Réponse publiée le 5 mars 2013
Le fonctionnement des sociétés d'attribution d'immeubles en jouissance à temps partagé est régi par la loi n° 86-18 du 6 janvier 1986, à laquelle la loi n° 2009-888 de développement et de modernisation des services touristiques du 22 juillet 2009 a apporté des modifications significatives destinées à améliorer la situation des associés. Il a ainsi été instauré un droit de retrait d'ordre public ouvert à tout associé, soit après autorisation donnée par l'unanimité des associés, soit par décision de justice pour justes motifs, notamment lorsque les parts ou actions que l'associé détient dans le capital social lui ont été transmises par succession depuis moins de deux ans, ou lorsque celui-ci ne peut plus jouir de son bien du fait de la fermeture ou de l'inaccessibilité de la station ou de l'ensemble immobilier concerné (art. 19-1). Il appartient aux juridictions, lorsqu'elles sont saisies par des associés désirant se retirer de la société, de se prononcer souverainement dans chaque cas d'espèce au vu des motifs avancés et de leur justification par les demandeurs. Il importe que l'exercice du droit de retrait, sans être impossible, demeure strictement encadré afin de ne pas mettre en péril l'équilibre de la société et de ne pas nuire aux associés restants dont les charges se trouvent accrues par l'effet du retrait. Par ailleurs, la prise de contrôle d'une société d'attribution d'immeubles en jouissance à temps partagé au moyen du rachat des parts sociales ou actions des associés par un investisseur ne constitue pas, en soi, une opération illicite. Il est loisible à chaque associé de céder ses parts sociales ou actions ou de refuser de donner suite à une offre d'achat, notamment parce qu'il l'estimerait insuffisante. L'article 13 de la loi du 6 juillet 1986, tel que modifié par la loi n° 2009-888 du 22 juillet 2009, prévoit que tout associé peut demander à tout moment à la société la communication de la liste des noms et adresses des autres associés ainsi que la répartition des parts sociales et des droits de jouissance qui y sont attachés. L'exercice de cette faculté doit permettre aux associés de se connaître, malgré leur nombre et leur éparpillement, et d'agir en commun pour la préservation de leurs intérêts, notamment à l'occasion de semblables opérations spéculatives. Dans le cas où le nouvel associé obtient la majorité des deux tiers des voix et que l'assemblée générale vote la dissolution anticipée de la société et sa liquidation conformément à l'article 16 de la loi du 6 janvier 1986, les associés minoritaires, s'ils estiment que cette décision est contraire à l'intérêt social et qu'elle n'a été prise que dans l'unique dessein de favoriser les membres de la majorité au détriment des membres de la minorité, peuvent saisir les juridictions compétentes d'une demande d'annulation de la décision sur le fondement de l'abus de majorité. En outre, en cas de liquidation frauduleuse, la mise en cause de la responsabilité pénale et civile du liquidateur peut également être envisagée. Dans ces conditions, il n'apparaît pas justifié de modifier les modalités de répartition des voix fixées par l'article 15 de la loi du 6 janvier 1986. Compte tenu toutefois des doléances exprimées par certains associés, il a été décidé de procéder à une évaluation des difficultés qui peuvent subsister à la suite de la modification législative précédemment évoquée. Des réunions de concertation sont actuellement menées par les services du ministère de la justice et du ministère de l'économie et des finances afin d'évaluer la nécessité d'une éventuelle évolution de la réglementation existante.
Auteur : M. Jean-Marie Sermier
Type de question : Question écrite
Rubrique : Propriété
Ministère interrogé : Économie et finances
Ministère répondant : Justice
Dates :
Question publiée le 2 octobre 2012
Réponse publiée le 5 mars 2013