Question orale n° 621 :
logement social

14e Législature

Question de : M. François Pupponi
Val-d'Oise (8e circonscription) - Socialiste, écologiste et républicain

M. François Pupponi attire l'attention de M. le ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget, sur les conditions de la cession en 2009 du parc locatif social de la société Icade, filiale du groupe Caisse des dépôts. Il s'interroge sur la manière dont cette cession a été réalisée, notamment au profit de la Société nationale immobilière, et sur le montant de la plus-value réalisée. Il l'interroge également sur les conséquences financières de cette cession pour les communes concernées quant aux ressources issues de la taxe foncière sur les propriétés bâties et sur les mesures compensatoires que le Gouvernement compte prendre vis-à-vis de ces territoires.

Réponse en séance, et publiée le 7 mai 2014

CONDITIONS ET CONSÉQUENCES DE LA CESSION DU PARC LOCATIF SOCIAL DE LA FILIALE ICADE DE LA CAISSE DES DÉPÔTS ET CONSIGNATIONS
M. le président. La parole est à Mme Chantal Berthelot, pour exposer la question n°  621 de M. François Pupponi, relative aux conditions et conséquences de la cession du parc locatif social de la filiale Icade de la Caisse des dépôts et consignations.

Mme Chantal Berthelot. Monsieur le secrétaire d'État, je vous présente les excuses de notre collègue François Pupponi, dont l'absence est due à la visite du Président de la République dans sa circonscription.

À la fin de l'année 2009, la foncière Icade, filiale de la Caisse des dépôts et consignations, a cédé son parc locatif de près de 35 000 logements à la Société nationale immobilière et vingt-cinq autres bailleurs. Au-delà des conditions de la cession elle-même, sur lesquelles une mission d'information interne à la Caisse des dépôts a été commanditée, dont le rapport sera rendu très prochainement, la situation des communes d'implantation de ces logements demeure problématique.

Dès avril 2009, M. Pupponi et trente-cinq autres maires d'Île-de-France, inquiets du manque d'information sur ce projet, ont demandé à être reçus par le ministre du budget de l'époque, M. Éric Woerth, afin d'obtenir des précisions sur les intentions d'Icade et d'alerter le Gouvernement sur les incidences financières d'une telle opération pour nos communes.

En effet, l'offre faite aux bailleurs acquéreurs de bénéficier d'une exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties de vingt-cinq ans était porteuse de pertes de recettes fiscales lourdes pour des communes défavorisées comme Sarcelles ou Villiers-le-Bel, où ces logements représentent une part importante du parc locatif.

Si, par la voie d'un amendement porté par M. Pupponi en loi de finances pour 2013 et adopté à l'unanimité, la période d'exonération a été ramenée de vingt-cinq à quinze ans, la problématique des compensations par l'État n'a pas été réglée, loin de là.

En effet, la loi de finances pour 2009 prévoyait que l'État compense les exonérations pour toutes les catégories de logements mais avec application d'un taux de minoration fixé à 17,10 % pour 2009 et révisé lors de chaque loi de finances. Or, depuis 2010, du fait que les différentes compensations d'exonération sont devenues des variables d'ajustement au sein de l'enveloppe normée des concours de l'État, le montant de cette compensation se trouve chaque année réduit par l'application d'un coefficient déflateur cumulé. Ainsi, le taux de minoration est passé à 39,32 % en 2012 et 50,78 % en 2013.

Monsieur le secrétaire d'État, les collectivités locales sont appelées à participer à l'effort de réduction de la dépense publique de manière significative, et nous adhérons à cet objectif. Néanmoins, cet effort, pour avoir un sens, doit être réalisé dans la justice et de concert avec un renforcement des péréquations. Or, aujourd'hui, ce sont les communes populaires, avec un taux élevé de logements sociaux, qui sont pénalisées par ce dispositif de compensation dégressive. Elles payent un prix chaque année plus important pour avoir, en réalité, supporté les charges de centralité d'un parc social conséquent. Il s'agit là d'un non-sens, qui va d'ailleurs à l'opposé de la logique présidant aux mécanismes de péréquation.

Nos communes doivent conserver les moyens de mener les politiques publiques essentielles dont nos concitoyens ont besoin. C'est un rôle d'autant plus crucial dans nos territoires de banlieue où le service public local est souvent le seul patrimoine de nos concitoyens. Aussi, quelles mesures le Gouvernement compte-t-il prendre afin de préserver les ressources fiscales de nos communes défavorisées, en particulier dans ce dossier ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé du budget.

M. Christian Eckert, secrétaire d'État chargé du budget. Madame la députée, je sais que vous transmettrez à François Pupponi la réponse à sa question, sur un sujet qu'il connaît bien et qu'il m'a également été donné de connaître dans une vie antérieure.

M. Pupponi interroge le Gouvernement sur les conséquences financières de la cession, réalisée en 2009 par Icade, filiale de la Caisse des dépôts, de son parc de logements, et plus particulièrement sur ses conséquences pour les communes concernées quant aux ressources issues de la taxe foncière sur les propriétés bâties.

Ce débat a été porté très tôt par François Pupponi et d'autres. La loi de finances pour 2010, amendée par la loi de finances rectificative de la fin de la même année, a élargi la compensation des exonérations de taxe foncière sur les propriétés bâties aux logements anciens acquis à l'aide de prêts à usage social, ce qui est majoritairement le cas des logements de l'opération Icade réalisée depuis 2009.

Auparavant, la compensation était limitée aux logements acquis ou construits au moyen de prêts locatifs aidés d'intégration ou de prêts locatifs à usage social. L'élargissement du dispositif en 2010 a donc permis aux collectivités concernées de bénéficier dorénavant, comme pour l'ensemble du parc de logement très social, d'une compensation d'exonération, ce qui a constitué un réel progrès.

Cependant, vous l'avez rappelé, les compensations d'exonération font partie depuis 2009 du périmètre des variables d'ajustement permettant le respect de l'évolution de l'enveloppe normée des concours de l'État aux collectivités territoriales. Ainsi, ces exonérations sont minorées chaque année en vue de réaliser l'objectif d'équilibre de l'enveloppe normée.

L'exclusion du périmètre des variables des seuls logements sociaux concernés par une opération de cession d'Icade engendrerait une inégalité de traitement entre collectivités locales qui apparaît difficilement justifiable.

Votre question pose plus largement celle des modalités retenues pour associer les collectivités à l'effort de redressement des comptes publics. Globalement, cet effort sera proportionnel à la part des collectivités dans la dépense publique, aboutissant, vous le savez, à un effort de 11 milliards d'euros en trois ans.

Mais il est évident que, dans la répartition de cet effort entre collectivités – votre question me fournit l'occasion de le préciser –, le Gouvernement sera particulièrement attentif à ce que les collectivités qui connaissent les situations les plus tendues du fait de la faiblesse de leurs ressources et de l'importance de leurs charges, soient en mesure d'absorber la réduction des concours qui sera mise en œuvre à compter de 2015. Dans cette optique, le renforcement des dispositifs de péréquation sera notamment une priorité de l'action gouvernementale. À titre d'exemple, la dotation de solidarité urbaine et le fonds de solidarité des communes de la région d'Île-de-France sont aujourd'hui des dispositifs qui prennent en compte la situation des collectivités en termes de logements sociaux et dont la progression constante, proposée chaque année par le Gouvernement et votée par le Parlement, permet à ces collectivités de bénéficier de la solidarité nationale.

Dans l'effort de redressement des comptes qui sera demandé aux collectivités territoriales, nous serons particulièrement attentifs aux questions de péréquation. Je viens d'évoquer des dispositifs de péréquation horizontale, mais une réforme de la péréquation verticale par la dotation globale de fonctionnement versée aux collectivités sera également un outil important. Le Gouvernement y est très attaché.

Données clés

Auteur : M. François Pupponi

Type de question : Question orale

Rubrique : Logement

Ministère interrogé : Budget

Ministère répondant : Budget

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 1er avril 2014

partager