14ème législature

Question N° 6351
de M. Alain Bocquet (Gauche démocrate et républicaine - Nord )
Question écrite
Ministère interrogé > Économie et finances
Ministère attributaire > Économie et finances

Rubrique > banques et établissements financiers

Tête d'analyse > Crédit immobilier de France

Analyse > situation financière.

Question publiée au JO le : 09/10/2012 page : 5460
Réponse publiée au JO le : 25/12/2012 page : 7864
Date de changement d'attribution: 30/10/2012

Texte de la question

M. Alain Bocquet attire l'attention de M. le ministre de l'économie et des finances sur la situation du Crédit immobilier de France. L'État a annoncé début septembre 2012 qu'il lui apportait sa garantie lui évitant ainsi une procédure de dépôt de bilan et de redressement judiciaire, suite à la dégradation de sa note par l'agence de notation. Mais, et la presse régionale s'en est fait l'écho récemment, « le groupe serait géré en extinction, la production de crédits étant quasiment stoppée ». Il serait dans l'obligation « d'ajuster les coûts et charges de fonctionnement » ce qui conduira à terme à la dissolution de l'établissement avec attribution à l'État du boni de liquidation. Il rappelle que le Crédit immobilier de France est spécialisé depuis plus de cent ans, dans les prêts à l'accession à la propriété, notamment sociale et que sa clientèle, essentiellement à revenus modestes, voire à revenus irréguliers, ne trouve plus de réponse aujourd'hui dans les réseaux bancaires traditionnels alors qu'elle ne présente pas un risque anormal. Si aucune solution n'est trouvée, ce sont 2 500 salariés qui seraient licenciés et, au-delà, c'est le secteur du bâtiment et de l'immobilier qui serait touché, entraînant la disparition de centaines de milliers d'emplois induits. Il insiste sur le fait qu'il s'agirait de la liquidation d'un outil unique d'accession à la propriété des ménages modestes. Et cela conduirait à l'arrêt des missions sociales actuellement mises en oeuvre par les sociétés coopératives d'intérêt collectif pour l'accession à la propriété (SACICAP) qui se sont élevées à 45 millions d'euros en 2011 en appui des politiques d'habitat locales en direction de ces ménages. Sur la région Nord-Pas-de-Calais, plus de 40 000 prêts ont été consentis essentiellement à des foyers modestes, en majorité des primo-accédants, les trois quarts étant financés sans apport personnel. Il lui demande les intentions du Gouvernement en la matière, la nécessité s'imposant d'un outil public dédié exclusivement à l'accession sociale à la propriété qui assumerait un service économique d'intérêt général.

Texte de la réponse

La situation du Crédit immobilier de France (CIF) mobilise pleinement l'attention du Gouvernement. Le 28 août dernier, la dégradation par Moody's de la notation du CIF a conduit l'Etat, à la demande du Conseil d'administration, à lui octroyer sa garantie. Le CIF était alors sur le point de faire faillite. Pour autant, le Gouvernement n'a pas découvert ce dossier dans les derniers jours d'août. Depuis sa prise de fonction il s'est efforcé de régler au mieux un dossier dont il a hérité à son arrivée aux affaires. Depuis février 2012, la nécessité pour le CIF de trouver un repreneur était devenu impérative pour éviter la faillite. Dès sa prise de fonction, le Gouvernement a cherché toutes les solutions qui auraient permis au CIF de maintenir son activité en l'état. Tout a été fait pour favoriser un adossement mais ce n'est qu'en juin et sous la pression du Gouvernement que la direction du CIF a accepté de rechercher un repreneur. Cette ultime tentative a échoué et aucun repreneur ne s'est manifesté, soulignant ainsi que plus personne ne croyait à la viabilité de la banque. Cette situation relève en grande partie de la responsabilité de la précédente direction du CIF, qui avait choisi d'ignorer, voire de contester, y compris devant les tribunaux, les décisions de l'Autorité de contrôle prudentiel (ACP), qui l'avait alerté à plusieurs reprises sur la dangerosité de son modèle économique et de ses choix stratégiques. Conformément au droit communautaire, l'intervention de l'Etat dans de telles circonstances implique que le CIF ne peut désormais plus produire de nouveaux prêts et doit être placé en gestion extinctive. Les discussions menées par le Gouvernement ces dernières semaines, dans un esprit d'ouverture, avec la direction du CIF ont confirmé qu'il n'existait pas d'alternative économiquement viable et conforme au droit communautaire à cette mise en extinction. L'intervention de l'Etat ne peut pas réparer l'irréparable, mais elle permet de gagner le temps nécessaire pour que l'entreprise mette en oeuvre des solutions pour limiter l'impact sur l'emploi, en essayant notamment de trouver des partenaires pour ses différentes activités et les salariés qui y sont attachés. Ce processus doit être mené à bien rapidement. C'est dans ce cadre que le Gouvernement a demandé au Parlement de voter la garantie que l'Etat accorde au CIF dans le projet de loi de finances pour 2013. Le Gouvernement est conscient par ailleurs de ce que l'arrêt de l'activité du CIF suscite des inquiétudes sur l'offre en matière de prêts à l'accession sociale à la propriété dont il représentait 10 à 20 % du marché selon les critères. C'est pourquoi il a demandé à ce que des discussions soient menées avec La Banque Postale afin d'examiner dans quelles conditions l'activité du CIF en matière d'accession sociale à la propriété pouvait être reprise et des solutions d'embauche offertes à un nombre significatif de salariés. A l'issue de ces discussions, la Banque Postale a indiqué publiquement s'engager à développer, en plus de sa production actuelle, une nouvelle offre en matière de prêts à l'accession sociale à la propriété à destination des ménages les plus modestes. Le Gouvernement sera particulièrement attentif à la mise en oeuvre de ses engagements par La Banque Postale. Par ailleurs, afin de s'assurer que, conformément à ce qu'elles ont indiqué publiquement début octobre, l'ensemble des banques maintiennent et développent leur offre en matière d'accession sociale à la propriété, le Gouvernement a décidé de proposer de recentrer le dispositif du prêt à taux zéro sur les ménages modestes. Le nouveau dispositif facilitera la solvabilisation des ménages en accession sociale à la propriété. Il s'agit là d'une réponse supplémentaire à la situation dont le Gouvernement a hérité et à laquelle il s'efforce de remédier. Il convient par ailleurs de ne pas entretenir de confusion entre l'activité du CIF et celles de ses actionnaires, les SACICAP. Celles-ci mènent des missions sociales (lutte contre l'habitat indigne, lutte contre la précarité énergétique, rénovation de copropriété dégradée...) qui étaient en partie financées par les dividendes que le CIF leur versait. Là encore, le Gouvernement s'attache à trouver une solution pour permettre aux SACICAP de poursuivre la réalisation de ces missions. Enfin l'aspect social est bien évidemment au coeur des priorités du Gouvernement. Il convient toutefois de souligner que la garantie de l'Etat permet d'éviter la catastrophe qu'aurait été la mise en liquidation inévitable sans la garantie et donne du temps pour trouver des solutions de reclassement. Le Gouvernement redit à nouveau sa conviction que des solutions doivent pouvoir être trouvées pour les salariés du CIF : un nombre significatif d'entre eux conserveront leur emploi dans le cadre de la gestion extinctive du CIF lui-même ; d'autres sont salariés de filiales qui peuvent être cédées rapidement ; d'autres enfin pourront recevoir des offres d'embauche de la part de La Banque Postale dans le cadre du développement de sa nouvelle offre en matière d'accession sociale à la propriété. La Banque Postale s'est ainsi engagée à reprendre 300 salariés du CIF. Par ailleurs, les principaux réseaux bancaires membres de la FBF ont indiqué être prêts à examiner en priorité les candidatures des salariés du CIF dans le cadre de leur politique de recrutement.