Question de : M. Hervé Féron
Meurthe-et-Moselle (2e circonscription) - Socialiste, écologiste et républicain

M. Hervé Féron alerte M. le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social sur la pénibilité des conditions de travail des salariés français et plus particulièrement des professions ouvrières. La Direction de l'animation de la recherche, des études et des statistiques (DARES) a publié au mois de juillet dernier une analyse portant sur les conditions de travail des salariés de France métropolitaine. Dans cette étude, la DARES note une intensification du travail entre 2005 et 2013, pour une large partie due à des rythmes professionnels de plus en plus contraignants, particulièrement pour les ouvriers. Ainsi, 54 % des ouvriers qualifiés considèrent que leurs gestes quotidiens sont soumis à un rythme de travail imposé par une machine ou par la surveillance de la hiérarchie, contre 26 % des cadres supérieurs. Les ouvriers sont, en outre, beaucoup plus exposés aux nuisances sonores (75 %) que les cadres supérieurs (7 %) et doivent plus fréquemment porter ou déplacer des charges lourdes (64 % d'entre eux contre 11 % de cadres supérieurs). La pénibilité des conditions de travail des ouvriers a des répercussions sur le corps humain et elle participe à la réduction de l'espérance de vie : à 35 ans, un cadre supérieur a en moyenne une espérance de vie de 47 ans, tandis qu'un ouvrier n'a que 41 ans. Il existe une inégalité de fait entre les conditions d'exercice des professions ouvrières, plus éprouvantes physiquement, et les métiers pratiqués à la suite d'études longues, souvent sédentaires. C'est la raison pour laquelle la loi du 20 janvier 2014 garantissant l'avenir et la justice du système de retraites a prévu la mise en place d'un compte pénibilité pour les salariés travaillant dans des conditions difficiles. Ce compte doit permettre à tout salarié du secteur privé exposé à des conditions de travail risquant de réduire son espérance de vie d'accumuler des points en fonction du temps passé dans une situation de pénibilité reconnue pendant sa carrière. Ce dispositif doit entrer en vigueur au 1er janvier 2015 pour les salariés exposés à des facteurs de pénibilité « simples à identifier et à tracer » selon le ministère du travail (travail de nuit, horaires alternants, travail répétitif et travail en milieu hyperbare). Cependant, la généralisation du compte pénibilité a été reportée pour le reste des travailleurs au 1er janvier 2016. Au vu de l'urgence de la situation pour les salariés, confirmée par l'étude de la DARES, il souhaiterait qu'il réaffirme la mobilisation totale du Gouvernement en faveur du compte de pénibilité. En outre, il souhaiterait que le Gouvernement fasse la lumière sur l'avancement des travaux visant à la mise en place d'un dispositif suffisamment simple pour les entreprises mais résolument protecteur vis-à-vis des salariés.

Réponse publiée le 24 mars 2015

Afin de garantir le caractère équitable de la réforme des retraites, le gouvernement s'est engagé, et c'est là un axe majeur de cette réforme, à apporter une réponse durable à la question de la pénibilité au travail. Elle passe par la reconnaissance d'une juste compensation pour les salariés concernés, mais aussi par la prévention de l'exposition à des facteurs de pénibilité. La création d'un compte personnel de prévention de la pénibilité représente, à cet égard, une avancée sociale essentielle. Ayant bien conscience des difficultés auxquelles doivent faire face les petites entreprises, la priorité du Gouvernement a été de privilégier des solutions offrant la plus grande simplicité de gestion et de sécurité juridique tant pour les entreprises dans leurs obligations de déclaration des situations de pénibilité que du point de vue des salariés pour la mobilisation de leurs droits. A la suite de la concertation conduite par Michel de Virville, les textes d'application de la loi, publiés le 10 octobre 2014, ont retenu des modalités de mise en oeuvre visant à simplifier, sécuriser juridiquement le dispositif et à en réduire le coût pour les entreprises. Ils mettent en oeuvre les propositions issues de la concertation : annualisation des seuils, déclaration et versement des cotisations uniques en fin d'année, dématérialisation et simplification de la fiche de pénibilité, calendrier très progressif de montée en charge des cotisations. Par ailleurs, en réponse aux inquiétudes exprimées par les chefs d'entreprise, le Gouvernement a décidé une mise en oeuvre progressive du compte : seuls 4 facteurs de pénibilité, les plus simples à identifier, entrent en vigueur le 1er janvier 2015. Pour les 6 autres facteurs, l'entrée en vigueur est reportée au 1er janvier 2016. Afin de veiller à l'appropriation de ce dispositif nouveau, en levant ce qui pourrait faire obstacle à sa mise en oeuvre effective et à la création des droits attendus par les salariés concernés, et afin que les inquiétudes exprimées par beaucoup de chefs d'entreprise puissent trouver un apaisement par un effort supplémentaire de simplification et d'accompagnement, deux missions sont invitées à formuler des propositions au Gouvernement. Une mission, confiée par le Premier ministre à Monsieur Christophe Sirugue, député de Saône-et-Loire et à Monsieur Gérard Huot, chef d'entreprise, formulera notamment, d'ici juin 2015, des propositions sur l'équilibre à trouver entre la définition et le suivi individuel de l'exposition aux facteurs de pénibilité et des appréciations plus collectives des situations de pénibilité, plus simples à suivre pour les entreprises, notamment les TPE et PME. Cette mission s'articulera avec celle confiée à Monsieur Michel de Virville, Conseiller-maître honoraire à la cour des comptes, qui mènera quant à lui une mission d'appui aux branches professionnelles pour l'élaboration, au cours de l'année 2015, de leurs « modes d'emploi », qui permettront de définir, dans un contexte et un vocabulaire propres aux divers métiers, des modalités adaptées de recensement des expositions, voire des situations types d'exposition. De l'avis de l'ensemble des parties prenantes, ces modes d'emploi faciliteront, simplifieront et sécuriseront les démarches des entreprises, notamment des plus petites. Un rapport d'étape sera rendu d'ici l'été 2015. Les propositions de ces deux missions, ainsi que les travaux des branches professionnelles, permettront au Gouvernement de préparer les règles d'application pour les facteurs qui entreront en vigueur le 1er janvier 2016, en intégrant les recommandations formulées, et d'apporter les précisions et améliorations utiles pour les facteurs entrés en vigueur au 1er janvier 2015.

Données clés

Auteur : M. Hervé Féron

Type de question : Question écrite

Rubrique : Retraites : généralités

Ministère interrogé : Travail, emploi, formation professionnelle et dialogue social

Ministère répondant : Travail, emploi, formation professionnelle et dialogue social

Dates :
Question publiée le 7 octobre 2014
Réponse publiée le 24 mars 2015

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