14ème législature

Question N° 67
de M. Frédéric Reiss (Non inscrit - Bas-Rhin )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Écologie, développement durable et énergie
Ministère attributaire > Écologie, développement durable et énergie

Rubrique > sécurité publique

Tête d'analyse > plans de prévention des risques

Analyse > sites à risques classés. activités industrielles et de loisirs. conciliation.

Question publiée au JO le : 15/01/2013 page : 258
Réponse publiée au JO le : 25/01/2013 page : 343

Texte de la question

M. Frédéric Reiss souhaite interroger Mme la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie au sujet de l'application de la loi n° 2003-699 du 30 juillet 2003 relative à la prévention des risques technologiques et naturels. Suite à l'explosion de l'usine AZF de Toulouse, la réglementation a été renforcée afin d'éviter tout accident. L'application stricte de ce dispositif a aujourd'hui pour conséquence de rendre impossible toute activité humaine dans de nombreux secteurs ayant déjà fait l'objet d'aménagement. Ainsi, à Lauterbourg, la zone de protection induite par l'usine Rohm and Haas implique l'interdiction d'accès à un large périmètre le long du Rhin. Ce lieu comprend notamment un restaurant, une piste cyclable empruntée quotidiennement par de nombreux touristes ainsi que des installations de pêche, autant d'installations condamnées alors qu'elles sont issues d'importants investissements publics et privés. Appliquée à la lettre, la réglementation impliquerait aussi l'interdiction de passage des péniches et bateaux de croisière sur le Rhin. Face à cette situation, les acteurs s'interrogent sur la possibilité d'envisager des solutions locales innovantes en vue de maintenir l'accès aux sites tout en assurant une protection maximale et la pérennité des activités industrielles.

Texte de la réponse

lign='center'>CONDITIONS D'ACCÈS AUX SITES CLASSÉS À RISQUES

Mme la présidente. La parole est à M. Frédéric Reiss, pour exposer sa question, n° 67, relative aux conditions d'accès aux sites classés à risques.
M. Frédéric Reiss. Ma question, madame la ministre de l'écologie, s'inscrit dans le contexte de la question d'actualité d'hier à l'occasion de laquelle vous avez évoqué le problème des risques industriels soulevés par la fuite de gaz de Rouen.
Les plans de prévention contre les risques technologiques - PPRT - émanent de la loi du 30 juillet 2003 qui a pour difficile objectif de concilier sécurisation, pérennisation et développement de sites industriels avec urbanisme actuel et urbanisation future.
L'application stricte de ce dispositif a pour conséquence de rendre compliquée, voire impossible, toute activité humaine dans des secteurs Seveso souvent déjà urbanisés. Dans ma circonscription, le site de Rohm and Haas, à Lauterbourg, est concerné par un PPRT qui soulève de nombreuses questions, non seulement chez les habitants et les collectivités locales, mais aussi chez l'industriel qui est disposé à faire les efforts nécessaires pour sécuriser le site et ses abords.
L'application du plan de zonage concerne notamment une piste cyclable bien fréquentée le long du Rhin et un restaurant. En appliquant aveuglément la réglementation, on en arriverait à interdire la circulation des péniches et des bateaux sur le Rhin.
Il faut savoir raison garder. Après près de deux ans de concertation avec les services de l'État, notamment la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement, des solutions semblent heureusement se dessiner.
L'information des habitants, des salariés de l'entreprise, des promeneurs en tout genre doit être la règle. Une signalétique adaptée doit avertir le public lorsqu'il pénètre dans une zone à risques.
D'une manière plus générale, comment, madame la ministre, envisagez-vous l'aboutissement des 200 PPRT en cours d'élaboration sur les 404 sites Seveso de France ?
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie.
Mme Delphine Batho, ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie. Monsieur le député Frédéric Reiss, je vous remercie de m'avoir interrogée sur ce sujet essentiel des plans de prévention des risques technologiques.
La priorité du Gouvernement est, bien sûr, de garantir la sécurité des personnes et des biens, face aux risques technologiques potentiels, en application du principe de précaution. Vous avez raison, l'actualité liée aux émanations de gaz mercaptan de l'usine Lubrizol, classée Seveso seuil haut, montre l'importance de l'élaboration des PPRT qui, mis en place par la loi de 2003, elle-même faisant suite à la catastrophe de l'usine AZF, est indispensable pour améliorer la coexistence entre ces sites industriels à hauts risques et les personnes et les biens dont il faut assurer la protection.
Le Gouvernement a hérité d'une situation où, sur 404 sites Seveso, seuls 214 PPRT ont été prescrits. Pour cette raison j'ai souhaité, dès mon arrivée, lever certains obstacles à l'approbation de ces PPRT. Vous le savez, l'une des questions principales, comme l'a fait remonter l'association Amaris qui regroupe les élus locaux, est celle de la répartition de l'effort financier, qu'il s'agisse de la réduction du risque à la source, qui doit être pris en charge par l'industriel, ou des travaux prescrits aux riverains.
Nous avons pris, par conséquent, deux mesures. Nous avons tout d'abord décidé d'augmenter le crédit d'impôt à 40 % afin de renforcer la prise en charge par l'État des travaux. Cette disposition, votée dans la loi de finances, a été approuvée et entrera en vigueur.
Nous avons ensuite fixé la clé de répartition des financements entre la part de l'État, celle des collectivités territoriales et celle des industriels. Cette disposition, inscrite dans le projet de loi de finances, a été censurée par le Conseil constitutionnel, non pas pour une raison de fond, mais pour une raison de forme. J'ai indiqué hier que nous la représenterions dès que possible, soit dans la loi Logement soit dans la loi Décentralisation.
S'agissant plus particulièrement de l'élaboration du PPRT de la société Rohm and Haas à Lauterbourg, vous vous inquiétiez de l'impact de ce plan le long du Rhin sur la piste cyclable, très fréquentée, ou sur les installations de pêche.
Selon les premiers éléments dont je dispose sur ce PPRT en cours d'élaboration, des propositions ont été faites lors de la dernière réunion du 16 novembre pour permettre un traitement proportionné des différents enjeux.
Une modification du parcours de la piste cyclable longeant le Rhin serait prescrite avec un délai de réalisation de trois ans, pour permettre de contourner un tronçon exposé aux risques, mais la continuité du parcours cyclable peut être garantie.
S'agissant des installations de pêche et de leur accès, déjà prohibé lors des opérations de dépotage de produits dangereux, le PPRT confirmerait cette interdiction en précisant la zone dans laquelle la mesure s'applique sans ajouter de contrainte par rapport à la situation existante.
Pour ce qui est de l'accès au restaurant installé le long du Rhin, il serait maintenu par la route RD3 et des travaux de renforcement du bâtiment seraient prescrits pour protéger les clients.
Quant à la gestion du trafic fluvial en cas d'accident, mise en oeuvre dans le cadre des procédures identifiées dans le plan particulier d'intervention, le PPRT interdit que les bateaux stationnent dans les zones exposées aux risques, laissant libre le transit sur le Rhin à tous les bateaux.
Ces mesures dont on continue à discuter au niveau local, me paraissent adaptées aux risques présentés par le site.
L'État est soucieux de garantir la protection de la population. Tel est l'objet de ces mesures.
Mme la présidente. La parole est à M. Frédéric Reiss.
M. Frédéric Reiss. Merci, madame la ministre, pour cette réponse très complète.
Je ferai juste une dernière remarque : en zone frontalière, il est bon de prendre des mesures en concertation avec son voisin, en l'espèce l'Allemagne, pour que leur application ne donne pas lieu à des interprétations différentes, comme c'est souvent le cas.