procédure pénale
Question de :
M. Julien Aubert
Vaucluse (5e circonscription) - Les Républicains
M. Julien Aubert appelle l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur l'explosion du nombre de cas de violation du secret de l'instruction. Si l'article 11 du code de procédure pénale prévoit que « toute personne qui concourt à cette procédure est tenue au secret professionnel », le nombre de cas où le secret de l'instruction est manifestement violé par la divulgation dans la presse d'informations relatives à des affaires judiciaires, explose. Le code pénal prévoit en son article 226-13, que la violation du secret de l'instruction « est punie d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende ». Or il n'est que trop rarement, voire jamais, fait mention dans la presse de sanction prise par une instance judiciaire pour de tels faits. En conséquence, il lui demande de lui indiquer le nombre d'espèces dans lesquelles une peine a été prononcée sur fondement de l'article 226-13 du code pénal depuis 2002, ainsi que les mesures que le Gouvernement entend prendre afin de rendre cette sanction plus systématique en cas de manquement.
Réponse publiée le 7 juin 2016
Entre 2002 et 2013, 10 condamnations ont été prononcées du chef de violation du secret de l'instruction. Sur la même période, 4 condamnations ont été prononcées pour recel de violation du secret de l'instruction. Les chiffres montrent une grande stabilité du contentieux, une à deux condamnations étant prononcées chaque année. Lorsque l'enquête permet de caractériser l'infraction de violation du secret de l'instruction et d'en identifier l'auteur, le taux de réponse pénale est supérieur à 90%. Le faible nombre de condamnations s'explique par la difficulté d'identifier les auteurs de ce délit lorsqu'il est caractérisé par la divulgation dans la presse d'informations issues de procédures judiciaires, car cette identification suppose alors celle des sources des journalistes. Or, le secret de l'enquête et de l'instruction doit être concilié avec le principe de la liberté d'information, renforcé par les décisions de la cour européenne des droits de l'homme. La loi no 2010-1 du 4 janvier 2010 relative au secret des sources proclame le principe de la protection du secret des sources des journalistes. Elle dispose qu'il ne peut être porté atteinte à ce principe, directement ou indirectement, que si un impératif prépondérant d'intérêt public le justifie et si les mesures envisagées sont strictement nécessaires et proportionnées au but légitime poursuivi. Le droit existant ne définit pas les impératifs prépondérants susceptibles de justifier une atteinte au secret des sources. La cour de cassation a ainsi considéré, dans un arrêt du 6 décembre 2011, que l'exigence de proportionnalité entre l'atteinte au secret des sources et l'infraction poursuivie excluait le recours à des perquisitions ou des interceptions téléphoniques afin de découvrir la source d'un journaliste dans une enquête portant sur des faits de violation du secret professionnel ou du secret de l'instruction, ou de recel de ces délits. Certaines décisions des juges du fond ont à l'inverse estimé qu'une violation du secret de l'instruction pouvait constituer cet impératif prépondérant. Une réforme législative définissant de façon plus claire et plus limitative les conditions de fond et les conditions procédurales permettant de porter atteinte à ce secret est dès lors souhaitable. C'est pourquoi un projet de loi renforçant la protection du secret des sources des journalistes, porté par la garde des sceaux, a été adopté par le conseil des ministres le 12 juin 2013 et déposé le lendemain devant l'assemblée nationale. Ce projet de loi a notamment pour but d'interdire clairement toute atteinte au secret des sources qui aurait pour objet d'identifier l'auteur d'une violation du secret de l'enquête ou de l'instruction. En revanche, en dépit du faible nombre de condamnations observées, le principe du secret de l'instruction et l'incrimination de sa violation sont essentiels et concourent à protéger la personne mise en examen et l'intérêt de l'enquête.
Auteur : M. Julien Aubert
Type de question : Question écrite
Rubrique : Droit pénal
Ministère interrogé : Justice
Ministère répondant : Justice
Dates :
Question publiée le 11 novembre 2014
Réponse publiée le 7 juin 2016