14ème législature

Question N° 715
de M. Napole Polutélé (Socialiste, républicain et citoyen - Wallis-et-Futuna )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Agriculture, agroalimentaire et forêt
Ministère attributaire > Agriculture, agroalimentaire et forêt

Rubrique > outre-mer

Tête d'analyse > COM : Wallis et Futuna

Analyse > agriculture. développement. Office de développement de l'économie agricole d'outre-mer. compétences.

Question publiée au JO le : 17/06/2014 page : 4760
Réponse publiée au JO le : 25/06/2014 page : 4578

Texte de la question

M. Napole Polutélé attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement, sur la situation de l'agriculture des îles de Wallis et Futuna et souligne le rôle essentiel du secteur primaire dans l'économie du territoire. L'agriculture et la pêche constituent en effet la charpente de la vie sociale et économique du territoire. Ces activités de subsistance, pratiquées par toutes les familles, sont principalement de nature vivrière et se développent pour l'essentiel hors de tout circuit marchand. Elles assurent le quotidien des familles et jouent un rôle vital dans le fonctionnement sociétal des îles organisé autour de la "coutume". Il convient de prendre la pleine mesure de cette spécificité si l'on veut comprendre le fonctionnement du territoire. Ce secteur doit aujourd'hui relever trois défis : un défi alimentaire, pour répondre en quantité à la demande et s'adapter à l'évolution des habitudes alimentaires ; un défi environnemental, pour mettre en oeuvre des techniques préservant l'environnement et adaptées à la spécificité des îles ; enfin un défi économique, pour permettre au territoire de structurer son économie et de faire face à la globalisation économique, et plus largement à la mondialisation. Il lui indique que, sur le territoire de Wallis et Futuna, l'agriculture est à la croisée des chemins. La population des îles est en effet partagée entre les valeurs traditionnelles, la coutume et son désir de modernité à l'occidentale. Il ne convient pas d'opposer ces aspirations, mais bien de les rendre compatibles pour ne pas déstabiliser l'ensemble du fonctionnement sociétal des îles. Cette analyse est développée par l'inspecteur général de l'agriculture dans le rapport qu'il a produit en juin 2013. Les préconisations de ce rapport s'articulent autour de trois axes : piloter à long terme le développement du secteur primaire, accompagner ses acteurs, mobiliser les acteurs de la formation, de la recherche et du développement en sa faveur. Il souligne qu'il convient dès à présent de favoriser la mise en oeuvre de mesures concrètes répondant à ces trois axes de développement. Pour accompagner la structuration et la professionnalisation nécessaires du secteur agricole, il considère que l'accompagnement de l'Odeadom pourrait se révéler fort utile. En effet, cet office dispense un appui et une expertise aux filières végétales et animales qui seraient particulièrement nécessaires aux opérateurs de Wallis et Futuna pour faire émerger des filières agricoles viables et pérennes. Or, actuellement, le champ de compétence de l'office ne s'étend pas à Wallis et Futuna. Il souhaite dans ces conditions qu'il puisse soutenir cette demande d'élargissement du champ de compétence de l'Odeadom et la faire aboutir dans les meilleurs délais. Dans l'hypothèse où cela s'avérerait impossible, il demande que soit mis en place un plan pluriannuel de financement et d'encadrement pour le secteur primaire des îles de Wallis et Futuna.

Texte de la réponse

SITUATION DE L'AGRICULTURE DANS LES ÎLES WALLIS ET FUTUNA


M. le président. La parole est à M. Napole Polutélé, pour exposer sa question, n°  715, relative à la situation de l'agriculture dans les îles Wallis et Futuna.

La parole est à M. Napole Polutélé.

M. Napole Polutélé. Monsieur le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, le secteur primaire, tous domaines confondus, joue un rôle essentiel, pour ne pas dire primordial, dans la vie des habitants des îles de Wallis et Futuna. Pour autant, on ne peut en prendre la mesure dans les statistiques économiques.

L'agriculture et la pêche sont véritablement la charpente de la vie sociale, économique, mais aussi culturelle, du territoire. Cette activité vivrière, organisée autour de la « coutume », se développe hors des circuits marchands et permet à chacun de vivre. Il faut en prendre la pleine mesure si l'on veut comprendre le fonctionnement de la société de Wallis et de Futuna.

Le secteur primaire doit relever trois défis : un défi alimentaire afin de satisfaire la demande, un défi environnemental et un défi économique. Il est à la croisée des chemins : la population est partagée entre les valeurs traditionnelles, la coutume et son aspiration à la modernité. Ces trois objectifs sont, non pas contradictoires, mais complémentaires. Il convient de les soutenir et de les rendre conciliables.

L'inspecteur général Jean-Pierre Bastié, dans son rapport de juin 2013, propose des mesures concrètes, comme, par exemple, le développement de filières. Il y a également beaucoup à gagner, monsieur le ministre, à faire du lycée agricole un véritable pôle de formation et de recherche.

Envisager la mise en place d'une véritable stratégie sectorielle de développement du secteur primaire suppose des financements appropriés que le territoire ne peut supporter, compte tenu de ses moyens financiers limités. Wallis et Futuna bénéficient aujourd'hui d'une quote-part des crédits CIOM fléchés pour les collectivités d'outre-mer, hors champ de compétence de l'Office de développement de l'économie agricole des départements d'outre-mer.

L'ODEADOM a pour mission de favoriser la concertation entre les professionnels et l'administration. Il offre un lieu de discussion et de réflexion permettant de confronter les expériences des acteurs du monde agricole ultramarin au niveau régional.

Les îles de Wallis et Futuna ne font pas partie du champ d'intervention de l'ODEADOM, ainsi que les trois autres collectivités du Pacifique. Pourtant, monsieur le ministre, les problématiques de développement de l'agriculture et de la pêche à Wallis et Futuna sont très proches de celles des autres départements et collectivités d'outre-mer : la diversification et le développement de filières agricole, la préservation et la mise en valeur des espaces agricoles et naturels, le renforcement du rôle des chambres d'agriculture, le développement et l'organisation de la filière pêche, le développement de l'aquaculture. La plupart de ces sujets relève bien de la compétence de l'ODEADOM. Aussi, pour mener à bien le plan de développement pluriannuel préconisé par l'inspecteur général Bastié, il est essentiel que la collectivité soit intégrée dans le cadre géographique de l'ODEADOM. Pour cela, il convient de s'interroger sur la possibilité de modifier l'article R.684-1 du code rural sur les missions de l'ODEADOM, afin d'y inclure Wallis et Futuna.

Monsieur le ministre, pouvez-vous aller dans le sens du souhait de Wallis et Futuna d'être éligible à l'ODEADOM ou, à défaut, êtes-vous en mesure de nous proposer un plan pluriannuel de financement pour l'application des propositions Bastié ?

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement.

M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du gouvernement. Monsieur le député, vous avez évoqué le rôle et la place de l'agriculture et de la pêche dans le territoire de Wallis et Futuna. Je partage votre constat : le secteur primaire, qui structure les territoires en France métropolitaine ou dans les outre-mers, est à la fois une source d'activité et de valeur ajoutée. Il faut donc que nous ayons des plans stratégiques de développement.

Ensuite, vous avez évoqué le rôle et la place de l'ODEADOM et, dans le cadre du rapport Bastié, les objectifs que nous nous sommes fixés lors du débat sur la loi d'avenir de l'agriculture, pour engager une double stratégie. Nous voulons en effet développer les marchés locaux et la production locale, tout en préservant les grands atouts de l'agriculture des outre-mers : banane, canne et autres produits à l'exportation.

À partir de là, la question est juridique et porte sur le statut de Wallis et Futuna. L'agriculture est une compétence du territoire, selon l'article 40 du décret no 57-811 du 22 juillet 1957. Désormais, une modification relèverait d'une loi organique – selon l'article 74 de la Constitution.

Afin de répondre à votre souci légitime pour Wallis et Futuna, sans empiéter sur les compétences du territoire, il faudrait amender l'article L.681-3 du code rural et de la pêche maritime. Il serait alors nécessaire d'introduire une phrase précisant : « Cet établissement » – l'ODEADOM –« peut également intervenir à Wallis et Futuna par voie de convention passée avec le territoire ». C'est en effet le territoire qui est compétent en termes d'agriculture. Une convention permettrait de définir les grands axes stratégiques et d'associer Wallis et Futuna à l'expertise de l'ODEADOM.

J'espère, monsieur le député, avoir répondu à votre question pour ce qui est du constat, des objectifs et de la méthode.