14ème législature

Question N° 74923
de Mme Marianne Dubois (Union pour un Mouvement Populaire - Loiret )
Question écrite
Ministère interrogé > Économie, industrie et numérique
Ministère attributaire > Économie, industrie et numérique

Rubrique > commerce et artisanat

Tête d'analyse > grande distribution

Analyse > centrales d'achat. rapprochement. fournisseurs. conséquences.

Question publiée au JO le : 03/03/2015 page : 1430
Réponse publiée au JO le : 03/05/2016 page : 3761

Texte de la question

Mme Marianne Dubois attire l'attention de M. le ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique sur les mouvements constatés, au sein de la grande distribution, de « stratégies d'alliance » pour les achats qui risquent de faire passer le nombre de centrales d'achats de 6 à 4. Elle lui demande ce que lui inspire ces opérations, notamment eu égard aux producteurs, coopératives qui risquent d'être impactés au premier plan, ainsi que pour les consommateurs.

Texte de la réponse

Plusieurs rapprochements entre enseignes de la grande distribution ont été effectués depuis l'automne 2014. Ces rapprochements sont en principe limités à la négociation à l'achat de produits alimentaires ou non alimentaires à marques internationales et nationales, à l'exception des produits frais traditionnels issus des filières agricoles, des produits fabriqués par les PME ainsi que des produits sous marques propres - produits à marques de distributeurs (MDD). Les politiques commerciales de chacune des enseignes, qui incluent la construction de l'assortiment, la politique prix et la politique promotionnelle, restent de leur propre responsabilité. De manière régulière se tiennent des tables rondes sur les relations commerciales dans la filière alimentaire, qui regroupent le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, le ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, la secrétaire d'état chargée du commerce, de l'artisanat, de la consommation et de l'économie sociale et solidaire, les médiateurs interentreprises et des relations commerciales agricoles, les représentants des différentes enseignes et des organisations professionnelles. Les objectifs étaient partagés pour les négociations 2015 : cesser une guerre des prix excessive, sortir d'une logique de confrontation permanente entre fournisseurs et acheteurs, chercher par le dialogue des solutions permettant de prendre en compte les difficultés structurelles ou ponctuelles de certaines filières, notamment pour 2015 celles liées à l'embargo russe. La création d'un comité de suivi des négociations commerciales a été décidée lors de cette table ronde. Ce comité s'est réuni plusieurs fois, à la fin de l'année 2014 et au début d'année 2015. Ce comité est un lieu de dialogue entre les différents acteurs de la distribution (fournisseurs et distributeurs) et d'identification des bonnes et mauvaises pratiques, dans le contexte des rapprochements entre enseignes et de l'application du nouveau dispositif juridique, issu de la loi relative à la consommation, encadrant les négociations commerciales. L'objectif est d'assurer la pérennité des filières et notamment de l'élevage et des fruits et légumes, y compris si des modifications substantielles du contexte entraînaient une réouverture des discussions tarifaires telle que prévue par la loi consommation de mars 2014. Les conséquences éventuelles des rapprochements entre enseignes sur leurs relations contractuelles avec les fournisseurs sont attentivement surveillées par les services de la DGCCRF. Cette direction est chargée d'une mission de contrôle du respect des règles applicables aux relations commerciales, en particulier dans les relations entre fournisseurs et distributeurs dans le secteur de la grande distribution. Les enquêtes des services de la DGCCRF permettent de révéler et de faire sanctionner devant les juridictions civiles tout déséquilibre significatif à l'initiative de l'un des partenaires économiques. Chaque année à l'issue de la période des négociations commerciales, une enquête nationale porte sur les relations entre les principales enseignes de la grande distribution à dominante alimentaire et leurs fournisseurs. Cette année, compte tenu du contexte particulier dans lequel se déroulaient les négociations commerciales, des contrôles ont été réalisés avant l'achèvement de ces négociations. Les pratiques abusives constatées feront le cas échéant l'objet de suites appropriées, et notamment d'assignations. Par ailleurs, sur saisine du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, l'autorité de la concurrence a rendu le 29 octobre 2014 un avis sur l'impact concurrentiel de ces accords. L'autorité a également été saisie par la commission des affaires économiques du Sénat. L'autorité de la concurrence a rendu un avis sur les deux saisines le 1er avril 2015. Elle y indique que si ce type d'accords peut conduire à des effets pro-concurrentiels notamment sur les niveaux de prix des produits de grande consommation achetés par les consommateurs, il présente plusieurs risques concurrentiels sur les marchés amont (fournisseurs) : des risques de limitation de l'offre, une réduction de la qualité ou de l'incitation de certains fournisseurs à innover ou investir du fait de la pression sur les marges des fournisseurs, et aval (distributeurs) : la symétrie des conditions d'achat qui peut entraîner une homogénéisation des prix d'achat favorisant une entente de prix sur le marché de détail. L'autorité de la concurrence formule plusieurs recommandations. Elle invite les distributeurs à prendre des précautions quant à la sélection des fournisseurs concernés par le périmètre des accords, en s'appuyant sur des critères de sélection objectifs et non-discriminatoires compte tenu des incidences que leur choix pourrait avoir sur le marché de l'approvisionnement. Elle préconise un accroissement de la mobilité inter-enseigne pour maintenir la concurrence inter-enseignes. Elle souhaite l'instauration d'une obligation légale d'information préalable sur tout nouvel accord de rapprochement. Enfin, elle propose des modifications législatives pour mieux appréhender les conséquences de ces accords. Certaines des propositions de l'autorité de la concurrence ont été intégrées dans la loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques, telles que l'obligation d'information préalable de l'autorité de tout projet d'accord, ainsi que des dispositions favorisant la mobilité inter-enseignes de commerçants indépendants.