produits alimentaires
Question de :
M. Frédéric Lefebvre
Français établis hors de France (1re circonscription) - Les Républicains
M. Frédéric Lefebvre attire l'attention de M. le ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique sur l'engagement pris par le Gouvernement lors de l'examen du projet de loi pour la croissance et l'activité pour lutter contre le gaspillage alimentaire. Au mois de décembre 2011, l'auteur de la présente question avait, alors qu'il était secrétaire d'État chargé de la consommation, lancé un appel à la générosité des entreprises de la grande distribution afin que les « Restos du cœur », la « Croix-Rouge », le « Secours populaire » et la « Banque alimentaire » puissent répondre aux demandes dont ils faisaient l'objet. Cet appel avait permis à ces entreprises de fournir aux associations de quoi fournir des repas aux mois de février et mars 2012. Au cours de l'hiver 2014-2015, la situation a hélas empiré et aujourd'hui comme le dit si crûment le président du Secours populaire : « La faim dans le monde, elle est chez nous ». Dans le cadre d'une enquête du Secours populaire de la fin de l'année 2013, 41 % des Français interrogés ont affirmé avoir déjà connu une situation de pauvreté, 62 % des mères seules ont confié avoir rencontré des difficultés à se procurer une alimentation saine et équilibrée, tout comme 37 % de l'ensemble des personnes interrogées. Derrière ces chiffres, il y a une réalité humaine qui nous oblige et un constat que nous ne pouvons plus ignorer : un nombre grandissant de Français et d'Européens ne peuvent même plus faire face financièrement à leurs besoins premiers. Il est de la responsabilité des décideurs politiques nationaux de prendre en compte cette réalité sociale et de prendre les mesures qui permettront de répondre aux attentes d'un nombre croissant de nos compatriotes. Depuis le mois de décembre 2014, un élu municipal de Courbevoie organise régulièrement, après avoir lancé un appel sur les réseaux sociaux, des distributions de denrées invendues des supermarchés de sa commune à des personnes dans le besoin. Cette initiative, qui a permis de distribuer à chaque fois entre 10 kilogrammes et 20 kilogrammes de denrées par supermarché, doit être saluée, mais elle pose la question de la réglementation applicable, car aujourd'hui nombre de grandes surface n'osent s'engager dans cette démarche par elles-mêmes car la loi le leur interdit, ce qui se traduit, dans une France qui a faim, par des gaspillages alimentaires intolérables. C'est pourquoi l'auteur de la présente question a, lors des débats sur le projet de loi relatif à la croissance et l'activité, déposé un amendement visant à permettre la mise en place d'une convention d'organisation de la collecte sécurisée des denrées alimentaires invendues, encore consommables, au profit d'une ou plusieurs associations d'aide alimentaire, pour les grandes surfaces de plus de 400 m2. Lors de l'examen de cet amendement, le 30 janvier 2015, le Président du groupe majoritaire avait déclaré qu'il convenait de donner « du temps à la question dans le cadre d'une niche parlementaire, en plaçant bien entendu le Gouvernement dans l'obligation de soutenir un texte reprenant complètement les conclusions de la mission parlementaire » confiée sur le sujet à M. Guillaume Garot. Dans le prolongement de cet engagement, le ministre de l'économie avait ajouté qu' « un délai de deux mois permettrait d'obtenir le travail complet de M. Garrot, sachant qu'un point d'étape sera fait dans quelques semaines. » et qu'il fallait « que la séance, le groupe socialiste et les différents présidents s'accordent pour trouver la bonne niche parlementaire, afin que l'on ait la possibilité d'examiner ce texte à l'issue de ces deux mois ». Ce délai de deux mois étant proche d'être écoulé, et aucune annonce n'ayant été faite quant au dépôt sur le bureau de l'Assemblée nationale du texte annoncé pour lutter contre le gaspillage alimentaire, il lui demande de lui indiquer si le Gouvernement entend tenir cet engagement.
Réponse publiée le 30 juin 2015
La lutte contre le gaspillage alimentaire représente un véritable enjeu social, environnemental et économique auquel le Gouvernement est particulièrement sensible. La loi d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt du 13 octobre 2014 inscrit d'ailleurs la lutte contre le gaspillage alimentaire comme l'un des quatre grands enjeux prioritaires de la politique publique de l'alimentation. Cette évolution législative est un signal fort et s'inscrit dans la continuité du travail engagé par le Gouvernement depuis plus de deux ans sur le sujet, qui s'est traduit par le lancement du pacte national de lutte contre le gaspillage alimentaire en juin 2013. Chaque partie prenante de la chaîne alimentaire s'engageait dans ce pacte à mettre en place à son niveau un certain nombre d'actions de sensibilisation des consommateurs et des professionnels, ainsi que des actions concrètes de prévention du gaspillage alimentaire. En effet, le gaspillage alimentaire existe à chaque maillon de la filière alimentaire (production agricole, marchés de gros, industries agroalimentaires, artisans, grande distribution, restauration collective, restauration commerciale...) et il est donc indispensable d'agir au niveau de chacun de ces maillons. Le comité de suivi du pacte, composé des différents acteurs impliqués et piloté par le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement, réuni le 16 octobre 2014, à l'occasion de la journée nationale de lutte contre le gaspillage alimentaire, a permis de faire le point sur les avancées enregistrées depuis le lancement du pacte : mise en réseau des acteurs, développement de la communication sur le sujet avec une campagne de communication du ministère de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, diffusion des initiatives vertueuses. Par ailleurs, le cadre réglementaire des dons et notamment la responsabilité en matière sanitaire du donateur a été clarifié par un arrêté du 24 septembre 2015, ce qui était une attente forte des associations caritatives d'aide alimentaire. Afin de poursuivre le travail engagé, le Premier ministre a, le 15 octobre 2014, confié à M. Guillaume Garot, ancien ministre délégué chargé de l'agroalimentaire et député de Mayenne, une mission parlementaire ayant pour objectif d'identifier les freins qui persistent tout au long de la chaîne alimentaire et de proposer des adaptations du cadre législatif et réglementaire. M. Garot a remis son rapport le 14 avril 2015. Il confirme la nécessité d'agir à tous les maillons de la chaîne alimentaire. Ce rapport s'est traduit immédiatement par des mesures législatives intégrées dans le projet de loi sur la transition énergétique et la croissance verte, en cours de discussion au Parlement. Il s'agit notamment d'inscrire une hiérarchie des priorités dans la lutte contre le gaspillage (prévention, utilisation à des fins d'alimentation humaine, utilisation à des fins d'alimentation animale, valorisation énergétique) avec l'objectif de ne jeter qu'en dernier recours. La loi règle une difficulté importante concernant le don des produits sous marque de distributeurs. Ces produits sont fabriqués par un industriel pour le compte d'une grande surface sur la base d'un cahier des charges fixé par celle-ci. Seront désormais interdites les clauses contractuelles empêchant que ces produits, lorsqu'ils sont refusés par un distributeur par exemple pour des défauts d'étiquetage (ce qui n'empêche aucunement le produit d'être consommé) puissent être donnés par les fabricants à des associations. Le projet de loi prévoit également que les dons alimentaires effectués par des grandes surfaces à des associations d'aide alimentaire fassent l'objet de convention entre les acteurs, afin d'améliorer la qualité des aliments donnés, l'adéquation entre les produits donnés et les besoins des associations... Cette mesure donnera aux associations la capacité d'utiliser au mieux ces dons, ce qui était leur demande prioritaire, plus qu'une obligation de don difficile à mettre en oeuvre, qui poserait des problèmes de gestion des dons aux associations et qui mettrait en péril des partenariats entre associations et grandes surfaces basés sur le volontariat et construits depuis de nombreuses années. Le projet de loi réaffirme par ailleurs l'importance de l'éducation à la lutte contre le gaspillage alimentaire dans le cadre de l'éducation à l'alimentation prévue par la loi d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt du 13 octobre 2014. Enfin, le projet de loi prévoit que la lutte contre le gaspillage fasse désormais partie des thématiques à prendre en compte par les entreprises dans le cadre de leurs obligations en matière de responsabilité sociale et environnementale (RSE). Le Gouvernement sera attentif à la mise en oeuvre concrète de ces dispositions. Il faut par ailleurs que l'effort de mobilisation se poursuive à tous les niveaux, en cherchant le plus possible le développement de partenariats entre tous les acteurs désormais prêts à agir.
Auteur : M. Frédéric Lefebvre
Type de question : Question écrite
Rubrique : Agriculture
Ministère interrogé : Économie, industrie et numérique
Ministère répondant : Agriculture, agroalimentaire et forêt
Dates :
Question publiée le 31 mars 2015
Réponse publiée le 30 juin 2015