Question de : M. Jacques Cresta
Pyrénées-Orientales (1re circonscription) - Socialiste, écologiste et républicain

M. Jacques Cresta appelle l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice sur les pensions alimentaires reversées dans les situations de résidence alternée. La résidence alternée est le résultat de l'évolution de la notion de « chef de famille » vers celle plus contemporaine d' « autorité parentale ». C'est par la loi n° 2002-305 du 4 mars 2002 relative à l'autorité parentale que la résidence alternée a fait son entrée dans la législation française. Deux études menées par le ministère de la justice permettent de donner des éléments chiffrés : la première est publiée en novembre 2003 et la seconde en novembre 2013 qui analyse un échantillon de 6 042 décisions définitives de garde rendues par les juges des affaires familiales en juin 2012. Elles permettent d'observer qu'entre 2003 et 2012 le taux de demandes de résidence alternée est passé de 10,3 % à 17,8 %, et la proportion des résidences alternées homologuées ou prononcées par la justice de 8,8 % à 17 %, soit un doublement sur la même période. La résidence alternée comme solution de garde en cas de divorce ou de séparation des parents est de plus en plus envisagée par les parents, ce qui constitue un marqueur fort de l'évolution de la société et de la volonté d'implication des pères dans l'éducation de leurs enfants. Le Sénat a accompagné ce processus en votant, le 17 septembre 2013, dans le cadre de l'examen de la loi n° 2014-873 du 4 août 2014 pour l'égalité réelle entre les femmes et les hommes, un amendement visant à privilégier la résidence alternée et en instaurant un délit d'entrave à l'exercice de l'autorité parentale. Néanmoins, le partage des frais inhérents à ce mode de garde est parfois peu équitable dans les situations de résidence alternée. En effet, la contribution à l'entretien et à l'éducation des enfants, communément appelée pension alimentaire, est fixée selon un barème précis, en fonction des critères de revenus et du nombre d'enfants. Même si l'enfant réside chez ses deux parents et que ces derniers participent à la même hauteur aux charges qui lui sont relatives, le parent ayant le revenu le plus élevé verse une contribution à l'entretien et à l'éducation des enfants au second parent. Cette contribution s'ajoute à d'éventuels salaires et prestations sociales et familiales, celles-ci ne pouvant être, selon la loi, versées qu'à un seul des deux parents et non pas réparties équitablement. Dans de nombreux cas, le parent versant ladite contribution voit donc ses revenus extrêmement réduits et jusqu'à parfois un niveau inférieur à ceux du parent aidé. La situation peut s'inverser et c'est finalement le parent qui avait les revenus les plus élevés qui peut se retrouver dans une situation de précarité financière, affectant à terme les principaux intéressés : les enfants. Aussi l'interroge-t-il sur les mesures à mettre en place pour mieux prendre en compte la situation financière des deux parents et ainsi améliorer l'équité financière entre ces derniers dans les cas de résidence alternée.

Réponse publiée le 14 juin 2016

Le code civil prévoit que chacun des parents contribue à l'entretien et l'éducation des enfants à proportion de ses ressources, de celles de l'autre parent, ainsi que des besoins de l'enfant, cette contribution prenant en général la forme d'une pension alimentaire en cas de séparation des parents. La résidence alternée, organisation choisie par les parents séparés dans 19% des cas, conduit très majoritairement à un partage relativement égalitaire des frais liés à l'enfant et à l'absence de versement d'une telle pension. A cet égard, la prise en charge directe des frais a significativement progressé puisque, dans le cadre d'une résidence alternée, cette forme de contribution est trois fois plus souvent choisie par les parents en 2012 qu'en 2003. Elle fait par ailleurs l'objet d'une homologation par le juge. Cependant, plusieurs situations peuvent justifier le versement d'une pension. Il en est ainsi lorsque, malgré la résidence en alternance, un seul des parents assume principalement la charge financière de certaines dépenses (frais de cantine, activités extrascolaires, dépenses de santé…) ou lorsque l'un des parents est dans l'incapacité d'assumer financièrement les frais liés à cette organisation. La résidence en alternance résultant le plus souvent d'un accord entre parents, ces derniers s'entendent en général sur le principe et le montant de la pension alimentaire. Dans les autres cas, le juge aux affaires familiales fixe le montant de la pension à l'aide d'une table de référence à valeur purement indicative publiée par le ministère de la justice depuis 2010 et qui a été établie en veillant à ce qu'il ne soit pas donné à l'obligation alimentaire un objectif de redistribution des ressources. Plus précisément, le choix a été fait quant à la règle de calcul retenue pour l'élaboration de ce référentiel, de ne prendre en compte que les seules prestations sociales assurant un revenu à chacune des parties et, également, de ne pas prendre en considération la charge des impôts car il serait illogique de faire varier ces pensions en fonction des impôts qui s'adaptent annuellement à leur montant. Toutefois, l'impact du système socio-fiscal sur les séparations ne saurait être ignoré et des réflexions sont en cours pour soutenir les juridictions dans leur tâche d'appréciation de la contribution à l'entretien et l'éducation de l'enfant par la détermination la plus précise possible du coût de l'enfant et du taux d'effort équitable pour le débiteur de la pension. Dans ce cadre une attention particulière sera accordée à la situation spécifique de la résidence alternée.

Données clés

Auteur : M. Jacques Cresta

Type de question : Question écrite

Rubrique : Famille

Ministère interrogé : Justice

Ministère répondant : Justice

Dates :
Question publiée le 12 mai 2015
Réponse publiée le 14 juin 2016

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