aide au développement
Question de :
Mme Martine Lignières-Cassou
Pyrénées-Atlantiques (1re circonscription) - Socialiste, écologiste et républicain
Mme Martine Lignières-Cassou attire l'attention de Mme la secrétaire d'État, auprès du ministre des affaires étrangères et du développement international, chargée du développement et de la francophonie sur la politique d'aide au développement mise en œuvre par la France. Dans un récent rapport intitulé « Donner la priorité aux plus pauvres » l'organisation internationale ONE France qui mène un combat contre l'extrême pauvreté au niveau mondial dénonce la réduction de l'aide au développement versée par la France aux pays les plus pauvres. La France a diminué son aide à destination des pays en développement de 10 % depuis 2011 et n'alloue que 0,36 % de sa richesse à cette politique soit une part inférieure à l'objectif de 0,7 % fixé par l'ONU. Par ailleurs, la répartition de l'aide au développement néglige les pays les moins avancés qui représentent seulement un quart de l'aide octroyée par la France alors que ces états constituent le groupe des pays les plus pauvres de la planète. Aussi, elle lui demande si le Gouvernement compte prendre des mesures pour augmenter la contribution de la France à l'aide au développement tout en renforçant la part des aides versées aux pays les moins avancés.
Réponse publiée le 15 décembre 2015
L’aide publique au développement (APD), traduction de la solidarité des Etats, reste le pivot de l’action publique française en matière d’aide au développement. La France souscrit à l’analyse selon laquelle elle est essentielle, en particulier pour les pays les moins avancés (PMA). L’APD atteint dans certains pays jusqu’à 70 % des apports de financement extérieurs et 43% des recettes budgétaires (notamment ceux en situation de conflit ou de fragilité). C’est pourquoi la France a plaidé, avec l’Union européenne (UE), pour que la spécificité de leur situation en regard de l’APD soit reconnue dans le programme d’action d’Addis-Abeba (PAAA), adopté le 15 juillet 2015. Ce dernier réaffirme la nécessité de leur allouer la part la plus concessionnelle de l’aide publique au développement, dans la mesure où ils ont besoin d’un soutien mondial renforcé pour surmonter les défis structurels auxquels ils sont confrontés, en vue de la mise en œuvre de l’agenda 2030 de développement durable et des objectifs de développement durable (ODD). Cela, d’autant plus qu’ils éprouvent des difficultés à mobiliser d’autres ressources financières. La France se réjouit que les engagements européens en matière d’aide publique au développement soient repris dans le PAAA (avec l’objectif collectif de 0,7% dans le cadre temporel de l’agenda 2030 et celui de 0,15 à 0,20% pour les PMA). La France porte également une vision élargie du financement du développement durable. La réponse à l’ensemble des enjeux de la coopération internationale nécessite la mobilisation de volumes de financements qui vont au-delà de la seule aide publique au développement traditionnelle. En 2014, l’activité du groupe Agence française de développement (AFD) dans les PMA, qui comprend les outils les plus concessionnels et l’ensemble des flux contribuant au développement, s’est établie à 1,5 milliard d’euros (724 millions d’euros en 2010), soit le plus haut niveau jamais atteint par le groupe AFD dans ces pays. En 2014, les secteurs des infrastructures, du développement urbain, de l’eau et l’assainissement concentrent 52% des autorisations de financement dudit groupe dans les PMA. Au sein du comité d’aide au développement (CAD) de l’OCDE, la France a la particularité de prêter directement à des collectivités locales dans les pays les moins avancés. A titre d’exemple, un prêt de 10 millions d’euros (2008-2014) a été octroyé à la ville de Dakar (Sénégal) pour l’amélioration durable de l’éclairage public, bénéficiant à 70% des habitants de la capitale sénégalaise. Au niveau multilatéral, la France défend la concentration des moyens en faveur des pays les plus vulnérables, ainsi qu’une réforme des modalités d’intervention, au travers d’une meilleure coordination entre banques multilatérales et de procédures plus flexibles. La France est ainsi l’un des contributeurs les plus importants aux mécanismes d’aide multilatérale à destination des pays les moins avancés. Elle est le deuxième contributeur au 11ème fonds européen de développement (FED), qui est l’instrument principal de l’APD européenne en direction des pays d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique (ACP), avec 5,4 milliards d’euros sur 7 ans (17,81% du total du 11ème FED). En 2014, la contribution de la France s’est élevée à 640 millions d’euros. Les 16 pays pauvres prioritaires de l’APD française concentrent 19% des ressources du FED. La France est également le cinquième contributeur à l’association internationale de développement (AID), guichet concessionnel du groupe Banque mondiale. Sous l’impulsion de la France, la réforme du comité d’aide au développement de décembre 2014 prévoit, à partir de 2018, une révision des critères d’éligibilité pour que des prêts puissent être comptabilisés en aide publique au développement. Ainsi, pour qu’un prêt soit comptabilisé en APD, le taux d’actualisation et le seuil d’élément-don minimum à respecter sont différenciés en fonction de la catégorie de pays bénéficiaires. A titre d’exemple, pour qu’un prêt octroyé à un PMA – ou à un autre pays à faible revenu – soit éligible à l’APD, il devra comporter un élément-don minimum de 45%, contre 15% pour les pays à revenu intermédiaire tranche inférieure (PRITI) et 10% pour les pays à revenu intermédiaire tranche supérieure (PRITS), calculé en utilisant un taux d’actualisation de 9% (contre 7% pour les PRITI et 6% pour les PRITS). En comparaison, le seuil d’élément-don minimum à respecter était de 25% et le taux d’actualisation de 10% dans le dispositif précédent, sans différenciation en fonction des récipiendaires. La France a plaidé et obtenu que soit inséré un volet « sauvegarde » dans la réforme en matière de soutenabilité de la dette des pays récipiendaires : outre les seuils minimum de concessionnalité, il est désormais inscrit explicitement dans les règles du CAD que les prêts octroyés par les bailleurs doivent respecter les règles du FMI et/ou de la Banque mondiale en matière d’endettement. En conséquence, les services de l’OCDE pourront refuser de compter un prêt qui ne respecterait pas ces critères. En cette année 2015, cruciale pour le développement durable, le financement du développement change et s’adapte à de nouveaux enjeux. Le PAAA en est l’illustration. Il entérine une vision modernisée et multi-acteurs du financement du développement, fondée sur des principes de durabilité et d’universalité. Il accorde une attention particulière aux pays les plus vulnérables, dont les pays les moins avancés. Cette nouvelle vision repose sur la mobilisation accrue des ressources domestiques, sur le déploiement d’instruments et d’outils financiers publics et privés adaptés, permettant des effets catalytiques. Il met aussi l’accent sur le rôle des sciences, des technologies et de l’innovation pour l’atteinte des objectifs de développement durable, sur les financements innovants, dont les taxes sur le carbone. Il appelle en outre à un partenariat global et multi-acteurs pour le développement durable dépassant les clivages nord/sud. Le PAAA est partie intégrale du nouvel agenda 2030 du développement durable qui a été adopté par les chefs d’Etat, le 27 septembre 2015, lors du sommet spécial sur le développement durable, à New York.
Auteur : Mme Martine Lignières-Cassou
Type de question : Question écrite
Rubrique : Politique extérieure
Ministère interrogé : Francophonie
Ministère répondant : Francophonie
Dates :
Question publiée le 2 juin 2015
Réponse publiée le 15 décembre 2015