Question de : M. Thierry Lazaro
Nord (6e circonscription) - Les Républicains

M. Thierry Lazaro attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur le référé sur la gestion des carrières dans la police et la gendarmerie nationales, rendu public par la Cour des comptes le 20 avril 2015. Elle estime que les réformes coûteuses mises en œuvre de 2004 à 2012 dans le but d'accélérer le déroulement de carrières des policiers et des gendarmes ont manqué d'une vision stratégique. Elles ont finalement conduit à déséquilibrer fortement la structure de ces corps de fonctionnaires et à priver une partie d'entre eux de perspectives de carrières. Par ailleurs les facilités de service accordées aux représentants des organisations syndicales dans la police nationale ne sont pas suffisamment contrôlées. Aussi il souhaite connaître la suite qu'entend réserver le Gouvernement à la recommandation de la Cour visant à développer les outils permettant d'anticiper la gestion des ressources humaines à travers, notamment, des parcours de carrières types, des analyses prospectives et des simulations.

Réponse publiée le 28 février 2017

Par un référé du 3 février 2015, la Cour des comptes a fait part au ministre de l'intérieur d'observations concernant la gestion des carrières dans la police et la gendarmerie nationales. Le ministre de l'intérieur y a répondu par courrier du 20 avril 2015. S'agissant de la recommandation no 1, objet de la présente question écrite, les réponses suivantes peuvent y être apportées. S'agissant de la gendarmerie nationale, comme le ministre a pu l'indiquer à la Cour des comptes en réponse au référé, et bien qu'il soit toujours possible d'améliorer les outils d'anticipation, l'analyse sous-jacente méconnaît le contexte de la mise en œuvre du plan d'adaptation des grades aux responsabilités exercées (PAGRE). Comme l'indiquait la Cour elle-même dans son rapport public thématique de mars 2013, le PAGRE a été initié en 2005 par le ministère de la défense suite au constat du Haut comité d'évaluation à la condition militaire (HCECM) d'un différentiel important de positionnement et de rémunération entre les militaires et le reste de la fonction publique. Le PAGRE s'inscrivait donc dans une logique de rattrapage visant à corriger cet écart. Son « objectif était double : renforcer l'encadrement de la gendarmerie pour améliorer son efficacité au regard des impératifs de sécurité et mieux reconnaître les responsabilités exercées par les sous-officiers et officiers de gendarmerie (1) ». Son adaptation en 2008 visait à tenir compte de la Révision générale des politiques publiques (RGPP), de la politique de transformation de postes destinée à recentrer les militaires sur leur cœur de métier, et des enseignements des études liées à la « parité globale » avec la police nationale. Elle a conduit à abaisser la cible du volume des officiers de 9 000 à 6 498 avec une révision corrélative du volume de sous-officiers supérieurs pour éviter tout engorgement sommital. Cette adaptation témoigne donc d'une prise en compte des besoins dans un contexte évolutif et relativise l'analyse de la Cour. Il semble également nécessaire de remettre cette recommandation en perspective avec les dispositifs d'anticipation du ministère. La gendarmerie a développé une approche prospective de ses ressources humaines, tant au travers de l'évaluation des compétences nécessaires qu'au travers d'études prévisionnelles démographiques. Cette méthodologie lui a toujours permis d'assurer une gestion rationnelle et attractive des carrières dans le strict respect des dotations budgétaires. Pour prendre en compte les évolutions de son environnement, la gendarmerie a, par ailleurs, engagé en 2013 un projet d'ampleur visant à rénover la gestion des officiers. Une « nouvelle gouvernance » et la définition d'une nouvelle cible pour le corps des officiers de gendarmerie (6 277) sont la traduction d'une stratégie pluriannuelle des ressources humaines, qui tient compte de la montée en puissance du corps des officiers du corps technique et administratif de la gendarmerie nationale (2) et de la poursuite des transformations d'emplois. Des plans pluriannuels définissant une stratégie de gestion des corps militaires de sous-officiers de la gendarmerie sont également à l'étude. La gendarmerie a ainsi défini avec précision son référentiel d'organisation et, avec une vision prospective, ses besoins fonctionnels dans le cadre des orientations stratégiques de sa politique de ressources humaines à l'horizon des cinq prochaines années. S'agissant de la police nationale, elle s'est engagée dans une véritable dynamique de gestion prévisionnelle des emplois, des effectifs et des compétences. Il convient, en premier lieu, de souligner la mise en œuvre, au premier semestre 2016, d'une revue des cadres pour le corps de conception et de direction de la police nationale, menée par la direction des ressources et des compétences de la police nationale (DRCPN) en association avec les directions d'emploi. Cet outil vise à mieux identifier et répertorier les compétences des commissaires et à constituer des viviers utilisables pour répondre aux besoins des autorités d'emploi. La mise en place de cette démarche répond à plusieurs objectifs : l'aide à la construction et l'accompagnement des projets professionnels et la validation des parcours de carrière ; la constitution de viviers de compétences et de potentiels ; l'objectivation et la validation des compétences ; une mobilité accrue entre les différentes directions d'emploi ; l'objectivation des critères de mobilité et d'affectations. Les revues de cadre se mettent progressivement en place depuis le début du second semestre 2016 et traitent les cohortes de commissaires ciblées en fonction de l'objectif recherché (mobilités fonctionnelles, préparation de l'avancement, hauts potentiels…). Elles permettent l'analyse croisée des informations détenues par les directions d'emploi, des données issues de l'évaluation annuelle et de celles recueillies via les entretiens de carrière et les missions d'aide aux managers du bureau des commissaires de police de la DRCPN. Chaque revue de cadres sera gérée par une commission ad hoc réunie pour la circonstance, comprenant le bureau des commissaires de police et l'ensemble des directions d'emploi. Il convient, en second lieu, de souligner le plan managérial de la police nationale, élément central du plan managérial du ministère de l'intérieur. Le périmètre « police nationale » a pleinement participé en 2015 et 2016 à l'élaboration de ce plan, qui vise, en premier lieu, à développer et renforcer les outils et méthodes de pilotage et d'animation de la gestion du corps de conception et de direction de la police nationale afin de favoriser le décloisonnement entre directions actives, le développement de parcours diversifiés et le rayonnement du corps et de l'institution policière. La contribution au plan managérial ministériel s'articule, en première phase, sur la consolidation des pratiques déjà mises en œuvre au profit des commissaires de police. Elle prévoit également l'extension progressive aux autres corps recensés (commandants de police et ingénieurs de police technique et scientifique), ce qui nécessite au préalable l'achèvement de processus et des réflexions en cours (nomenclature du corps de commandement, réforme de la filière scientifique) ainsi que l'organisation d'échanges avec les organisations syndicales et les directions d'emploi. La gouvernance de cette politique managériale est mise en œuvre par la DRCPN avec le réseau des conseillers « parcours professionnels ». Cette gouvernance s'exerce dans le dialogue et la complémentarité avec les directions d'emplois, dont le rôle de ressources humaines de proximité doit être valorisé dans cette dimension managériale. Concernant l'élaboration de parcours-type et les simulations, l'ensemble des dispositions fixant les obligations statutaires et les modalités de gestion ont fait l'objet de profondes modifications pour prendre en compte, d'une part, l'application des dispositions du protocole dit PPCR (Parcours professionnels, carrières, rémunérations) signé sous l'égide du ministère chargé de la fonction publique et, d'autre part, les mesures spécifiques du Protocole pour la valorisation des carrières, des compétences et des métiers dans la police nationale signé le 11 avril 2016 entre le ministre de l'intérieur et les organisations syndicales. Les effets de ces deux ensembles de mesures conduisent nécessairement à une modification des parcours et des perspectives de déroulement de carrière des agents concernés. Les études et documents permettant la simulation de parcours-types feront l'objet d'une mise à jour dès que ces éléments seront stabilisés.

Données clés

Auteur : M. Thierry Lazaro

Type de question : Question écrite

Rubrique : Sécurité publique

Ministère interrogé : Intérieur

Ministère répondant : Intérieur

Dates :
Question publiée le 30 juin 2015
Réponse publiée le 28 février 2017

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