budget : services extérieurs
Question de :
M. Frédéric Lefebvre
Français établis hors de France (1re circonscription) - Les Républicains
M. Frédéric Lefebvre attire l'attention de M. le ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique sur le rapport d'information de la commission des finances de l'Assemblée nationale sur l'évaluation de l'action de la douane dans la lutte contre les fraudes et trafics. Ce rapport présente une remise en cause de la capacité des douanes du Benelux, et notamment celles du Pays-Bas, à contrôler les flux de marchandises qui transitent dans leurs ports et aéroports. La concurrence entre les ports de la Nothern Range pour la captation de parts de marché les a détournés de leur objectif principal et a conduit à la baisse du nombre et de l'efficacité des contrôles. Bien que la douane néerlandaise a développé des méthodes innovantes en termes de contrôles censés être plus efficaces et moins pénalisants pour les opérateurs économiques, les effectifs d'agents de douane en charge du contrôle ne sont pas élevés au regard du flux de marchandises à contrôler. Les statistiques disponibles dans ce rapport permettent de se rendre compte de la situation, le taux de contrôle théorique dans le port de Rotterdam étant de 0,68 % et de 0,79 % si l'on ajoute les contrôles par scanner. La France est contrainte de se remettre à la vigilance de ces partenaires européens, dont les ports servent de premier point d'entrée et de contrôle sur les cargaisons. Par conséquent, il lui demande de lui préciser quelles sont les mesures envisagées, en lien avec nos partenaires européens, pour densifier le contrôle au sein des grands ports européens afin d'assurer un meilleur contrôle des fraudes et trafics.
Réponse publiée le 16 mai 2017
L'action douanière s'exerce dans un cadre réglementaire et avec des finalités identiques en France et dans les autres pays de l'Union européenne (UE). Cette convergence découle du cadre réglementaire européen : l'Union douanière est l'une des réalisations les plus anciennes (1968 avec le tarif douanier commun) et les plus achevées de l'Union. Le nouveau code des douanes de l'Union (CDU) adopté en 2013, et qui est entré en application le 1er mai 2016, ne fixe pas seulement les règles du jeu, communes à toutes les administrations douanières, mais il définit aussi une vision partagée du rôle et des missions de la douane. Le CDU se fixe pour objectifs la dématérialisation totale des procédures douanières, la fluidification accrue d'un dédouanement conçu à l'échelle européenne (dédouanement centralisé) et fait du statut d'opérateur économique agréé (OEA) le pivot des facilités douanières accordées aux entreprises. En France, il existe peu d'administrations nationales qui évoluent dans un cadre d'action presque totalement communautarisé. Depuis les attentats du 11 septembre 2001 aux États-Unis, la douane s'est également vue confortée dans sa mission de sûreté et de sécurité sur les échanges internationaux de marchandises, pour prévenir la menace terroriste. Le projet « import control system » (ICS) résulte de la volonté de la Commission et des États membres de sécuriser les flux internationaux de marchandises, tant en termes de sûreté que de sécurité conformément au règlement CE no 1875/2006 du 18 décembre 2006, dit amendement sûreté-sécurité. Il est entré en vigueur le 1er janvier 2011. Ainsi, en matière de ciblage les douanes européennes coopèrent dans le cadre du système ICS afin de prévenir la menace terroriste, notamment. Toutes les marchandises qui arrivent ou qui transitent sur le sol européen doivent faire l'objet d'une déclaration sommaire d'entrée (appelé ENS), envoyée à la douane du pays du premier port ou aéroport touché en Europe. Dans le système ICS l'analyse de risque et la décision de contrôle sont prises par l'administration des douanes du premier port/aéroport touché. Le contrôle peut être réalisé en ce point ou différé dans le port/aéroport de destination. Ce système crée une solidarité de fait entre les douanes européennes. Si ICS a permis la réalisation d'un rideau supplémentaire de protection et des nouvelles possibilités en matière de ciblage, le champ d'application de ce ciblage y a été limité par la réglementation. En effet, il s'avère que les ports français ne sont que marginalement premier port d'entrée dans l'Union. La douane française ne peut donc effectuer de ciblage ou d'analyse de risque pour les marchandises déchargées mais pour lesquelles la France n'est pas le premier point d'entrée dans l'UE. De ce fait, la réglementation nationale a prévu la mise en place de la déclaration sommaire de dépôt temporaire anticipée (DSDT), entrée en vigueur au 1er septembre 2015. La DSDT permet donc une analyse de risque et un ciblage sur la totalité des marchandises qui sont déchargées dans un port français. Ce dispositif est donc de nature à améliorer très fortement les capacités de ciblage sur le territoire national : les capacités techniques des modules de ciblages sont reconnues, et les flux déchargés dans nos ports, qui seront concernés par la nouvelle obligation de dépôt d'une DSDT anticipée sont très importants. Par ailleurs, les méthodes de contrôles des administrations douanières sont très proches. Si les Pays-Bas ont été des pionniers dans les techniques d'analyse de risque et de ciblage, toutes les douanes européennes sont désormais converties à ces méthodes. Les Néerlandais ont cependant conservé une longueur d'avance en créant des centres dédiés à l'analyse de risque, au ciblage et à la programmation des contrôles. Ces centres sont chargés à la fois de réaliser des analyses de risque (système du « scoring »), de créer des profils de contrôles et de programmer les contrôles pour les services de terrain. Ces centres sont ainsi en mesure d'effectuer en temps réel une évaluation de la pertinence des profils de risque et de les modifier au regard des résultats obtenus. Ces centres fonctionnent également comme services « support » pour les unités de terrain. La création du Service national d'analyse de risque et de ciblage (SARC) le 1er juin 2016 s'apparente aux centres de ciblage néerlandais dans leur finalité et leurs méthodes de travail. Il permet de centraliser les fonctions d'analyse de risque et de mieux orienter les contrôles et les enquêtes à tous les stades du dédouanement (avant, pendant et a posteriori). Enfin, la coopération est un outil fondamental de coordination et de convergence des pratiques entre Etats-membres. Elle s'exerce essentiellement dans le cadre général de l'assistance administrative mutuelle internationale (AAMI). Au sein de l'UE cette coopération s'appuie sur deux cadres juridiques distincts : - un pour les matières douanières communautarisées relevant de l'ex-1er pilier (désormais les articles 30 à 32 du TFUE), la coopération s'exerce dans le cadre des règlements du Conseil CE no 515/97 du 13 mars 1997 et UE no 389/2012 du 2 mai 2012 ; - un pour les sujets relevant de l'ex-3ème pilier (désormais l'article 87 du TFUE), elle s'exerce dans le cadre de la Convention dite de « Naples II » du 18 décembre 1997 (acte du Conseil no 98/C 24/01). Plus spécifiquement, la coopération opérationnelle s'articule également autour du réseau RALPH qui réunit sous l'égide de la DG TAXUD les autorités douanières des ports de Rotterdam/Anvers/Felixstowe/Le Havre/Hamburg/Bilbao/Leixos/Szczecin. Les discussions portent sur des sujets très variés de logistique portuaire, de procédures de dédouanement, d'organisation, de ciblage et de LCF.
Auteur : M. Frédéric Lefebvre
Type de question : Question écrite
Rubrique : Ministères et secrétariats d'état
Ministère interrogé : Économie, industrie et numérique
Ministère répondant : Économie et finances
Dates :
Question publiée le 7 juillet 2015
Réponse publiée le 16 mai 2017