14ème législature

Question N° 89211
de M. Hervé Féron (Socialiste, républicain et citoyen - Meurthe-et-Moselle )
Question écrite
Ministère interrogé > Culture et communication
Ministère attributaire > Culture et communication

Rubrique > audiovisuel et communication

Tête d'analyse > organisation

Analyse > film sur Internet. perspectives.

Question publiée au JO le : 29/09/2015 page : 7341
Réponse publiée au JO le : 13/09/2016 page : 8148
Date de changement d'attribution: 12/02/2016
Date de renouvellement: 26/04/2016

Texte de la question

M. Hervé Féron attire l'attention de Mme la ministre de la culture et de la communication sur le développement de l'offre culturelle légale en ligne. En réponse à une question de la députée Véronique Louwagie, le 2 janvier 2015, Mme la ministre a déclaré que « l'axe prioritaire » était désormais celui du « développement de l'offre légale en ligne », pour permettre aux internautes de trouver facilement « des offres ergonomiques, riches et accessibles financièrement ». C'est en effet à ce problème qu'il faut s'attaquer, comme le note la Haute autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur Internet (Hadopi), dans son rapport intermédiaire sur le signalement des œuvres introuvables (2015) : « Lorsque l'on demande aux internautes français ayant des pratiques illicites les raisons pour lesquelles ils ne se tournent pas vers une offre respectueuse du droit d'auteur, le problème de l'offre arrive en seconde position avec 48 % des arguments avancés, juste derrière la problématique du prix ». Plutôt que la répression, le Gouvernement a fait le choix du développement de l'offre légale, et il ne peut que l'en féliciter. Néanmoins, pour le moment, les sites proposant un service de vidéos à la demande (VàD) disposent toujours d'un catalogue trop mince pour séduire davantage d'utilisateurs. Au total, sur 30 000 films, seuls 10 000 seraient disponibles légalement. C'est d'ailleurs à cette difficulté que s'est heurtée la plateforme américaine Netclic, qui ne compte aujourd'hui que 250 000 abonnés malgré un modèle florissant outre-Atlantique. Or c'est bien en améliorant l'offre légale que l'on viendra à bout du piratage, comme on a pu le voir avec le modèle de la musique en illimité. En effet, le téléchargement illégal de contenus audio a considérablement baissé depuis l'arrivée de Sportif, Deezer et autres plateformes de streaming (plateformes qui soulèvent d'ailleurs d'autres questions extrêmement importantes, notamment en termes de rémunération des artistes-interprètes). Pour améliorer la disponibilité des films sur les sites d'offre légale, seule serait efficace une réforme de la chronologie des médias, non pas sur la première séquence (la fenêtre cinématographique, déjà passée de 6 à 4 mois), mais sur la disponibilité en Vade (réduite à moins de 36 mois, soit 3 ans). Le Centre national du cinéma et de l'image animée s'est lui-même prononcé en faveur d'une telle réforme. Au vu de ces éléments, il souhaiterait connaître la stratégie du Gouvernement pour développer l'offre légale de films sur Internet.

Texte de la réponse

La chronologie des médias constitue un pilier essentiel du système vertueux de préfinancement des œuvres cinématographiques en France. Cette chronologie, résultant d'un accord interprofessionnel étendu par arrêté, repose sur la cohérence et la proportionnalité des différentes fenêtres d'exploitation vis-à-vis du poids et des obligations de chacun dans le préfinancement des œuvres. Depuis le milieu des années 2000, l'adaptation de la chronologie des médias est apparue nécessaire, du fait de l'apparition de nouveaux modes de diffusion en vidéo à la demande (VàD) sur les réseaux numériques, de la montée en puissance concomitante de la piraterie audiovisuelle et de l'accélération généralisée du cycle d'exploitation des films. Un accord professionnel, signé le 6 juillet 2009 par près de 30 organisations professionnelles et opérateurs représentatifs, a fixé les délais applicables à l'ensemble des modes de diffusion des films. Les stipulations de cet accord relatives aux délais d'exploitation ont été rendues obligatoires par arrêté du 9 juillet 2009 pour toute entreprise du secteur du cinéma, pour tout éditeur de services de médias audiovisuels à la demande (SMAD) et pour tout éditeur de services de télévision. Au-delà de la fixation des délais, les parties ont également intégré dans cet accord diverses stipulations, participant à la cohérence économique d'ensemble de la chronologie de diffusion des films, concernant d'autres aspects de l'exploitation des œuvres cinématographiques sur les services de médias audiovisuels à la demande et sur les services de télévision, relatifs notamment à la promotion des œuvres, à la possibilité d'exploitation exclusive par les services de télévision ou à la rémunération des ayants droit. Faute d'avoir été dénoncé par une ou plusieurs organisations professionnelles représentatives dans un délai de 3 mois avant sa date d'échéance, l'accord du 6 juillet 2009 a été reconduit tacitement chaque année. Courant 2014, le centre national du cinéma et de l'image animée (CNC) a rencontré formellement l'ensemble des organisations professionnelles et sociétés signataires de l'accord du 6 juillet 2009, la société des auteurs et compositeurs dramatiques (SACD) et la société civile des auteurs, réalisateurs et producteurs (ARP). Durant cette phase d'échanges bilatéraux, le CNC a recueilli les positions des professionnels et sondé auprès d'eux, de manière confidentielle, les principales hypothèses de travail relatives aux évolutions de l'accord. A l'issue de ce processus, lors d'une seconde phase de négociations, le CNC a soumis aux signataires potentiels plusieurs projets d'avenant global à l'accord actuel, afin notamment d'accélérer et de rendre plus simple la mise à disposition des œuvres de cinéma auprès du public, dans le respect des principes vertueux de financement des œuvres, qui sont la clé de voûte de la diversité du cinéma. Les négociations sont toujours en cours. En outre, l'article 13 bis du projet de loi relatif à la liberté de la création, à l'architecture et au patrimoine, tel qu'issu des deux lectures à l'Assemblée nationale et au Sénat et de la commission mixte paritaire, prévoit pour le producteur une obligation de rechercher une exploitation suivie de l'œuvre audiovisuelle, conforme aux usages de la profession. Cette disposition prévoit que le champ et les conditions de mise en œuvre de cette obligation renforcée sont définis par voie d'accord professionnel étendu devant intervenir dans les trois mois de la promulgation de la loi, ou, à défaut, par décret en Conseil d'État. Cet accord doit être conclu entre les organisations professionnelles de producteurs, les représentants des auteurs, les éditeurs de services de télévision ou de médias audiovisuels à la demande, ainsi que, le cas échéant, les représentants des cessionnaires ou mandataires de droits d'exploitation. Ainsi, l'instauration pour les œuvres audiovisuelles et cinématographiques d'une obligation d'exploitation suivie et l'intégration dans le champ de l'accord de l'ensemble des professionnels concernés permettront de rendre ces œuvres plus accessibles au public, en particulier sur les supports numériques. Les négociations professionnelles ont d'ores et déjà commencé, sous l'égide du CNC, pour parvenir le plus rapidement possible à la conclusion d'un accord qui pourra être rendu obligatoire par la ministre de la culture et de la communication. Ces négociations sont conduites conjointement avec celles sur l'évolution de l'accord concernant la chronologie des médias.