Question de : M. Jean-Luc Warsmann
Ardennes (3e circonscription) - Les Républicains

M. Jean-Luc Warsmann attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice sur le phénomène de radicalisation religieuse, notamment lié à l'islam, au sein des établissements pénitentiaires. Il la prie de bien vouloir lui indiquer les mesures qu'elle entend prendre pour lutter contre ce phénomène avec efficacité et pour renforcer le service de renseignement pénitentiaire.

Réponse publiée le 19 avril 2016

La lutte contre la radicalisation à dimension religieuse dans les établissements pénitentiaires demeure une priorité du Gouvernement. Le plan de lutte contre le terrorisme annoncé par le premier ministre le 21 janvier 2015, comporte un important volet pénitentiaire. Au-delà des mesures spécifiques de prise en charge de personnes détenues radicalisées, et d'un plan ambitieux de formation des personnels pénitentiaires et intervenants, l'option a été prise de mettre en oeuvre une politique de prévention à destination de toutes les personnes détenues : 60 aumôniers supplémentaires viennent renforcer les 182 actuellement en poste ; en matière de prévention de la récidive, vont être généralisées des interventions collectives au sein des quartiers arrivants des maisons d'arrêt tant sur le cadre d'exécution de la loi (principe des stages citoyenneté en milieu ouvert) que sur la mobilisation des ressources nécessaires pour préparer sur un plan socio-économique un aménagement de peine ou un parcours d'exécution de peine. Ces stages permettront également d'identifier les personnes détenues réfractaires aux principes républicains et susceptibles de se radicaliser ou en voie de l'être. Par ailleurs, le travail quotidien d'observation et de renseignement réalisé par les personnels pénitentiaires permet de mettre en œuvre des modalités de gestion de détention destinées à prévenir le prosélytisme. La formation des personnels est renforcée à cette fin en formation initiale et continue. Grâce au renseignement pénitentiaire, le ministère de la justice s'emploie à détecter les mouvements de repli identitaire et de radicalisation, et de gérer la détention des personnes concernées. Ainsi, le renseignement pénitentiaire voit également ses moyens renforcés avec 111 nouveaux emplois. Chaque établissement bénéficie notamment d'un à deux officiers à plein temps pour coordonner ce renseignement et les directions interrégionales des services pénitentiaires sont renforcées par des personnels dédiés au renseignement (officiers, personnels d'insertion et de probation, informaticiens, analystes-veilleurs). Au niveau central, le bureau du renseignement pénitentiaire est également renforcé. La transmission d'informations en provenance des services de renseignements à destination des niveaux national, interrégional ou local du renseignement pénitentiaire est actuellement régie par des protocoles signés avec certains partenaires de renseignement (direction générale de la sécurité intérieure et unité de coordination de la lutte anti-terrorisme au niveau national). Un directeur des services pénitentiaires a été mis à disposition de l'unité de coordination de la lutte anti-terrorisme pour faciliter les échanges liés à la radicalisation en prison. Un décret est en cours d'élaboration afin de définir les missions des services de renseignement pénitentiaire et de préciser leurs relations avec les services spécialisés du renseignement. Enfin, une doctrine d'emploi du renseignement pénitentiaire précisant le fonctionnement et l'organisation du réseau du renseignement pénitentiaire a été élaborée. Par ailleurs, la création des unités dédiées constitue l'une des principales mesures de la partie pénitentiaire du plan de lutte contre le terrorisme annoncé par le premier ministre le 21 janvier 2015. Quatre de ces unités dédiées, en plus de celle expérimentée à la maison d'arrêt des hommes de Fresnes, seront opérationnelles début 2016. Pour des raisons tenant à l'architecture, la géographie, la capacité des sites à mettre en œuvre rapidement le dispositif, les implantations suivantes ont été retenues, en complément de l'unité mise en œuvre à la maison d'arrêt de Fresnes fin 2014 : deux unités à la maison d'arrêt de Fleury-Mérogis, une à la maison d'arrêt d'Osny et une au centre pénitentiaire d'Annœullin, près de Lille. L'affectation en unité dédiée sera réservée aux hommes détenus majeurs, en raison de l'implantation de ces unités dans des établissements ou des quartiers d'hébergement n'accueillant qu'une population pénale masculine. Cette affectation permettra d'assurer un encellulement individuel. Tout détenu placé en unité dédiée sera pris en charge dans le respect du régime ordinaire de détention, avec les droits et obligations y afférents (maintien des liens familiaux, accès aux activités, etc.). La mise en œuvre de telles unités répond à la nécessité de proposer une prise en charge adaptée des personnes détenues radicalisées ou en voie de radicalisation en veillant au respect du bon ordre au sein des établissements pénitentiaires concernés et en évitant la radicalisation d'autres personnes détenues. Deux unités seront consacrées à l'évaluation des personnes détenues radicalisées ou en voie de radicalisation. L'une d'elle sera implantée à la maison d'arrêt de Fresnes qui bénéficie de la proximité du centre national d'évaluation. La gestion des interdictions de communiquer, nombreuses dans les dossiers d'association de malfaiteurs, a conduit à la création d'une seconde unité d'évaluation à la maison d'arrêt de Fleury-Mérogis. À la suite de l'évaluation qui aura été réalisée et en fonction de leur profil, les personnes détenues pourront être intégrées à un programme de prise en charge et affectées dans l'une des trois autres unités dédiées implantées dans la maison d'arrêt d'Osny ou de Fleury-Mérogis, ou au centre pénitentiaire de Lille Annœullin. Chaque unité pourra proposer des modes de prise en charge différents liés au profil des personnes. Par ailleurs, le personnel y sera dédié (grâce aux renforcements permis par le plan de lutte contre le terrorisme) et spécialement formé.  Enfin, le dispositif des unités dédiées n'est pas exclusif d'une prise en charge adaptée des détenus radicalisés dans tout établissement pénitentiaire. La détermination du ministère de la justice à lutter contre la radicalisation pouvant conduire au terrorisme est sans faille. Les mesures précitées, qui attestent de la force de cette volonté, s'inspirent d'un équilibre permettant dans le même temps de refuser l'amalgame entre l'exercice d'une religion et des comportements violents assimilables à de véritables dérives sectaires.  

Données clés

Auteur : M. Jean-Luc Warsmann

Type de question : Question écrite

Rubrique : Système pénitentiaire

Ministère interrogé : Justice

Ministère répondant : Justice

Dates :
Question publiée le 8 décembre 2015
Réponse publiée le 19 avril 2016

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